On veut lire dans l'avenir ; mille Nostradamus prétendent y lire ! Sauf que, c'est un livre dont les pages sont encore en blanc !
La timidité a les apparences mais pas les mérites de sa sœur la modestie.
L'homme qui nous flatte est l'homme que nous aimons, mais l'homme qui ne nous flatte pas est l'homme qui nous aime.
L'athéisme est plutôt l'expression d'un désir que l'exposé d'une doctrine ; des coupables souhaitent tout naturellement qu'il n'y ait point de juge.
On n'est pas sûr que nos professeurs matérialistes aient eu des singes pour ancêtres, mais on est certain qu'ils en ont pour disciples.
L'avarice ne se croit jamais assez riche, et elle l'est toujours trop.
On peut être cupide sans être avare, et on n'est pas avare sans être cupide.
On se dégoûte d'autrui et on ne se désabuse pas de soi-même.
L'opinion que nous avons de nous-mêmes est presque toujours l'inverse de celle qu'en ont les autres, et ce n'est pas que nous nous connaissions mieux.
Si étroit que soit un logis, l'espérance y trouve toujours assez d'espace, pour y déployer l'envergure de ses larges ailes.
L'éloquence n'est pas plus la sagesse que le vent n'est la boussole.
En veillant à leur honneur, les femmes veillent à leur repos ; tandis que les hommes n'acquièrent le premier qu'en sacrifiant le second.
La beauté est un bien que toute femme apprécie ou déprécie outre mesure, selon qu'elle l'aperçoit dans son miroir ou sur les traits de sa voisine.
On rencontre chez les femmes de singuliers amalgames de bonté et du sentiment contraire ; il en est qui rendent volontiers service au prochain, pourvu qu'on leur permette d'en dire du mal.
La femme d'un avare et la maîtresse d'un prodigue n'aiment ni le premier ni le second ; mais toutes deux aiment l'or.
Tous les hommes ne sont qu'une édition plus ou moins mal reliée, plus ou moins fautive, du même sot livre.
Tous les hommes sont des architectes plus aptes à tracer des plans magnifiques qu'à construire une simple cabane.
On parle d'hommes faits, mais l'homme est toujours à refaire.
Les égarements et les torts de la jeunesse ont leur excuse, ou du moins leur explication ; il en est tout autrement des fautes et des vices de la vieillesse, qui se dit prudente et sage, et serait mal venue à vouloir se faire absoudre, en plaidant la folie.
La jeunesse ne se méfie pas assez d'elle-même, et la vieillesse se méfie trop d'autrui.
Le déjeuner trop copieux de la jeunesse prive la vieillesse d'un souper nécessaire.
La poésie farde la pensée et croit l'embellir.
Par le système des concessions on croit remplir l'estomac des démocrates, on ne fait que leur élargir le gosier.
Il se commet plus d'indiscrétions par vanité que par confiance.
La popularité est une banque dont le crédit n'est pas moins prodigieux que les faillites.
La publication d'un recueil de pensées diverses multiplie le nombre des penseurs comme l'ouverture d'un chemin de fer multiplie le nombre des voyageurs.
Des orateurs sont la voix d'un parti.
L'homme qui, dans le choix d'une compagne, cherche à rencontrer plus de fortune que de naissance, plus de naissance que de beauté, plus de beauté que d'esprit, plus d'esprit que de cœur, s'en repentira toute sa vie, et ne méritera d'être plaint par personne.
Les honnêtes gens ont des amis ; les autres n'ont que des complices.
On peint l'amour aveugle, j'aimerais mieux qu'on le représentât muet.
La plupart des hommes sont ardents à saisir des deux mains ce que la fortune ne leur présente que de la main gauche et qui devrait être refusé !
Les ouragans qui troublent tout à coup la sérénité du ciel des Antilles sont si subits et si redoutables qu'on ne peut leur comparer que les colères de l'homme calme, les témérités de l'homme timide, et les débordements de l'homme austère.
