L'âge nous donne l'expérience et des sentiments meilleurs, que je préfère aux folles illusions de la jeunesse. Quant à moi, lors même que j'en aurais le pouvoir, j'aimerais mieux continuer de marcher vers la fin que de revenir en arrière.
L'idolâtrie est le résultat de la sauvagerie, de l'ignorance la plus grossière ; mais au fond c'est un hommage rendu à Dieu.
Rien n'est plus pernicieux que l'oisiveté. Il vaudrait mieux en quelque sorte mal faire que de ne rien faire du tout.
En demandant pardon à Dieu de nos fautes nous devrions toujours le remercier en même temps de toutes celles que nous n'avons pas commises.
Il faut toujours faire tous ses efforts pour agir le mieux possible. Même quand on a bronché, même quand on est tombé, il ne faut pas croire que tout est perdu. Avec l'aide de Dieu on peut toujours se relever.
On s'accoutume à tout, même à être malade ; on finit par oublier que l'on souffre, et l'on n'y songe guère que lorsque l'on cause avec des gens qui se portent bien. Heureux ceux qui font durer pendant quarante ans ce crépuscule qui sépare la dernière jeunesse de la première vieillesse ! car c'est l'âge d'argent.
À la campagne les jours passent comme des songes, il suffit de vivre pour être heureux.
Les bavards préfèrent les malheurs à la joie, parce qu'il y a plus à dire sur la peine que sur le bonheur.
Il faut juger les gens sur leurs œuvres et attendre pour les blâmer.
Le vrai christianisme consiste à faire à tous les êtres animés, bêtes et gens, le plus de bien possible, et à attendre la mort sans crainte comme sans impatience.
Les feuilles tombent ; tout jaunit ; tout passe ; l'automne marche rapidement vers l'hiver. Les dernières fleurs, celles qu'on aime le plus, commencent à sentir l'impression du froid. La campagne devient silencieuse.
La seule pensée qui puisse nous consoler de la perte d’un être cher, c'est qu'un jour nous irons les rejoindre, demain peut-être, peut-être même dès aujourd'hui.
On découvre dans le caractère des fleurs une foule de nuances. Il y en a qui se retournent sur elles-mêmes comme pour réfléchir ; il y en a qui pleurent, d'autres qui semblent rire ; presque toutes dorment la nuit. Les plantes qui tapissent les puits, ces plantes si minces et si déliées, si vertes et si froides, ont tout autant de passions que les plus belles roses qui s'épanouissent aux rayons brûlants du soleil ; car il y a des fleurs passionnées comme aussi il y en a de modestes et de hardies.
Le plus beau discours du plus brillant orateur est bien vite oublié lorsqu'il n'est pas immédiatement tourné en ridicule.
La maternité, qui apprivoise certaines bêtes, en rend d'autres féroces. Les poules deviennent enragées et les moineaux demandent l'aumône.
Je me complais dans l'indolence, et je me nourris de paresse.
J'avais tant de choses à faire que j'ai fini par ne rien faire du tout.
Le malheureux qui rêve toutes les nuits qu'il est riche est aussi heureux que le riche qui rêve toutes les nuits qu'il est misérable.
La gloire est un cercle dans l'eau qui se perd en s'élargissant.
Le néant est-il donc plus facile à comprendre que l'existence, pour qu'on ne veuille pas croire à une autre vie ?
Je charme ma solitude en m'occupant de mes oiseaux avec passion. Ai-je été oiseau jadis ? Le serai-je dans une autre vie ? Pourquoi pas, puisque j'ai la conviction que les oiseaux ont des âmes comme nous ! Il existe entre eux et moi une attraction, une sympathie qui a quelque chose de merveilleux. Ils me répondent quand je les appelle, ils me suivent dans le jardin. Je devine tout ce qu'ils pensent ; je les console dans leurs chagrins et je les guéris dans leurs maladies. Tout cela peut paraître ridicule ; mais j‘avoue que la vue d'un plumeau me fait de la peine, et que je raffole de la fable de Léda.
Il n'y a guère de secrets divulgués que ceux que l'on divulgue soi-même.
Le monde m'engourdit et le mouvement me paralyse, au contraire de bien des femmes auxquelles la vie agitée donne des idées, ou du moins des paroles.
Si nous sommes sans esprit, pauvres, ignorants ou malheureux, il faut s'en consoler. La mort nous guérira de tous ces maux, et il viendra un temps où nous saurons toutes choses et où nous serons heureux et parfaits pour toute l'éternité.
La fidélité dans l'amour n'est pas un mérite, c'est une nécessité.
La conscience est l'unique miroir qui ne trompe ni ne flatte jamais. Je défie tous les flatteurs du monde de faire croire à un tyran qu'il est aimé, à un poltron qu'il est brave, à un sot qu'il est habile, à un ignorant qu'il sait, à une vieille qu'elle est jeune. Ils chercheront à faire illusion aux autres et peut-être à eux-mêmes ; mais au fond ils sauront toujours parfaitement à quoi s'en tenir.
Il n'y a pas d'autre jeunesse que la parfaite santé et la vigueur d'esprit. Quand on possède ces avantages, on est toujours jeune, lors même qu'on aurait cent ans.
Où le danger n'existe pas, il n'y a ni courage ni gloire.
Il faut savoir profiter de tout, aussi bien de ses propres défauts que de ceux d'autrui.
Il fait aujourd'hui un de ces jours grisâtres où la nature est silencieuse, le paysage terne, les nuages presque immobiles, en un mot, un de ces temps modestes où l'on craint de faire du bruit, de peur de réveiller le vent ou d'amener le soleil.
On a bien tort de faire ce qu'on ne devrait pas faire, on s'en repent presque toujours.
De l'enchaînement des connaissances naît la justesse de l'esprit.
Ce qui porte les hommes à l'étude de toutes choses, ce n'est pas, en général, le simple désir de savoir, de se former des opinions justes ou de découvrir du nouveau, mais c'est de publier ses propres opinions et de les faire admirer. Peu importe de posséder la science, ce qu'on veut avant tout, c'est la faire briller.
Personne ne chercherait s'il ne pouvait montrer ce qu'il a trouvé.
On a souvent prétendu que le malheur s'acharne de préférence ici-bas sur ceux qui le méritent le moins. Je crois cette assertion inexacte. Tout ce qui est bien, tout ce qui est bon apporte avec soi un sentiment de contentement qui est une récompense immédiate et que rien ne saurait enlever. Cela est vrai pour les animaux comme pour les humains : un cheval docile, un chien doux et caressant est certainement plus heureux qu'un chien hargneux ou qu'un cheval rétif. Il en est de même pour les hommes : les gens méchants sont encore plus malheureux qu'ils ne rendent malheureux les autres. Tout crime est une rude pénitence pour celui qui l'a commis.
La pensée de l'avenir est pour l'homme une source inépuisable de consolation ; on n'a qu'à le bien vouloir pour être sûr de trouver dans une autre vie une ample compensation de tout ce qu'on a pu souffrir ici-bas.
Si l'âme n'était immortelle, la vie serait peu de chose et la mort ne serait rien.
Rien ne dégoûte plus des plaisirs que les plaisirs mêmes.
Il n'y a pas de terre au monde dont on ne puisse tirer parti.