Il est doux de réaliser son ambition, mais il est plus agréable encore, quelquefois, de la secouer.
Pas plus en vers qu'en amitié, rien d'excellent ne s'improvise.
En dépit de tous les sarcasmes contre la poésie, il y a ceci : la plus belle prose s'oublie ou s'altère en passant par les citations ; un beau vers règne toujours triomphalement sur les cœurs.
La poésie est la musique de l'intelligence, de même que la musique est la poésie des sens.
Je mesure la valeur d'un homme à son attitude devant la critique.
Les Français ne veulent qu'être amusés et font semblant de n'estimer que les ennuyeux.
La grande réputation de certains écrivains s'explique seulement par le fait que le monde a mieux aimé leur donner sans façon la gloire que de les lire.
On nous promet comme suprême récompense d'appartenir à l'histoire. Je le veux bien, mais de quelle histoire vient-on nous parler ? Celle que nous voyons a tant et de si bizarres façons de vous arranger qu'un homme sage ne tient pas à rien avoir à démêler avec elle.
La vie se passe à dire : Plus tard ; et à s'entendre dire : Trop tard.
Lorsqu'on ne possède pas la pensée d'une femme, on n'en possède rien.
On triomphe des femmes par la parole, mais on ne les dompte que par le silence.
On est aussi fréquemment déçu à se croire aimé qu'à se croire admiré.
On ne voit guère d'homme si désabusé que la plus sotte ne puisse prendre en feignant la jalousie.
La plupart des femmes, nous aimant pour elles et non pour nous, ne font guère de différence entre un homme d'esprit et un sot.
La dernière des femmes, c'est la femme bon garçon.
Les femmes n'aiment ni les généreux, ni les égoïstes, ni les indifférents, ni qui se prodigue à elles, ni qui se garde pour soi-même ; elles aiment quand il leur plaît.
Pour l'amour, ne plus souffrir, c'est mourir.
Il faut conquérir deux fois celle qu'on aime : avant et après ; la seconde conquête est aussi la plus difficile.
Dans un premier amour, on croit à l'éternité de la passion ; dans un second, on ne croit plus qu'à sa durée.
Entre toutes les chutes qui accidentent l'existence, c'est de l'amour que nous tombons le plus haut.
L'amour est notre vice ou notre vertu.
Dans un véritable amour, tous les sens s'entraident, toutes les perceptions se confondent : regarder, c'est écouter.
Avant tout, garde la force et la puissance d'aimer.
Le véritable amour a toujours son aliment : aujourd'hui l'espérance, demain le souvenir.
Si l'amour nous rend fous quelquefois, il y a tels désastres où seul il nous empêche de le devenir.
En amour, aussi bien qu'en art, en politique et en tout le reste, ... il y a le génie et la patience.
L'éloquence de l'amour ne se dit pas, elle se murmure ; en amour, plus on parle bas, plus on s'entend.
L'amour naissant se fait de tout et avec tous des intelligences électriques.
C'est incontestablement la préoccupation du bonheur qui nous empêche le plus souvent d'être heureux.
Nos divers plans de bonheur se modifient et se succèdent, frêles toiles d'araignées où le soir un passant jette son brutal coup de poing.
Le plus cuisant regret est celui du bonheur possible que l'on a dédaigné.
Le bonheur est toujours ce que nous n'avons pas ; donc le bonheur n'existe point. Le plus parfait bonheur ne mérite pas ce nom s'il s'y mêle la crainte de le perdre, et sans cette crainte, on ne le goûte pas. Qu'est-ce donc que le bonheur ?
Le tact dans la conversation n'est point de savoir ce qu'il faut dire et ne pas dire, mais quand il faut le dire et ne le dire point.
Entre gens de même éducation, tout s'entend ; entre gens d'éducation différente, tout a besoin d'être expliqué.
Dans le monde, comme au tapis vert, il ne faut laisser voir ses cartes que lorsqu'on a la main pleine d'atouts.
L'homme qui passe pour le plus spirituel du monde est peu de chose s'il ne se trouve pas dans son milieu et dans son cadre. On est même allé jusqu'à prétendre que le plus homme d'esprit était celui qui, ayant su trouver ce milieu et ce cadre, n'en sortait plus.
Certaines gens, avec toutes sortes d'honnêtes qualités, épaississent l'air autour de vous et vous empêchent, on dirait, de respirer.
Plus on a d'esprit, et plus on est empêché parmi les imbéciles.
Il est moins pénible de s'ennuyer seul qu'en société.
Les gros rieurs sont des personnages incommodes, mal appris et bruyants. Je leur préfère les gens maussades qui, du moins, se taisent et souvent ont raison en n'étant pas gais.
Le parfait modèle de l'homme gênant, c'est celui qui a toujours peur de vous gêner et qui, le disant à chaque phrase, en double la longueur.
Certaines gens ont positivement le culte du désagréable ; cela ne suffit pas pour être honnête.
L'amitié et l'amour sont des chaînes construites de telle sorte que le départ d'un anneau entraîne tous les autres.
Tous les goûts sont discutables, mais le goût ne se discute pas.
Tout le problème humain serait résolu si l'on s'aimait.
On croit les tribuns du peuple des apôtres qui vont prêcher l'évangile sur la montagne, on devrait les croire des botanistes qui cherchent des simples.
La politique, cet assommoir de l'esprit, menace d'éteindre toute la verve amusante de l'esprit en France.
L'homme gagne toujours à cacher sa jalousie : s'il est aimé, à quoi sert-il qu'il parle ? Si on ne l'aime plus, on ne l'entend pas.
Il y a des gens qui paraissent toujours prêts à vous refuser ce que vous ne songez pas à leur demander.
Si j'étais jaloux, je ferais résolument l'éloge de mon rival, la femme est si contredisante.