Prenez un singe pour aïeul, et vous n'hériterez guère que de sa laideur.
La sottise n'aime pas moins les grandes phrases que la laideur n'aime les grandes toilettes, elles lui vont tout aussi mal.
La lutte entre les anciennes et les nouvelles couches sociales n'est autre que la vieille querelle entre l'orgueil et l'envie ; dans cette éternelle bataille, le bouclier, dont se couvre l'orgueil, est moins impénétrable que le glaive aiguisé par l'envie n'est tranchant et acéré.
Les Français se sont persuadés que Dieu avait besoin de la France, c'est bien ! Ils ne feraient cependant pas mal de se mettre en tête que la France a besoin de Dieu !
Une fois que des poètes ou des tribuns ont rêvé qu'ils étaient des dieux, c'est en vain que de rudes chocs et des chutes honteuses viennent les éveiller, ils n'en continuent pas moins leurs rêves.
L'orgueil est une impiété, et l'impiété est de l'orgueil.
L'orgueil produit sur les vertus auxquelles on le mêle un effet analogue à l'effet du vinaigre sur les crèmes dans lesquelles on le laisse tomber.
L'orgueil est un bloc de pierre qui ne rehausse que les hommes qui le foulent aux pieds.
Les pédants sont des apiculteurs qui, en exploitant des ruches, n'en recueillent que la cire et non le miel.
Les pédants sont les jansénistes de la littérature et la dépouillent de son charme, comme les sectaires dépouillent la religion de sa douceur.
La discussion entre les gens qui savent vivre arrondit les angles de l'esprit en même temps qu'elle en aiguise la pointe, et lui donne à la fois le poli et le tranchant.
Quel contre-sens chez l'homme ! Il veut boire au plus vite quelques gouttes de nectar, et ne veut boire la ciguë que par petites gorgées. Cherche-t-il donc à la savourer ?
Soit qu'il s'agisse de pénétrer les secrets des cœurs ou d'étudier les intrigues de la politique, on en apprend plus en regardant par le trou de la serrure qu'en ouvrant les deux battants de la porte.
La parure semble aussi naturelle et aussi nécessaire à la femme que l'harmonie à la poésie.
Les femmes règnent au salon et gouvernent au foyer ; elles possèdent ainsi la couronne de fleurs et le sceptre des réalités.
Prenez tous les habitants d'une maison pour y faire la cuisine, et vous mangerez d'abominables ragoûts ; prenez tous les habitants d'un pays pour y faire des lois, et vous aurez des lois qui ne vaudront guère mieux que la cuisine faite par tout le monde.
Les appétits cherchent à se déguiser en passions et les passions en vertus ; mais quel que soit leur masque, le diable n'y perd rien.
On ordonne au cœur d'être rigoureusement droit et honnête, mais on permet un peu de friponnerie à l'esprit, et il s'en accorde beaucoup.
Il est, dit-on, sage et naturel de devenir avare en vieillissant ; les jouissances monétaires nous restent quand les autres sont évanouies ; le gain des écus qui s'entassent console de la perte des années qui s'enfuient ; ne vaudrait-il pas mieux devenir plus généreux à mesure qu'on a moins de temps à l'être ?
Nous attendons l'heure de la mort pour appeler à nous les sentiments de foi et de résignation qui nous auraient guidés et soutenus pendant la vie ; c'est demander des armes après la bataille et chausser des bottes quand le voyage est terminé.
Les meilleures maximes sont celles dont l'expression nous appartient, mais dont le fond est à tout le monde.
L'homme dont on ne peut vanter que l'érudition est un navire qui n'a que du lest dans sa cale.
La France est une maison dans laquelle les girouettes peuvent se croire immobiles, parce que l'édifice entier tourne au gré du vent.
Quand le bonheur prend le nom et porte le costume du devoir, on s'empresse de lui tourner le dos.
