Cette femme m'a pris dans ses bras et me parle de si près que son haleine tiède, exquise, frôle ma bouche à chaque parole. Je me sens fondre.
Te donner toutes les étoiles du ciel en un baiser sur les yeux, tous les baisers de la terre en une étoile sur la bouche.
L’enfance, c’est la clef rouillée que cachent les buis, celle qui forcerait toutes les serrures.
Le désir, c’est la flèche de rubis qui voie par-dessus l’Orénoque en flammes et décochée sans bruit.
L'amour, c'est ce pays à l'infini ouvert par deux miroirs qui se font face.
La peur, c'est un roulement de tombereau, la nuit, dans un bois où ne passe aucune route.
La douceur, c'est un vol de chouette, sous le taillis, au crépuscule.
Le contentement, c'est l'odeur d'une blonde qui, lente, efface ses bas noirs.
L'angoisse, c'est la congestion, comme émeute violette, sur le bitume où bouge un soleil ahurissant.
L'été, c'est l'ombre de la jarre qu'emperle son frais et cette parole qui traverse encore le dédale des vacances.
Chacun lutte comme il peut contre l'angoisse de la mort et la solitude ; tracer des mots pour les écarter ne constitue pas l'un des plus mauvais moyens inventés par l'Homme. Aujourd'hui, alors que mon capital de sable a dangereusement baissé dans le haut du sablier, il m'arrive de sentir avec une acuité poignante cette incessante hémorragie de temps vivant qui s'écoule de moi ; je perds mon temps comme un sang précieux, alors que je n'en ai jamais eu autant besoin.
Il se produit chez moi un curieux phénomène : ce qui se trouve derrière moi, sur la ligne temporelle, me paraît aussi se situer dans l'avenir. Je m'en vais vers cela, je le projette dans le futur, comme s'il me fallait attendre encore pour en découvrir la véritable nature et l'aboutissement. Jadis, je n'ai fait qu'entrevoir. Le passé n'annonce pas seulement le futur, il fait corps avec lui, il est achèvement différé.
L'homme meurt de ses désirs insatisfaits.
La plus belle récompense de l'homme, c'est encore son sommeil, et le mien tarde bien à venir.
Les années : J'ai pris du flacon mais pas trop de poussière.
Une photographie est un souvenir en hibernation qui nie l'écoulement du temps.
Il faut parler pour ne rien dire puisque nous pensons le plus souvent pour ne pas penser.
Elle avait une belle gueule, des roberts comme le mont Blanc et des cuisses, fallait la voir en maillot.
Tu joues le caïd avec ta gueule de fausse couche, eh bien, ici, on t'enseignera la politesse, guignol.
J'ai reçu, dans ma vie, plusieurs leçons de savoir-vivre quand je voulais exprimer mon point de vue, mais ceux qui me les donnaient savaient encore moins vivre, ou bien vivre, que moi, ce qui me consolait.
Le souvenir est la tentative d'insubordination pour rendre actuel ce que le passé a englouti dans sa trappe.
Un jour ou l'autre, pense aux bonheurs qui sont passés, là, simplement, comme les nôtres.
Ce qu'on aime on l'aime depuis toujours.
Le rêve, c'est l'instant où tombe enfin la robe des clairières.