Il faut être juste et ne jamais demander à un autre ce que soi-même on ne ferait pas, ce que soi-même on ne devrait pas faire.
Ce qui est juste est toujours opportun.
Laissez l'homme aller selon sa pente naturelle, ce ne sera pas à la liberté qu'elle le conduira, ce sera à l'intolérance. L'homme naît à la fois ignorant et intolérant. Qu'il déclame contre l'intolérance dont il souffre, ou qu'à son tour il exerce l'intolérance dont il a souffert, si l'on y regarde de près et attentivement, on verra qu'il n'est guère moins intolérant dans le premier cas que dans le second.
À quoi bon la force et l'intelligence humaines, si ce n'est pas pour être dépensées ? L'épargne n'y ajoute rien, mauvais capital que la paresse !
L'instruction est à l'homme ce que la charrue est à la terre.
L'instruction est la première de toutes les cultures, car elle est celle de l'homme, la viticulture. Perfectionnons celle-là, et toutes les autres se perfectionneront ensuite d'elles-mêmes.
La patience coûte peu à qui travaille beaucoup.
La pire des tartuferies est celle de l'égoïsme.
La liberté n'est pas la vérité, mais elle est le chemin le plus droit et le plus court qui y mène.
Faire une concession, c'est transiger avec une opinion qu'on regarde comme une erreur, c'est immoler dans sa conscience la raison à la force, c'est agir sans conviction sous le coup de la menace, c'est abjurer avec humilité devant le danger ; c'est, enfin, accorder à regret ce qu'on ne se croit plus assez fort ou ce qu'on ne se sent pas assez vaillant pour refuser.
Qui persécutera sera persécuté ; quiconque prétendra rétablir l'union et la paix par la persécution ne réussira qu'à perpétuer la discorde et la guerre. La paix n'est possible qu'avec la liberté.
Il n'y a de paix durable que celle qui ne s'achète au prix d'aucune faiblesse.
La civilisation et la barbarie s'excluent : la barbarie, c'est la guerre ; la civilisation, c'est la paix.
L'orgueil fait repousser comme mauvaises les meilleures idées.
L'ordre public, c'est ou ce doit être la liberté individuelle garantie par la force collective.
Si l'optimisme est dangereux, c'est surtout en finances, où il prélude par l'imprévoyance et finit par la panique.
L'homme qui renie son opinion par intérêt est un drôle.
L'opinion publique est un corps qui a besoin d'élasticité, autrement ce corps se brise et brise tout avec lui.
L'objection est à l'idée ce que le poids dans la balance est à l'objet qu'il sert à peser. Par la force ou la faiblesse des objections, on juge de la justesse ou de la fausseté des idées.
La France est une nation prodigue et routinière... Nous n'avons pas de scrupules lorsqu'il s'agit de dépenser follement l'argent des contribuables ; nous ne ressentons de craintes que lorsqu'il s'agit de l'employer utilement. C'est, en effet, l'esprit de tous les prodigues qui se ruinent : il n'y a jamais pour eux de placements ni assez sûrs ni assez avantageux !
Ce qu'il faut désormais aux nations, ce sont moins des additions de territoires que des certitudes de débouchés ; or, des débouchés ne se conquièrent pas la baïonnette au bout du fusil: ils se conquièrent en vendant et en transportant à meilleur marché que ses concurrents les produits de son sol ou de son industrie.
Une grande nation n'a que cette seule alternative : Conquérir ou Civiliser.
L'influence d'une grande nation est dans la sagesse de ses lois, la plénitude de ses libertés, l'essor de sa prospérité et l'ordre de ses finances.
Il y a deux dictionnaires : le dictionnaire à l'usage des gens, y compris la plupart des diplomates, qui parlent pour ne rien dire ; et le dictionnaire à l'usage des penseurs, qui parlent pour donner à leur pensée un corps qui la rende saisissable. Rien de plus dangereux que les mots qui ne sont pas réellement des noms. Il n'est pas un seul de ces mots qui n'ait été couvert de sang.
De toutes parts, le vieux monde s'écroule ; de toutes parts, le nouveau monde s'élève. L'un entre au tombeau ; l'autre sort du berceau.
Le monde, dans ses combinaisons, est moins varié qu'il ne le paraît : les mêmes fruits sont portés chaque année par les mêmes arbres ; les mêmes conséquences sont ramenées par les mêmes causes ; les mêmes expiations rappellent les mêmes fautes.
La modestie est comme l'ombre qui fait valoir la lumière, c'est la chasteté du mérite, c'est la virginité des belles âmes.
La misère sera toujours de ce monde si elle n'a jamais pour l'en chasser que la charité. L'impuissance de la charité se démontre par tous les efforts qu'elle a tentés et le peu de résultats qu'elle a obtenus.
On ne brise pas impunément tous les ressorts du travail, tous les anneaux du crédit : car, parvenue à un certain degré, la misère est un torrent qui renverse et emporte toutes les digues.
La misère publique est la cuve où toutes les passions fermentent !
La misère méritée est la sanction pénale de la paresse et de l'inconduite.
Le salaire des ministres peut être faible ou nul, sans inconvénient, parce que les fonctions ministérielles ne doivent pas être une carrière, mais un acte de dévouement à ses idées, à ses convictions, à son pays.
Partagez le commandement d'une armée entre neuf généraux de division, imposez-leur l'obligation de ne livrer de batailles qu'après en avoir soumis le plan à la majorité des voix, et vous me direz combien de victoires vous aurez... perdues !