Un traducteur fier de ses traductions est un front chauve orgueilleux de sa perruque.
Quelle erreur est la nôtre lorsque nous confondons la fierté avec la vanité ! la première nous grandit, la seconde nous rapetisse.
Dieu pardonne à ceux qui ne se pardonnent pas. Souvenons-nous de nos fautes, afin que Dieu les oublie, et oublions nos bonnes actions, afin que Dieu s'en souvienne.
Les hommes se fâchent, mais les femmes se vengent.
Devant les hommes, mille châtiments peuvent à peine expier une faute, et devant Dieu une seule larme les efface toutes.
On se moque du patriotisme de clocher et on travaille à l'anéantir ; mais est-ce que sur la carte de l'univers, chaque pays n'est pas une plus ou moins petite paroisse ?
Dans les emprunts d'argent, les dettes se paient le plus tard possible ; dans les emprunts d'esprit, les dettes ne s'avouent même pas, et la nécessité d'emprunter est une preuve de l'impossibilité de rendre.
Renoncer à l'estime pour acquérir la célébrité, c'est quitter des bottes imperméables pour se chausser de brodequins vernis, mais dépourvus de semelles.
Un journal ressemble aux artichauts de Provence, beaucoup de feuilles, mais peu ou point de fond.
Quand le cœur veille, l'esprit sommeille ; c'est à charge de revanche.
Beaucoup de gens veulent l'ordre, mais ne veulent pas encore le principe qui peut seul le donner et l'assurer ; ils ressemblent à des hommes qui dans un chemin hérissé d'obstacles et semé de dangers, prétendent surmonter les uns et éviter les autres, tout en s'obstinant à garder un épais bandeau sur les yeux.
La politique sans principes trouve au moins autant de débit que le vin fait sans raisin, mais elle n'est pas plus saine ni de meilleure garde.
Prenez des grimaces de singe, des caresses de chat, des larmes de crocodile, des rires d'oiseau-moqueur, des hurlements de loup, des souplesses de reptile, des appétits de harpie, et vous aurez les principaux éléments du régime parlementaire.
On croit qu'il faut hurler avec les loups, et on devrait croire qu'il faut aboyer contre eux.
Les journaux sont les portraits des peuples et des partis, portraits que les modèles n'achètent que s'ils s'y voient plus embellis que ressemblants.
On s'applique à cacher son cœur sous un voile impénétrable, et on aime à faire parade de son esprit ; c'est enfouir de l'or et étaler du cuivre.
La fraude et la violence aiment à se retrancher dans l'arsenal de la légalité, comme Cartouche et Mandrin aimaient à revêtir l'uniforme de la maréchaussée.
L'homme d'esprit qui meurt avant d'avoir rien publié est un galion qui sombre avant d'avoir débarqué les richesses de sa cargaison.
Chez la vieillesse l'imprévoyance est le résultat d'un manque de mémoire.
Les études et les travaux d'un vieillard sont des ciselures sur un édifice qui s'écroule.
Avoir de l'instruction et ne pas avoir d'esprit, c'est posséder plusieurs paires de bottes et n'avoir pas de jambes.
De petites fautes anéantissent de grandes vertus comme de petites saignées épuisent un grand lac.
L'aveu d'une faute est la plus noble de toutes les parures de l'âme.
L'homme d'esprit fait les semailles, le savant fait la récolte, et le public fait le pillage des grains.
Les hommes qui désirent faire la moisson sont nombreux, mais il en est peu qui se bornent à ne vouloir récolter que ce qu'ils ont semé.
Les gazons livrent leurs fleurs et leurs parfums aux passants et aux oisifs, les sillons ne livrent leurs épis qu'aux travailleurs qui sèment et moissonnent ; les premiers sont l'image des poètes et les seconds l'image des savants.
La mémoire récolte, mais c'est l'imagination qui sème.
