Désirer l'infini, c'est ignorer les bornes du fini.
Une douce tristesse, dont les accès reviennent par intervalles, a, comme l'aspect de la lune, quelque chose de rafraîchissant. On devrait essayer de changer l'humeur sombre et chagrine en humeur triste. Des larmes versées de temps à autre seraient même un baume salutaire pour les blessures du cœur.
La vie n'est un rêve que par la faute de l'homme, dont l'âme n'écoute pas le signal du réveil.
Tout le secret de l'art de prolonger la vie, c'est de ne pas l'abréger.
Y a-t-il un art de prolonger la vie ? — A ceux qui le connaissent, enseignez plutôt l'art de la supporter.
La volonté peut tout, oui, mais seulement la bonne volonté, et la volonté de l'amour.
Il n'est pas de plus doux sourire que celui qui éclaire un visage mouillé de larmes.
Gémir d'être méconnu, c'est méconnaître le but de l'existence.
La vie n'est pas un don gratuit de la Providence, c'est avant tout une tâche, une mission à remplir ; si elle confère des droits, elle impose des devoirs.
Tout bien considéré, il n'existe que deux tempéraments, dont tous les autres ne sont que des modifications à l'infini ; c'est le tempérament actif et le tempérament passif. Un tempérament actif exige une activité intellectuelle, un tempérament passif, une activité pratique.
La sensibilité comprend l'imagination et le sentiment ; sachons tourner l'imagination vers ce qui est beau et agréable ; alimentons le sentiment au moyen de ce qui est grand et serein ; cultivons l'une et l'autre en cultivant l'art.
Les êtres inférieurs à l'homme ne pensent pas ce qu'ils sentent ; les intelligences pures pensent et ne sentent pas. Dans l'homme seul, il existe entre le corps et l'âme un rapport qui s'exprime par le sentiment intellectuel.
Développée dans l'homme fort, la puissance de volonté devient le caractère. Cette puissance est, pour ainsi dire, le tout de l'homme, c'est au fond la personne même ; c'est elle qui met en mouvement l'imagination, l'intelligence ; c'est sur elle que doivent agir la morale, la loi, l'instruction, la médecine et surtout l'hygiène de l'âme, pour réaliser la domination de l'esprit sur la matière.
La réflexion est, en elle-même, une occupation véritablement humaine, bienfaisante et salutaire, qui répond à notre double destinée.
La peur abrège les jours de l'homme ; elle est un élément de l'hypochondrie ; aussi l'hypochondriaque meurt-il de la peur de mourir.
Les souffrances de l'âme ne sont souvent qu'une pénitence subie, c'est-à-dire les suites inévitables d'un état intérieur contraire à la nature.
Le penchant sert de matière à la volonté : s'il est dominé par elle, il se change en caractère ; s'il la domine, il se change en passion.
Patience, sœur de l'espoir, seule, tu es forte dans le faible ; seule, tu es la révélation la plus parfaite, la plus délicate de l'âme humaine.
La patience est l'appui de la faiblesse ; l'impatience est la ruine de la force.
Le vice fondamental de l'homme, c'est la paresse, c'est une renonciation à soi-même, une maladie, une mort volontaire. Le réveil de l'énergie individuelle est la condition de la santé et de la vie.
Si, dès l'enfance, nous étions habitués à voir tout en ordre autour de nous, bien certainement, par une disposition harmonieuse de l'âme, cet ordre extérieur se réfléchirait au-dedans de nous-mêmes dans une chambre bien tenue, l'âme éprouve une sorte de bien-être.
La nature agit sur tous nos organes ; elle remplit l'imagination de nobles et fraîches images ; les trésors de beauté qu'elle sème d'une main prodigue forment un spectacle magnifique dont la vue chasse de notre front les rides des soucis et de l'humeur noire, et dont la grandeur nous transporte jusque dans les régions divines où la loi suprême se manifeste avec une souveraine autorité à notre intelligence et à notre amour. Voilà les bienfaits de la nature ! Avons-nous eu tort de l'invoquer comme le meilleur et le puissant médecin de l'âme ?
