Instruction : Des pierres dans un sac. Culture : une graine dans un pot. Si grand le sac et nombreuses les pierres, rien n'y pousse. Si modeste la graine et petit le pot, cela germe, croît et fleurit. Et c'est parce que les esprits sont ou des sacs ou des pots, qu'il arrive qu'on rencontre plus de culture chez un cordonnier de village que sous la toque d'un professeur en Sorbonne.
Séduction des hommes mûrs : Savent enfin, peuvent encore.
Les agneaux n'ont jamais converti les loups en égorgeurs.
Voyez ces oisifs condamnés à traîner le fardeau de leurs journées !
Le romantisme est un état d'âme ; le classicisme, un état d'esprit.
Il ne faut pas abuser des meilleures choses.
Mieux vaut être stérilisé par l'intelligence que fécondé par la sottise.
Je me sens fait moitié d'où je viens, moitié d'où je veux aller.
J'écris pour me surprendre, c'est-à-dire à la fois pour me découvrir et pour m'étonner.
D'un amour, le souvenir peut se réchauffer à la cendre, pourvu qu'elle restât d'un beau feu.
L'essence du bonheur est de se croire unique.
Le bonheur des autres suscite la haine.
Si l'amour est une illusion, j'en redemande.
Qui fait gratuitement du mal aux autres est un infirme.
La justice, c'est l'injustice équitablement partagée.
Penser est beau ; prier est mieux ; aimer est tout.
Se corriger, en littérature, c'est presque toujours soustraire ; en morale aussi.
Un livre de maximes est une confession pudique.
Grande preuve d'amour, qu'après les brûlures de la volupté, on y savoure la chaleur de la tendresse.
La tendresse, c'est le désir qui dort, mais d'un œil.
L'habitude use les amours, renforce l'amour.
Un sage ne se manifeste vraiment que dans la pleine possession de ses forces.
Les idées ne mènent pas le monde : ce sont quelques hommes entre les mains de qui elles sont des armes.
Souffrir par l'abandon d'une femme, mes larmes coulent encore.
L'affreux chagrin qui vous désarme s'il ne trouve à verser qu'un pleur, c'est l'océan dans une larme.
La poussière, qui couvre la tête de chacun des livres de ma bibliothèque, n'est enlevée que par moi, d'un souffle, quand je dérange l'un d'eux, dont j'ai besoin. L'absence de cette poussière, ou les différentes épaisseurs de sa couche, selon les auteurs et les titres, témoignent assez justement de mes goûts, de mon savoir, de mes lacunes, de mes ferveurs et de mon mépris.
Cela m'est égal que d'autres aient écrit avant moi ce que je suis en train d'écrire, car c'est à la vie et non dans les livres que je prends mon bien.
Si le style ne vous a pas été donné sans qu'il y ait eu pour vous de problème, c'est un travail long et difficile que de résoudre le problème du style. Mais la plupart de ceux qui écrivent n'en savent rien.
J'aime à faire des réussites avec les mots.
J'aime assez que le cœur dicte, que l'imagination écrive et que l'esprit corrige.
Ce qui me charme le plus, en rouvrant les Pensées de Goethe, ce sont les feuilles et les petites fleurs des bois desséchées que j'avais mises un jour entre leurs pages.
Bien penser, c'est d'abord bien écrire, et l'acquisition préalable de cet outil, qu'est le style, est le seul moyen de pouvoir défricher ensuite les étendues de notre cerveau.
Je suis, tu es, il est, nous sommes tous des vaniteux, et sans vanité, la vie fade.
Il y a des sots si divertissants que leur compagnie m'enchante. Mais quand la sottise est drôle, pourquoi ne pas la considérer comme une façon tout involontaire d'avoir de l'esprit ?
Le bégueulisme des gens, même cultivés, est increvable.
L'amour-propre ne choisit pas entre l'orgueil et la vanité, il s'habille à sa taille.
D'un certain âge, qui vient vite, la vieillesse c'est l'âge qu'on n'a pas encore.
L'ami, le seul, est celui avec qui l'on pourrait vivre comme avec une femme.
Il y a les femmes avec qui on fait l'amour, et celles avec qui l'on en parle.
Il est un certain état que j'éprouve trop souvent, où absolument incapable de penser, dégoûté de tout, impatienté de tout, voulant agir sans le pouvoir, la tête lourde, l'esprit nul, je suis modifié de la manière la plus désagréable.
Je vous aime : que vous me plaisez ! vous m'avez déplu.
L'absence est un arsenic : un peu fortifie l'amour, beaucoup le tue.
Les chagrins d'amour sécrètent un poison qui le tue.
On ne possède vraiment que par l'esprit, même une femme.
L'intrigant partout voit l'intrigue : il la porte dans son œil.
L'air de franchise est impénétrable, on ne sait jamais ce qu'il cache.
L'hypocrite est peut-être le premier à se prendre pour ce qu'il voudrait qu'on le prît.
L'âge, qui raréfie, aiguise.
Il faut beaucoup d'amour pour aller jusqu'au bout d'un peu.
S'étendre est plus facile que s'entendre, et s'étreindre que s'atteindre.