Dans aucune pépinière, on ne plante de poiriers ou de cormiers, si l'on veut un jour y récolter des oranges, mais dans le champ de la politique on renouvelle chaque jour des essais de ce genre.
La vieillesse découvre chez la jeunesse tous les défauts et tous les torts d'une maîtresse qui nous a abandonnés.
La confiance et la générosité chez un vieillard ne charment et n'étonnent pas moins que des violettes et des roses au milieu des neiges.
La vieillesse est un port, où on regrette les tempêtes.
A mesure qu'elle prend des années, la jeunesse perd quelquefois ses défauts et toujours ses qualités.
La jeunesse est au nombre des défauts dont on ne se corrige que forcément et à regret.
La vie peut se comparer à un repas composé de plusieurs services, dans lequel, au rebours de l'ordre habituel, nous commençons par le dessert : la jeunesse est le moment des crèmes, des sucreries et des breuvages enivrants.
La jeunesse qu'on ne prémunit pas contre les passions de son âge, c'est la tige fleurie qu'on laisse exposée aux orages du printemps, et qui ne portera pas de fruits, quand viendront les calmes et fécondes journées de l'automne.
Il en est des projets de la jeunesse comme des vitraux de nos cathédrales ; quelque téméraire qu'en soit la composition, quelque incorrect qu'en soit le dessin, ils rayonnent d'une splendeur éblouissante.
L'enfant est le portrait de l'homme, mais portrait que l'art n'a pas encore verni, et que le temps n'a pas encore enfumé.
Un vaisseau avec le vent en poupe, des mâts pavoisés, et une artillerie puissante, un équipage vigoureux, jeune et actif, mais oublieux de tenir le gouvernail et de consulter la boussole, est l'image de la jeunesse ; elle vogue sans calculer les longitudes ni jeter la sonde, se laisse entraîner à la dérive, et ne cargue pas ses voiles à l'approche des écueils.
La jeunesse est le prospectus et la préface de la vie ; comme une préface et un prospectus, elle n'est pas avare de promesses et d'engagements, qui valent hélas ! tout ce que peuvent valoir les promesses et les engagements des prospectus.
Nous avons nommé le chemin de la vie ce qui est le chemin de la mort, puisqu'il s'agit de l'espace à parcourir du berceau à la tombe.
Lisons le même livre à des âges différents, nous n'y lirons pas la même chose, entre toi et moi !
Dans la vie, autant il est doux de se faire bercer, autant il serait dangereux de se laisser endormir.
Dans la vie publique, comme dans la vie privée, il est certain que les déceptions affligent, mais est-il vrai qu'elles corrigent ?
L'âge qu'on a réellement devrait se mesurer sur le nombre des choses que l'on a vues ou faites, plutôt que sur le nombre des jours que l'on a vécu.
Sur la route la variété des paysages est un trompe-l'oeil qui semble l'abréger, et dans la vie, au contraire, la multiplicité des événements paraît l'allonger.
La veille et le sommeil se partagent l'existence en portions inégales ; le sommeil a la part la plus courte, mais la moins mauvaise ; et si l'on avait la faculté de choisir les rêves, on voudrait qu'il remplît toute la vie.
Nous fêtons l'anniversaire de notre naissance, comme si nous ignorions les trois inévitables conséquences de ce jour : Souffrir, vieillir et mourir.
Les difficultés de la vie trouvent leur emblème dans les serrures, dont avec de la patience et de l'adresse on fait jouer les ressorts, mais où les hommes qui veulent les forcer brisent leurs clefs et s'estropient les doigts.
On compare sans cesse la vie à un banquet et rien n'y ressemble moins, puisqu'au lieu de finir par les sucreries et les breuvages enivrants, elle finit le plus souvent par l'amertume et les dégoûts.