La nature, par ses lois immuables, enseigne la justice ; elle est bienfaisante même quand elle anéantit. C'est en elle seule qu'on trouve la vérité, le repos, la santé.
Fait admirable et d'une mystérieuse profondeur ! la beauté et la grandeur de la nature ne sauraient se déployer à nos regards sans qu'aussitôt notre esprit s'élargisse et s'élève.
L'imagination ou la foi peut opérer des miracles, mais la raison n'a pas la même puissance.
Il n'est rien de moral que la vérité, rien d'immoral que le mensonge ; l'une purifie, l'autre corrompt.
La mauvaise humeur est comme un levain qui empêche l'esprit de moisir : un mouvement de dépit, produit par une cause accidentelle, suffit souvent pour chasser une humeur mélancolique, longtemps rebelle à tout remède.
L'intelligence conduit l'homme dans les bras de la religion ; elle met dans son cœur une résignation parfaite à la loi suprême ; de ce sentiment naît une sérénité calme, qui à son tour produit la santé.
L'empire sur soi-même est le but de la volonté ; la connaissance de soi-même est le but de l'intelligence.
Puisque l'imagination n'est que le côté rêveur de la faculté de sentir, puisqu'elle est féminine de sa nature, elle ne doit jamais, si elle veut être utile, oublier son caractère essentiellement passif. C'est le feu de Vesta, dont la douce flamme, entretenue avec un soin jaloux, porte la lumière et la vie, mais qui, une fois déchaînée, dévore tout sur son passage.
L'imagination a son domaine en dehors du monde réel ; de l'exercice régulier ou irrégulier de cette faculté capricieuse, dépendent le bonheur et le malheur de la vie humaine.
L'imagination est la mère nourricière, l'agent, la force motrice de tous les membres isolés de l'organisme intellectuel ; elle est comme un pont jeté entre le monde de la matière et le monde de l'intelligence.
Le préservatif le plus certain contre la mauvaise humeur, c'est la religion.
Personne ne peut se défendre de la tristesse, mais tout le monde peut se débarrasser de la mauvaise humeur.
S'habituer à ce qui est juste, c'est la quintessence de la morale et aussi de l'hygiène de l'âme.
Chaque homme porte en lui un germe de folie ; la sérénité et l'activité d'esprit sont les seules forces capables d'en empêcher le développement.
La véritable culture de l'esprit, c'est le développement harmonieux de nos forces ; elle seule nous rend heureux, bons et bien portants.
De toutes nos affections, l'espérance est celle qui anime le plus, et, conséquemment, la plus importante pour l'hygiène de l'âme. Ce pressentiment céleste est comme une partie délicate de notre moi, un moi charmant qui ne veut jamais se laisser anéantir.
L'égoïste est plus que tout autre sensible aux atteintes du mal, parce qu'il reste emprisonné dans le plus étroit horizon ; il est puni par son égoïsme même.
Écrire, sans songer même à publier ce qu'on écrit, est un excellent moyen hygiénique pour fortifier l'âme. Dans un siècle comme le nôtre, ce remède est, pour ainsi dire, à la portée de tout le monde. Pour vous délivrer de l'idée ou du sentiment qui vous obsède, il vous suffira le plus souvent de consigner par écrit vos impressions et de les retracer avec clarté. Ce travail dissipe les spasmes de l'âme et en prévient le retour.
La douleur n'est pas seulement l'assaisonnement du plaisir, elle en est la condition nécessaire : Dieu a voulu que la souffrance formât le caractère, et que le plaisir aiguisât l'esprit.
Pour l'homme digne de ce nom, la consolation n'est pas salutaire, elle l'affaiblit ; le devoir seul est sa véritable consolation.
