Les 27 pensées et citations de Louis-Auguste Martin :
L'éloquence comme la poésie doit jaillir de la passion, être spontanée, libre, ardente ; c'est une corde sonore dont la vibration répond à la vigueur du doigt qui la touche.
L'amour d'une mère efface bien des pleurs.
Une conformité de caractère, d'idées, de goûts, d'habitudes, est la plus sûre condition d'une amitié solide ; aussi peut-il s'élever, entre les méchants mêmes, une amitié susceptible d'un dévouement sans borne et d'une fidélité inaltérable. Oui, pour le malheur de la société, les plus grands criminels comme les plus hommes de bien doivent à une étroite intimité la constance dans leurs penchants. Combien de couples hideux ont parcouru la carrière du crime sans jamais se désunir, sans jamais se dénoncer !
L'espace que la divergence d'opinion met entre deux hommes se rétrécit beaucoup par la ressemblance de caractère, et des adversaires par les idées peuvent être amis par les sentiments. On a même attribué au contraste des idées et des goûts le pouvoir de faire naître l'amitié.
Quand un homme est souillé d'une faiblesse méprisable d'amour-propre ou d'ambition, tellement enracinée chez lui que les conseils ne feraient que l'aigrir, un ami s'appliquera en silence à détourner de sa tête les périls où elle l'expose à son insu.
L'indulgence pour les défauts d'un ami les entretient et les renforce ; mieux vaut être seul, parce que la conscience est un meilleur guide. Or, un ami étant une seconde conscience qu'on aime à consulter autant et plus que soi-même, on s'arrête à des paroles qui flattent nos passions, car elles sortent d'une bouche aimée. En marchant ainsi sous le regard et sous la responsabilité d'un autre, on a plus d'assurance et moins de scrupule.
On est bien près d'aimer celui à qui on indique une meilleure voie à suivre, et les bons avis sont une nourriture de l'amitié.
Une bienveillance réciproque n'est pas toujours un reflet de l'amitié, car elle s'exerce le plus souvent sur des qualités et des avantages secondaires ou isolés, tandis que l'amitié véritable se lie à l'ensemble d'une personne. Mais comme la bienveillance est un semblant d'amitié, on lui a donné son nom, par l'habitude où l'on est d'exprimer les moindres sentiments qu'on éprouve avec des mots capables de les revêtir de sublimité. Néanmoins, la bienveillance est un prélude à l'amitié ; souvent on passe d'un bon accueil à un service, d'un conseil à une confiance réciproque.
Entre les mille bonheurs dont on poursuit la lointaine chimère, l'amitié, fruit mûr de l'expérience et de la réflexion, est celui qui expose à moins de déceptions ; les douces prévenances, les attentions délicates, un dévouement de tous les jours en font une sorte de providence veillant toujours sur nous.
C'est par l'estime que commence la véritable amitié ; c'est par la vertu qu'elle se maintient.
Pour que l'amitié soit abritée contre toutes les intempéries du sort, elle doit se former avec certaines conditions de caractère ; elle veut une âme expansive, un esprit peu infatué de lui-même, un amour-propre qui engage l'homme à n'enrôler dans son intimité que ceux dont le contact rehausse sa valeur personnelle.
Le plus à redouter pour l'amitié, c'est un changement de condition qui élève ou abaisse l'un sans l'autre, et les expose à se voir trop à distance. Les négligences font aussi tiédir l'amitié, et les trop fréquentes absences sont un tamis à travers lequel elle fuit goutte à goutte.
N'ouvrez pas un grand salon à vos amis, mais ayez une maison bien petite, bien simple ; et peu accourront, sans doute ; mais sur ceux-là, du moins, vous pourrez compter dans la bonne comme dans la mauvaise fortune. Car si l'utilité ne doit pas être la base de l'amitié, elle doit en découler clandestinement, sans se faire voir. Or, c'est dans les jours de détresse que l'amitié luit alors, comme un rayon vivifiant et réparateur.
Un cœur trop divisé n'appartient à personne ; les liens trop étendus se relâchent d'eux-mêmes. Ne pensez pas qu'un seul ennemi soit peu, ni que mille amis soient beaucoup.
Il en est de l'amitié comme du bonheur : on en goûte la plénitude comme une chose ordinaire et pouvant toujours durer, c'est au moment de les perdre qu'on en sent tout le prix.
La communauté de joie et de douleur entre deux personnes provoque ces doux épanchements où elles confondent leurs deux âmes en une seule.
Au moment solennel du passage de la vie à la mort, quoi de plus effroyable que des yeux mourants qui s'égarent dans le vide, que des mains déjà froides qui ne se sentent pas pressées par l'étreinte réchauffante d'une main amie ?
Toute existence est incomplète si elle ne s'unit à une autre existence, comme le bonheur est imparfait s'il ne s'épanche et ne se communique.
Si d'un camarade d'enfance on se fait dans la suite un ami sérieux, c'est une sûre garantie de constance et de solidité que le souvenir d'avoir ensemble balbutié les premiers mots et couru aux premiers jeux.
Amitié d'enfant, c'est de l'eau dans un panier.
La société est le produit de l'affinité des besoins, de l'accord des sentiments, de la conformité d'intérêts qui agitent les hommes ; l'amitié est un résultat semblable, mais plus prononcé, plus intime parce qu'il est concentré en un petit nombre de personnes.
Le plus noble rôle du vieillard est d'applaudir au triomphe de l'homme qu'il avait encouragé enfant ; c'est d'admirer l'idée enfin éclose qu'il avait vue en germe ; c'est d'assister du moins, calme et souriant, aux mouvements nécessaires qui s'effectuent sans lui, mais sous son regard, et d'augurer, par la vue de son expérience, les autres mouvements qui en sortiront un jour.
Si la vieillesse est l'âge où l'on doit jouir des biens cultivés avec sueur par les âges précédents, c'est l'âge aussi où l'on doit s'être approvisionné de vertus et de bons conseils, afin d'être un exemple à la génération nouvelle qui cherche à trouver sous les rides les leçons de l'expérience.
Les distractions d'un esprit cultivé sont les plus pures et aussi les moins passagères ; elles conviennent à toutes les positions sociales, comme à tous les pays et à tous les temps, dans la solitude aussi bien qu'au milieu du monde.
Les rapports des sexes sont, dans la nature, grossiers et brutaux ; dans la société humaine, ils sont épurés par les sentiments moraux qui les gouvernent, par les lois qui les déterminent, par l'éducation qui les éclaire. L'amour du sexe n'est donc pas chez l'homme un besoin uniquement physique, mais une exaltation simultanée du cœur et des sens.
On se façonne à l'esclavage comme à un malheur sans remède ; les membres se plient aux fers ; et l'homme, par habitude ou par ignorance, oublie ou méconnaît son droit naturel de vouloir de sa propre volonté, et d'agir pour son propre compte ; si rien ne parle à ses yeux d'un autre sort, il s'amuse à mesurer ses fers, sans vouloir les briser, ni même les détendre.
L'éloquence n'est pas toujours un vent impétueux prélude des tempêtes, c'est parfois une brise fraîche qui ramène le calme ; elle peut être aussi harmonieuse que le chant, aussi douce et aussi pénétrante que la poésie. Alors elle est insinuante, et coule furtivement de l'oreille au cœur pour y verser la persuasion. L'hypocrisie, la ruse, les passions envieuses, mais cachées, emploient cette éloquence pour décocher plus sûrement leurs traits acérés, dissimulés ainsi sous des fleurs.