Le génie est le levier qui peut soulever le monde, mais il a besoin d'un point d'appui qui ne se trouve que dans la foi ; si ce point d'appui fait défaut, tous les calculs, tous les efforts, la tête et le bras d'Archimède restent inutiles.
Tant que le sentiment religieux n'est que vague et indéfini, il n'est pas plus une croyance que des couleurs ne sont un tableau ; mais c'est de ce sentiment que la croyance se compose et se détermine, comme un tableau se dessine et s'achève à l'aide des couleurs. Si ce travail qui précise et fixe les teintes ne se fait pas, l'homme avec des sentiments religieux, sans croyance positive, est un peintre avec une riche palette, mais sans toile et sans pinceaux.
Un pays, qui a un bon peuple, n'est-il pas plus fort qu'un pays qui n'a que de bonnes individualités ?
Autrefois noblesse obligeait, aujourd'hui richesse dispense.
L'homme est, vis-à-vis de Dieu, un débiteur qui intervertit les rôles et montre les exigences d'un créancier.
L'avare est toujours trop riche et l’homme généreux ne l'est jamais assez ; mais l'un et l'autre pensent précisément le contraire.
La philanthropie donne peu, mais donne à grand bruit ; la charité s'applique à faire précisément le contraire.
On croit être un esprit profond parce qu'on est un esprit creux, et on devrait croire qu'une caverne peut être vaste et sombre, sans contenir ni rubis ni saphirs.
Le coeur humain est un de ces tristes livres qui font regretter d'avoir appris à lire.
Le coeur humain peut se comparer à une mappemonde, où d'un côté il n'y a pas de riches contrées sans espaces stériles, et de l'autre pas de déserts sans oasis.
La plupart des poètes ressemblent aux ouvriers des Gobelins, et ne voient guère que l'envers des tapisseries qu'ils offrent aux regards charmés du public.
On veut bien avouer qu'envisagé en masse le genre humain est une pauvre et triste engeance, mais chacun se croit personnellement une exception : l'homme consent ainsi à se dépouiller d'orgueil pour son espèce, mais il en retient une large dose pour son individualité.
L'esprit humain est si mobile et si peu sûr, que chez lui les vérités d'hier sont douteuses aujourd'hui, et seront des fables demain.
La vie est un cadran, où les heures vont plus vite dans l'après-midi que dans la matinée.
La vie est un espèce d'omnibus, dans lequel on entre sans savoir, ni quels seront les compagnons de voyage, ni quel itinéraire on suivra, et dont on ne connaît d'avance que le terme inévitable, dont toutefois on ignore l'heure.
La vie est un livre qui n'a qu'une édition, dont l'errata signale les fautes, sans pouvoir les effacer, et s'il en avait une seconde, elle ne serait probablement pas moins incorrecte que la première.
La vie humaine est un livre, dont la première et la dernière page sont toujours identiquement les mêmes, quel que soit le format de ce livre, et le langage dans lequel il ait été écrit.
Les coutumes qui ont force de loi prouvent la bienveillance naturelle au peuple.
Le législateur humain ne peut prescrire que des châtiments. A Dieu seul appartient d'obtenir des expiations.
La vie humaine est un volume à la fin duquel on arrive rapidement, sans avoir pu mettre le signet nulle part ; et ce livre si court est cependant encore trop long, puisque le seul chapitre fait pour plaire (la jeunesse) est la préface, qui, mensongère et trompeuse, comme toutes les préfaces est suivie de pages insipides et désolantes.
La prière est semblable à la flèche gothique qui paraît se perdre dans les nuages, quand elle s'élève au-dessus d'eux.
Les seules fleurs qui ne se fanent pas sont les fleurs que l'âme pieuse va cueillir dans le ciel.
Dieu n'a pas besoin de nous et nous avons besoin de lui ; ce n'est donc pas seulement à la gloire de Dieu, mais surtout à la vertu de l'homme, que la prière est utile ; quand on prie, en effet, Dieu n'en devient pas plus grand, mais l'homme en devient meilleur.
