Biographie courte : Écrivain et auteur dramatique français né le 15 avril 1861 à Paris, Albert Guinon est décédé le 7 mars 1923 dans sa ville natale.Albert Guinon débuta en 1885 par une comédie en deux actes : J'épouse ma femme. Il publia également dans plusieurs journaux des nouvelles qui furent réunies sous le titre La rupture de Jean. Une comédie de caractère, les Jobards, suivit en 1891 au Vaudeville, puis Albert Guinon écrivit Seul (1892) et Le partage (1896), où l'auteur analysait les souffrances, pour les amants, du partage dans l'adultère.
En 1902, Albert Guinon fit représenter sur le même théâtre une nouvelle étude de caractère Le Joug ; enfin sa pièce La décadence, satire sociale et drame passionnel, qui mettait aux prises l'aristocratie déchue et les juifs enrichis, et qui avait été interdite par le gouvernement en 1901, la représentation fut donnée trois ans plus tard au Vaudeville.
Par decret du 17 janvier 1908 Guinon est nommé Chevalier de la Légion d'honneur.
Vois-tu, mon mignon, il ne faut pas lutter contre la vie : on n'est jamais plus fort qu'elle, on la subit, on ne la refait pas.
La meilleure chance qu'on ait encore trouvée de ne pas être battu, c'est de se battre.
Trop souvent, ceux qui ont beaucoup voyagé et qui aiment chercher à l'étranger leurs motifs d'admiration, s'imaginent qu'ils ont élargi leur patriotisme, quand ils se contentaient de l'égarer.
En temps de guerre, celui qui a passé l'âge de porter les armes sans être cependant un vieillard devient volontiers violent et querelleur. Il semble que les restes de son ardeur combative, inemployés au service de son pays, trouvent là comme une compensation.
Parmi les gens qui revendiquent à tout propos la liberté de penser, beaucoup n'oublient qu'un point : penser.
Les Français sont les hommes qui apportent le plus de prévoyance dans leurs affaires privées et le moins dans leurs affaires publiques.
Il est une pitié coulante et sans réaction qui, en dépit des apparences, n'est qu'un aspect de la bestialité.
Le gouvernement démocratique, c'est l'autorité qui obéit.
Les démocraties s'enorgueillissent d'être fondées sur la valeur personnelle : malheureusement, chacun y est maître de fixer la valeur qu'il a.
Au cours d'une guerre celui qui se montre un continuel pessimiste de détail, tout en se déclarant optimiste d'ensemble, rappelle ce commerçant falot qui, perdant sur chaque objet vendu, prétendait gagner sur le total.
Puisque l'ingratitude est si fréquente chez les individus, il est sans excuse d'être surpris quand on la rencontre chez les peuples.
Les pacifistes français qui essaient de justifier leurs théories en déclarant que la France fut toujours l'apôtre du droit contre la force se trompent lourdement. La France, en effet, a souvent défendu le droit, mais les armes à la main. Et il est permis de se demander si, à ces heures-là, le sentiment qui dominait en elle n'était pas précisément l'allégresse de la bataille.
Plus les hommes avancent dans la civilisation, plus ils sont capables de comprendre et d'admettre les injustices salutaires. L'aveugle besoin de justice est essentiellement le fait de l'enfant.
Dans certains cas, un peuple a le droit d'être neutre — comme un homme a le droit d'être bas.
Les gens très braves perdent facilement leur assurance quand il n'y a pas de danger.
Certains politiciens sont méthodiques dans leurs variations : ils ont une boussole à leur girouette.
Lorsqu'un politicien médiocre parvient au gouvernement, il ne faut pas s'inquiéter outre mesure : il croit prendre le pouvoir, et c'est le pouvoir qui le prend.
Certains politiciens, qui espèrent faire oublier leurs méfaits à la faveur d'un grand événement national, sont pareils à ces malandrins qui profitent d'un incendie pour se livrer au pillage.
Parmi les heureux effets de la guerre, saluons celui-ci : elle restitue à beaucoup de gens l'usage de la volonté.
En politique internationale, avec ceux qui jouent au plus fin, il faut jouer au plus fort.
Certains effets de l'énergie ont la beauté d'une œuvre d'art.
