Il n'y a que les idées contestées qui avancent et qui mûrissent. D'autres redoutent les objections ; moi, je les appelle.
Dès qu'un risque existe, il vaut mieux lui faire sa part raisonnable que de subir sa loi tyrannique.
Il y a autant de distance entre le plagiat et le progrès qu'il y en a d'un pôle à l'autre.
Toute bonne polémique doit aller au fait ainsi que la flèche va au but.
Les rigueurs inefficaces sont les pires rigueurs : c'est l'arme qui, au lieu de tuer le gibier, éclate entre les mains du chasseur.
Il y a des situations impérieuses contre lesquelles on se débat vainement afin de s'y soustraire.
Il y a des situations piteuses où l'on n'a pas le choix des issues : on se sauve comme on peut.
La liberté individuelle a des limites que la nature lui a assignées ; ne tentez ni de les restreindre ni de les étendre. Telles qu'elles existent, respectez-les.
En toute chose, dès qu'on a franchi la limite, l'on devient seul comptable de sa conduite !
Autorité et mensonge, prestige et mauvaise foi, ce sont là des choses qui s'excluent.
Le plus respectable des sentiments est celui de la fidélité.
Il faut quelques détails pour bien peindre un seul fait.
En France, on fausse tout en voulant allier ce qui s'exclut.
Lequel vaut mieux, ou de fermer les yeux, ou de les ouvrir à la clarté de l'évidence ? Si ce n'est pas pour regarder, à quoi sert d'avoir des yeux ?
Le bonheur est moins dépendant des circonstances que du caractère.
À vingt ans on peut être mécontent de son sort, mais on n'est pas encore détaché de la vie ; l'espérance, ce mirage qui nous abuse jusqu'à la tombe, et nous y conduit, glace le courage, enchaîne la volonté. Non ! à vingt ans, ce n'est pas de la vie dont il est difficile de se défaire : c'est de l'espérance.
Il y a aussi loin de l'obstination à la fermeté qu'il y a loin de la fermeté au découragement.
La fraternité suppose que tout sentiment de haine et d'hostilité aura disparu dans les cœurs, et qu'en aucun cas on ne recourra à la force.
L'impôt est et doit être la mesure de la richesse.
De même que la saleté, la propreté est contagieuse. La propreté dans les rues, dans les cours, dans les maisons, ne manque jamais de s'étendre aux appartements, aux ménages, aux individus. C'est surtout par les logements d'un peuple qu'on peut juger du degré de civilisation auquel il est arrivé.
Enfermer un malfaiteur avec des malfaiteurs plus pervertis que lui, ce n'est pas le punir, c'est encore moins le corriger ; c'est faire descendre dans son cœur le ressentiment, ce n'est pas faire monter la honte à son front !
On me demande : « Qu'appelez-vous un bon gouvernement ? » — Je réponds : Qu'appelez-vous un bon vaisseau ? Qu'appelez-vous un bon fusil ? Un bon vaisseau, n'est-ce pas celui qui est construit de telle sorte qu'il soit en état d'affronter les épreuves de la plus longue ou de la plus difficile traversée ? Un bon fusil, n'est-ce pas celui qui peut contenir la plus forte charge avec le moins de risque d'explosion, porter à la fois le plus loin et le plus juste ?... Eh bien, un bon gouvernement, c'est le gouvernement qui remplit les conditions les plus propres à atteindre le but qui lui est assigné ; c'est celui qui offre le moins de prise au danger d'un naufrage, ou le moins de chance à l'éclat d'une explosion ; c'est celui qui, existant en vertu de certaines lois, les observe strictement ; c'est celui qui ne prend pas le sommet pour la base et la base pour le sommet ; c'est celui qui ne fausse aucun ressort ; c'est celui qui puise sa force dans son homogénéité ; c'est celui qui fonctionne sans frottements nuisibles ou dangereux ; c'est celui qui met en mouvement toutes les énergies de la nation ; c'est celui qui imprime à la circulation, sous toutes les formes, l'essor le plus rapide ; c'est celui qui augmente la valeur de l'actif national ; c'est celui qui diminue le paupérisme ; c'est celui qui ne laisse en retard aucun progrès réel, en souffrance aucune prétention légitime, en suspens aucune question importante, à l'écart aucune capacité reconnue, aucun concours utile ; c'est celui qui embrasse et satisfait le plus grand nombre d'intérêts généraux ; c'est celui qui s'élève le plus haut au-dessus des considérations purement individuelles ; enfin, c'est celui qu'il est facile de réformer et difficile de renverser.