Prier pour ses bienfaiteurs, ce n'est que payer une dette ; prier pour ses ennemis, c'est une générosité. La souffrance enseigne à prier, et la leçon qu'elle donne à cet égard est plus écoutée et mieux retenue que les instructions de la prière pour apprendre à souffrir.
Les hommes qui nient la douceur et l'efficacité de la prière ne sont pas seulement des impies, mais des cœurs secs, qui n'ont jamais rien aimé, rien désiré, rien regretté.
Le catholicisme ne se borne pas à offrir une autorité immuable ; pareille au phare qui signale les écueils, sa doctrine sur la rémission des fautes vient encore recueillir ceux qui ont fait naufrage et les aide à se remettre à flot.
En attendant le pardon de Dieu l'homme commence par s'accorder le sien, c'est un excellent moyen de ne pas mériter l'autre.
La facilité d'obtenir le pardon de Dieu n'a d'égale pour l'homme que la difficulté de le demander.
En tout pays, les ministres sont les plus aimables et les plus obligeants personnages du monde, pendant deux jours : la veille de leur nomination et le lendemain de leur renvoi.
La souffrance est un bourreau que la piété transforme en guérisseur.
Il y a dans la vie du chrétien une consolation à chaque douleur, un baume à chaque blessure, une palme à chaque combat ; mais les jours de l'impie ne peuvent être qu'une longue orgie, ou un long accès de désespoir, et il ne saurait échapper aux tortures du cœur de l'homme, qu'à la condition d'en renier les devoirs et d'en abdiquer la dignité.
La faiblesse de l'homme a besoin de croire et son orgueil a besoin de douter : sa raison prononcera qu'il y a plus de sagesse et de vérité dans sa faiblesse que dans son orgueil.
La piété, qui nous enseigne à quitter ce monde sans regret, est la seule science qui nous enseigne à nous y trouver heureux.
Sur le chemin du paradis on marche plus vite et plus sûrement pieds nus qu'avec des bottes fourrées.
La religion est, entre Dieu et l'humanité, ce que le langage est entre l'homme et l'homme.
La foi donnée d'en haut est aux vertus humaines ce que la rosée du ciel est aux moissons de la terre. La foi dépasse la portée de la raison, mais la raison sent et reconnaît le besoin de la foi ; celle-ci ne lui est donc pas contraire.
Les observations que l'expérience change en maximes sont le carbone que la nature transforme en diamant.
Les hommes qui écrivent des pensées diverses taillent des pierres pour bâtir, mais ils ne bâtissent pas.
Nos habitudes ne sont d'abord que l'effet de nos volontés et elles en deviennent ensuite la cause. Ce sont des gouvernantes qui, entrées chez nous pour nous servir, ne tardent pas à nous commander.
Quelle est la valeur et l'utilité des principes, répètent en souriant les adorateurs du fait accompli ? N'arrive-t-il pas sans cesse aux principes d'être vaincus et proscrits, et cependant le monde va toujours ? Oui, mais il va mal.
Entre le chef de l'État qui suit ses inspirations, et le Premier ministre qui suit les avis de ses conseillers officiels et officieux, il y a la même différence qu'entre la source dont les eaux jaillissent spontanément et la citerne qui recueille les eaux de pluie ; n'est-il pas naturel de préférer le rôle de la source au rôle de la citerne ?
Par quelle aberration de langage et d'idées parle-t-on de principes nouvellement éclos, comme d'œufs fraîchement pondus ? Les principes ne sont ni vieux ni jeunes ; ils sont bons ou mauvais, vrais ou faux, mais ils sont de toute éternité. Le bien et le mal sont nés avec l'homme.
On se plaint de ce que le ciel est aveugle dans la distribution des richesses, et on devrait surtout se plaindre de ce qu'il est avare du sentiment qui rend capable de les mépriser.