Tout ministère qui ne se résume pas dans un homme, dans une volonté, tout ministère qui sera composé de neuf membres, tout ministère qui aura besoin de délibérer sur tout sera faible : car il ne pourra prendre de grand parti sur rien; il manquera de spontanéité, d'initiative, de décision ; il emploiera à vaincre la difficulté de se réunir et de se mettre d'accord le temps qu'il devrait réserver à l'étude des questions, à la maturité des solutions, à la vérification des idées.
Un ministère ne tombe jamais que sous le poids de ses fautes. Loin de l'ébranler, les attaques injustes, les accusations exagérées ne servent qu'à l'affermir. Elles exercent sur lui l'action du marteau qui enfonce le clou sur lequel il frappe. Elles le fortifient par la lutte ; elles le grandissent par le triomphe.
Vouloir faire marcher en avant un ministère sans idées, autant vaudrait entreprendre de faire remorquer un convoi par une locomotive sans combustible !
La justice limitée, c'est l'impuissance ; la vérité limitée, c'est l'erreur.
L'art de gouverner, c'est l'art de choisir ses hommes.
La paix, comme la guerre, a ses champs de bataille ; il ne suffit pas qu'un peuple soit brave devant la mort, il faut encore qu'il soit brave devant la liberté, et que, pour un petit péril et un petit mal, il ne renonce pas à une grande victoire et à un grand bien. Lorsqu'un peuple est brave devant la liberté, la confiance qu'il puise en lui-même lui fait traverser sans émotion les crises les plus graves. Il ne s'effraye de rien, parce qu'il calcule tout.
Semez le mensonge, il n'en sortira jamais que complications, périls, honte, faiblesse et témérité.
La science limitée, c'est l'ignorance ; la foi limitée, c'est le doute.
Ce qu'il y a de pire, ce n'est pas la médiocrité proprement dite : c'est la médiocrité satisfaite d'elle-même ; c'est la médiocrité qui prend pour le but le point où elle s'arrête à mi-chemin et quelquefois même au premier pas.
Par la maternité, la femme se relève et s'élève. Elle n'est plus irresponsable et désœuvrée. Elle tient dans ses mains — elle le sait — l'œuvre de l'avenir, et elle en répond. La trame qu'elle ourdit est celle de l'humanité. La fonction qu'elle accomplit est la plus haute, la plus noble, la plus difficile de toutes les fonctions. En est-il, en effet, de plus difficile, de plus noble et de plus haute que celle de concevoir un enfant, de le porter neuf mois dans ses entrailles, de lui donner la vie au risque de perdre la sienne, de l'allaiter pendant plus d'une année, de l'élever, de l'instruire, de discerner ses qualités, de reconnaître ses défauts, de former son caractère, son cœur et son esprit ?
C'est par la clémence souveraine s'exerçant librement que se manifestent et se prouvent la modération et la fermeté d'un système politique. La clémence est un gage de force accordé par la confiance du souverain à la sécurité publique.
Le droit de punir commence par n'être que la satisfaction du besoin de vengeance.
On n'a le droit, sous aucun prétexte, de tuer, de violer, ni de voler.
Tuer un homme et lui voler l'argent qu'il possède est un acte criminel puni par la justice. Tuer cinq cent mille hommes et leur voler le sol sur lequel ils étaient nés est un acte glorieux, immortalisé par l'histoire ! A-t-on ouvert le cerveau humain pour vérifier si entre le meurtre et le vol glorifiés et le meurtre et le vol qualifiés il y a une séparation qui empêche la confusion et mette à l'abri de la méprise la logique laissée par l'ignorance à l'état brut et primitif ?
Qui assure ses arrières n'est jamais dépourvu.
L'apprenti, la plupart du temps, n'est que le domestique de l'atelier.
La force n'engendre que la force.
Ouvriers sans travail ; gouvernement sans idées.
L'hypocrisie a des alliés et des cautions que la vertu n'a pas.
La liberté, c'est le mouvement ; l'autorité, c'est l'immobilité.
La division tue ; l'unité vivifie.
Où l'on reconnaît qu'un gouvernement a été sage, habile, prudent, prévoyant c'est alors que, soumis à des épreuves difficiles, il en triomphe facilement.
Quand la douleur absorbe les facultés, on ne cherche pas les remèdes, on les évite.
Aimer la liberté, c'est aimer l'ordre qui en est à la fois la conséquence et la garantie.
Avec l'autorité, rien de plus difficile que de gouverner ; avec la liberté, rien de plus facile.
L'art de gouverner, c'est l'art d'accroître le bien-être et la moralité d'un peuple.
Qui dit concurrence dit rivalité.
Tout le monde parle de progrès, et personne ne sort de la routine.
L'esprit d'exclusion engendre l'esprit d'exclusion.
La tolérance est la corruption du sentiment de la liberté. Pourquoi j'aime la liberté et pourquoi je n'aime pas la tolérance, c'est que la tolérance est toujours et inévitablement l'arbitraire et l'inégalité. Si elle n'était jamais ni l'inégalité ni l'arbitraire, elle serait la liberté sous un autre nom, et que m'importerait le nom si j'avais la chose !
Il n'y a que deux manières de commander la confiance : par la prudence ou par l'audace.
L'Anglais a la crainte du péril et l'amour de la loi ; le Français a la haine de la loi et le mépris du danger.
Il y a des passions qu'il ne faut jamais déchaîner.
Je crois à la force de la patience, mais je ne la confonds pas avec la prodigalité du temps.
Qui a raison finit toujours par être le plus fort : ce n'est qu'une question de temps et de patience.