Titre : Rien n'est plus beau que tes beaux yeux.
Recueil : Les poèmes et sonnets (1840)
Au jour qui fait pâmer la nature éperdue,
Aux atomes dorés dansant dans l'étendue,
À l'essaim réveillé des mille bruits de l'air,
Qui bourdonne à midi plus sonore et plus clair,
J’ai toujours préféré la nuit belle et sans voiles,
Et la lune surtout, blanche entre les étoiles,
Et ce silence grave, auguste, solennel,
Que l'on entend au loin parler au fond du ciel.
Et de même, aux yeux noirs dont le regard scintille,
Comme un ardent tison dans le feu qui pétille,
J'ai toujours préféré ton œil profond et bleu,
Ineffable, infini, comme la nuit de Dieu,
Ô noble créature, ô ma belle souveraine,
Dans ta chaste beauté, radieuse et sereine !
Je sens que de la lune et de ton œil si pur,
Une musique sort, visible en flots d'azur,
Qui nage et qui soupire, et flotte, et qui m'enivre,
Et qui me fait pleurer, mourir, et puis revivre ;
Et je vois qu'ici-bas rien n'est beau que les cieux,
Et qu'au ciel rien n'est beau, mon ange, que tes yeux !
Barthélemy Tisseur (1812-1843)