Pour qui représente le Droit, quelle supériorité dans le but ! — et quelle infériorité dans les moyens !
En diplomatie, les nations dites libérales ont cette vieille manie ingénue d'employer avec leurs adversaires les mêmes procédés qu'avec leurs amis.
L'honnêteté est de tous les pays, mais l'indélicatesse prend parfois des formes nationales.
Entre le pays qu'ils représentent et le pays où ils sont accrédités, certains diplomates ne sont guère qu'un téléphone qui fonctionne mal.
Qu'il s'agisse des peuples ou des individus, les faibles expliquent leur volte-face, et les forts les imposent.
Le fait qu'un peuple opprimé devienne quelquefois pire que le peuple oppresseur est, contre ce dernier, une note d'infamie de plus.
Certains gouvernants excellent à échapper aux dangers parlementaires, mais c'est par l'escalier de service.
Si le haut pessimiste moral est si souvent un solide optimiste pratique, c'est que la même faculté de l'esprit lui inspire, dans le premier cas, le mépris des personnes, et, dans le second, le mépris des obstacles.
S'il a plu à quelques bavards de colporter des potins ridicules, laissez-les cancaner à leur aise, ils se lasseront promptement de répéter la même chose !
Il n'y a rien au monde qui m'amuse plus que de gagner de l'argent.
Dans une vie il faut savoir mener sa barque !
En cas de guerre, une des pires souffrances c'est de n'être, ni assez jeune pour se battre, ni assez vieux pour se résigner.
Dans une grande crise nationale, on prend l'énergie de tout supporter — même les autres.
Je dis que je crois que je t'aime, parce que, n'est-ce pas, quand on n'a jamais aimé, on n'est pas sûr, on n'est pas certain.
Il faut se garder de confondre le mariage avec l'amour. L'amour est un sentiment frivole ; le mariage, une institution sérieuse.
Laissons aux hypocrites le temps de se calmer en notre absence : leur fausse indignation n'en tombera que plus vite.
Lorsqu'on n'élit pas le plus bête, il semble que ce ne soit plus la démocratie.
Les gens qui sont insupportables en famille sont souvent ceux qui montrent le plus de bonne grâce à l'égard des étrangers. Ils sont un peu comme les criminels qui soignent leur alibi.
Toutes les opinions sont respectables, pourvu qu'elles soient sincères.
Le véritable chef n'est pas celui qui châtie, c'est celui qui inspire la crainte du châtiment.
Un homme d'État gouverne avec son caractère bien plus qu'avec ses opinions.
La politique a ses bêtes puantes : il ne suffit pas de les combattre, il faut les débusquer.
En France, parmi les hommes politiques, combien de républicains d'opinion sont devenus des républicains de métier !
Un des effets les plus imprévus de cette guerre aura été d'apprendre aux riches de combien de choses ils peuvent se passer.
Le bon sens doit nous servir à former notre opinion, et la passion, à la formuler.
Tout homme politique, dont les votes en temps de paix ont prouvé l'inaptitude à prévoir et à préparer une guerre, ne devrait pas avoir le droit d'exprimer une opinion, dès que la guerre a éclaté.
La vérité est un fusil chargé qu'il ne faut pas mettre dans toutes les mains.
La première condition pour faire quelque chose de grand, c'est l'idée fixe.
Deux peuples ne s'aiment vraiment que dans la haine contre un troisième.
Peu importe qu'on augmente ou non le sou de ceux qui combattent pour la patrie : il y a des services qu'on ne reconnaît pas, la main à la poche, mais les larmes aux yeux.
À tendre la joue gauche, quand on a reçu un soufflet sur la droite, on est Jésus-Christ ou un pleutre.
La grandeur d'une nation est peut-être faite avant tout de sa continuité dans l'égoïsme.
Avec un pessimiste qui se met en colère, il y a de la ressource : il est encore capable de devenir un optimiste.
L'envieux du temps de paix fait généralement un pessimiste du temps de guerre.
L'expression supérieure de l'idée de patrie ce n'est pas de vivre en commun, c'est de mourir ensemble.
Pendant une guerre, le pessimisme est pour le civil ce que la désertion est pour le soldat.
Un peuple industriel peut mourir ; un peuple agricole est immortel.