Le devoir, comme la lance d'Achille, guérit les blessures qu'il a faites.
Le but suprême de la vie n'est pas la satisfaction de nos désirs, c'est l'accomplissement du devoir, sans lequel il n'est point de satisfaction véritable.
Tout désir énergique se réalise. C'est là une parole hardie, mais elle renferme une merveilleuse consolation.
Les défauts des premières années exercent jusque dans l'âge le plus avancé leur action physique ou morale ; il en est de même des bonnes qualités acquises de bonne heure.
Des roses autour d'une croix, voilà le symbole de la vie humaine.
Une conviction forte et raisonnée devient, dans l'individu qui la possède, comme une partie intégrante de sa personne : c'est pour l'homme fatigué un appui ; pour celui qui souffre un adoucissement à ses maux ; pour celui qui est encore bien portant un palladium.
Une colère violente n'est pas active, ainsi que l'on serait tenté de le croire celui qu'elle obsède comme un démon souffre dans la meilleure partie de son être. A son degré le plus élevé, la colère devient passive, même dans sa manifestation.
La colère est un emportement grossier qui nous abaisse au niveau de la cause qui l'a excitée ; si nous nous mettons en colère, notre adversaire atteint son but ; nous sommes en son pouvoir.
Aux caractères précipités, imposez la nécessité de marcher lentement, d'écrire lentement ; aux caractères indécis, celle d'agir avec promptitude. Donnez aux rêveurs, toujours absorbés dans leurs pensées, l'habitude de regarder en face et de parler distinctement et à haute voix. Ces habitudes ont sur l'âme et sur le corps une incroyable influence que j'ai souvent observée.
Le calme est le fils de l'esprit ; aucune étude ne le produit plus sûrement que celle de la nature.
Le calme est le premier et indispensable remède de tous les maux ; dans la plupart des cas il suffit pour la guérison ; il est toujours utile et salutaire. Comme préservatif, il a une vertu inappréciable.
Ce qu'il importe de conserver toujours, c'est moins la lumière de l'intelligence que le calme et la sérénité.
Il faut de la force et une moralité profonde pour conserver le calme bienfaisant, qui, même au milieu des bouleversements et des tempêtes, donne un point d'appui à la méditation, principe et condition du vrai bonheur.
On a trop souvent confondu le calme céleste et l'indifférence animale : il faut distinguer la larve et le papillon.
La vie nous pose partout des problèmes et révèle des principes à l'esprit attentif qui sait interpréter le sens des symboles. Les bons livres et les hommes d'expérience rendent le même service. Cherchons partout ce qui peut nous donner le calme et la force. Ce que nous nous approprions de cette manière, conformément à notre nature, nous appartient au même titre que ce qui nous semble produit par nos réflexions personnelles.
Considérer les souffrances comme des épreuves, c'est et ce sera éternellement la théorie la plus belle et la plus féconde. Elle moralise et fortifie.
Le beau a droit à notre recherche et à notre amour, c'est l'aliment du bien et de la santé.
Pour que l'activité soit véritablement salutaire, il est trois conditions indispensables : il faut, premièrement, qu'elle garde une juste mesure, qu'elle évite tout excès ; deuxièmement, qu'elle s'applique avec amour, dans le moment opportun, à des objets qui lui conviennent ; et troisièmement, qu'elle prenne des intervalles de repos, et qu'elle varie ses occupations. Telle est la nature de notre esprit, que le repos la délasse moins que la variété.
Si l'on parvient à concentrer son attention sur un point donné, soit par la conversation ou la lecture, soit par le souvenir ou le sentiment du devoir, cette diversion adoucit la tristesse et lui enlève bientôt son amertume. Le succès est plus assuré quand c'est involontairement et à son insu que l'âme souffrante est détournée de ses funestes préoccupations.
L'homme frugal sait proportionner sa nourriture à la somme des forces qu'il dépense.