Toute gloire que l'on consent à payer est une gloire dont il faut se défier ; car ce n'est pas une gloire, mais un luxe — luxe que la nation la plus riche ne se donne jamais impunément, car il ne sert qu'à la faire accuser de faiblesse ou d'iniquité. Si elle ne se fait pas rembourser par le vaincu ses frais d'expédition, le monde en conclut hautement ou que sa victoire est douteuse, ou qu'elle a reconnu que la guerre qu'elle avait faite n'était pas légitime, ou qu'elle n'a pas osé la pousser jusqu'au bout.
Ce ne sera que par les grands travaux de la paix qu'on fera diversion aux ardentes tentations de la guerre. Si dispendieux que paraissent les travaux de la paix, ils ne coûteront jamais la dixième partie de ce que ces tentations coûteraient, alors même qu'elles resteraient à l'état de velléités. La France est avide de gloire. Il lui faut ou la gloire que promet la guerre, ou la gloire que peut donner la paix.
Avec une politique droite, habile, ferme, persévérante, exempte de témérité et de morgue, mais exempte aussi de timidité et d'abaissement ; avec une administration simple, vigilante, économe, judicieuse, la France peut encore reprendre en Europe le rang qu'elle n'y aurait jamais dû perdre.
Ce qui caractérise le peuple français, c'est un admirable esprit d'à-propos qui sait revêtir toutes les formes les plus simples, les plus brillantes, les plus caustiques ; c'est un sens droit, c'est un sens prompt à saisir toutes choses : précieux et puissant ressort qu'on n'a pu réussir à briser, mais dont de maladroits gouvernements n'ont pas su se servir.
Soyons forts, si nous voulons consolider nos institutions, affermir la paix et calmer les susceptibilités du pays. Plus le pays se sentira fort, et moins il sera disposé à se montrer ombrageux.
Force armée et liberté respectée ne sauraient vivre longtemps ensemble. Le passé et l'histoire sont là pour l'attester.
La fausse fermeté amasse les nuages ; la vraie fermeté les dissipe.
La vie qu'on ôte à l'assassin ne rend pas la vie à la victime.
Je ne demande pas aux baïonnettes où elles ont été forgées, aux balles où elles ont été fondues. Je demande aux baïonnettes de se changer en socs de charrue ; je demande aux balles de se changer en lettres d'imprimerie.
Élevée à la hauteur d'une doctrine, l'acceptation loyale du Fait Accompli simplifie tout ; elle cicatrise les plaies, elle apaise les haines, elle met fin aux récriminations, elle renouvelle les rapports', elle étend les points de vue, elle ouvre de nouveaux horizons.
Entre l'absolu et l'arbitraire, il y a autant de distance qu'il en existe entre la vérité et l'erreur.
La politique tend chaque jour à se transformer plus qu'on ne paraît s'en douter. Autrefois, l'État le plus puissant était celui qui se faisait craindre ; aujourd'hui, l'État le plus puissant est celui qui se fait envier. La prépondérance qu'il exerce est surtout dans l'exemple qu'il donne.
Diviser les hommes, c'est créer des unités.
Les détails sont à toute bonne organisation ce que les racines sont à l'arbre. Sans l'étendue et la profondeur de ses racines, le chêne séculaire ne résisterait pas à la violence des ouragans.
De vaincu à vainqueur, il n'y a pas de traités ; il n'y a que des trêves.
Qui est gravement menacé se croit facilement trahi.
Il y a des torts qu'on n'efface qu'en les expiant.
La tolérance qui n'est pas la même pour tous a un nom, elle s'appelle partialité.
La maternité, ce devrait être la vertu de la femme, son honneur et son bonheur, sa récompense !
Tuer le meurtrier, c'est l'absoudre par imitation.
Quand on n'est pas le plus fort, il faut être le plus courageux.
Les illusions n'aboutissent qu'à fausser les situations et les caractères.
Il est plus facile d'armer les nations que de les désarmer.
En toutes choses, je crois que la précipitation est funeste. J'aime passionnément le mouvement, mais seulement quand il est imprimé sans effort par la réflexion fortement concentrée.
Loin de diminuer la fermeté, l'aménité lui donne du relief.
L'ignorance est aussi impuissante à organiser qu'elle est expéditive à détruire.
Il est de ces lâchetés dont on ne se relève jamais, de si haut qu'on tombe.
Il faut être juste et ne jamais demander à un autre ce que soi-même on ne ferait pas, ce que soi-même on ne devrait pas faire.