La patrie, c'est toujours contre quelqu'un.
Avec de l'indulgence, du tact, et quelque esprit, un père et un fils qui vivent librement peuvent partager presque tous les plaisirs.
Dans nos relations, l'argent pourrait à la rigueur suppléer à l'amour, mais l'amour ne peut pas suppléer à l'argent !
Pour un peuple, une civilisation trop rapide est comme un habit somptueux endossé à même la peau.
Les gens qui savent très bien l'histoire ont souvent un grave défaut : ils excellent à transformer leur science du passé en erreurs sur le présent.
Ce qu'il y a de particulier chez les gens très instruits, c'est que même leur façon de ne pas savoir est encore du savoir.
Moralement les solitaires demeurent très longtemps jeunes, car l'impression du temps nous vient surtout du contact avec les autres.
L'observateur qui a démêlé les petitesses morales de ses amis ne les en aime pas moins, mais eux lui en veulent de se sentir pénétrés.
Le visage des sourds a l'air d'une horloge qui ne serait jamais à l'heure.
L'aveugle est généralement serein, car la condition même de sa vie est la confiance et le sourd est généralement sombre, parce qu'il demeure juste assez armé pour être défiant.
La plupart du temps, nous plaignons, non pas ceux qui sont malheureux, mais ceux qui comprennent le bonheur autrement que nous. Et notre compassion est encore de l'égoïsme.
Une des plus graves erreurs des sceptiques est de croire que l'indifférence est la meilleure condition pour voir juste.
Un des signes les plus sûrs de l'homme vraiment courageux, c'est qu'il prête naturellement du courage à tout le monde.
Il y a beaucoup de façons de gouverner mal ; il n'y en a guère qu'une de gouverner bien.
Par le suffrage universel la plèbe domine les autres classes sans pouvoir se dominer elle-même.
Lorsqu'il ne peut se dispenser de payer, le vrai avare préfère s'acquitter tout de suite, de même que, dans certaines séparations, l'on souffre moins cruellement quand l'objet aimé est parti que quand il est encore là.
L'amour de l'argent, tant décrié chez la femme galante, est cependant le seul lien qui la rattache à la vie régulière.
L'homme vraiment digne de ce nom, quand il cesse d'être aimé d'une femme, espère au moins cette dernière joie d'être détesté par elle.
Les gens qui ne peuvent pas supporter la solitude sont précisément les moins agréables des compagnons.
L'esprit humain est ainsi fait et c'est peut-être son honneur qu'il préfère une explication fausse à l'absence d'explication,
Certains faux habiles perdent leur temps et leur peine à essayer en vain de ramener leurs ennemis, au lieu de s'appuyer sur ces inimitiés mêmes pour accroître le nombre de leurs amis.
On peut aimer plusieurs fois, mais on ne fait qu'une fois la découverte énivrée de son propre cœur.
Quand une femme dit d'un homme « C'est lui le seul qui m'aime », on peut être à peu près sûr que c'est celui-là qu'elle n'aime pas.
On trouve beaucoup de femmes qui sont franches, mais on n'en trouve guère qui soient précises.
L'argent n'est jamais dépensé inutilement puisqu'il va toujours entre les mains de quelqu'un.
De quel cœur on s'armerait contre l'injustice si l'on n'était pas sûr d'avance qu'elle sera remplacée par une injustice équivalente !
Les gens qui cherchent à établir des systèmes politiques ou sociaux sans tenir compte de la psychologie essentielle de l'homme ne sont pas des esprits généreux épris de progrès, mais de véritables malfaiteurs.
Un même homme peut s'exprimer dans beaucoup de langues, il peut même penser dans plusieurs, mais sa vraie langue est celle dans laquelle il rêve.
L'indulgence même que nous témoignons à l'envieux se retourne contre nous. C'est une qualité de plus qu'il ne peut pas nous pardonner.
Les gens qui font constamment de l'ironie, même très spirituelle, sont aussi agaçants que ces chanteurs qui, avec une voix admirable, chantent pendant toute une soirée un demi-ton au-dessous.
Chaque époque dramatique a son romantisme car, à dire vrai, le romantisme, c'est la boursouflure. Notre époque a le romantisme apache.