2 - Ce dictionnaire vous propose 118 citations et pensées de Maurice Chapelan :
Instruction : Des pierres dans un sac. Culture : une graine dans un pot. Si grand le sac et nombreuses les pierres, rien n'y pousse. Si modeste la graine et petit le pot, cela germe, croît et fleurit. Et c'est parce que les esprits sont ou des sacs ou des pots, qu'il arrive qu'on rencontre plus de culture chez un cordonnier de village que sous la toque d'un professeur en Sorbonne.
Séduction des hommes mûrs : Savent enfin, peuvent encore.
Les agneaux n'ont jamais converti les loups en égorgeurs.
Voyez ces oisifs condamnés à traîner le fardeau de leurs journées !
Le romantisme est un état d'âme ; le classicisme, un état d'esprit.
Il ne faut pas abuser des meilleures choses.
Mieux vaut être stérilisé par l'intelligence que fécondé par la sottise.
Je me sens fait moitié d'où je viens, moitié d'où je veux aller.
J'écris pour me surprendre, c'est-à-dire à la fois pour me découvrir et pour m'étonner.
D'un amour, le souvenir peut se réchauffer à la cendre, pourvu qu'elle restât d'un beau feu.
L'essence du bonheur est de se croire unique.
Le bonheur des autres suscite la haine.
Si l'amour est une illusion, j'en redemande.
Qui fait gratuitement du mal aux autres est un infirme.
La justice, c'est l'injustice équitablement partagée.
Penser est beau ; prier est mieux ; aimer est tout.
Se corriger, en littérature, c'est presque toujours soustraire ; en morale aussi.
Un livre de maximes est une confession pudique.
Grande preuve d'amour, qu'après les brûlures de la volupté, on y savoure la chaleur de la tendresse.
La tendresse, c'est le désir qui dort, mais d'un œil.
L'habitude use les amours, renforce l'amour.
Un sage ne se manifeste vraiment que dans la pleine possession de ses forces.
Les idées ne mènent pas le monde : ce sont quelques hommes entre les mains de qui elles sont des armes.
Souffrir par l'abandon d'une femme, mes larmes coulent encore.
L'affreux chagrin qui vous désarme s'il ne trouve à verser qu'un pleur, c'est l'océan dans une larme.
La poussière, qui couvre la tête de chacun des livres de ma bibliothèque, n'est enlevée que par moi, d'un souffle, quand je dérange l'un d'eux, dont j'ai besoin. L'absence de cette poussière, ou les différentes épaisseurs de sa couche, selon les auteurs et les titres, témoignent assez justement de mes goûts, de mon savoir, de mes lacunes, de mes ferveurs et de mon mépris.
Cela m'est égal que d'autres aient écrit avant moi ce que je suis en train d'écrire, car c'est à la vie et non dans les livres que je prends mon bien.
Si le style ne vous a pas été donné sans qu'il y ait eu pour vous de problème, c'est un travail long et difficile que de résoudre le problème du style. Mais la plupart de ceux qui écrivent n'en savent rien.
J'aime à faire des réussites avec les mots.
J'aime assez que le cœur dicte, que l'imagination écrive et que l'esprit corrige.
Ce qui me charme le plus, en rouvrant les Pensées de Goethe, ce sont les feuilles et les petites fleurs des bois desséchées que j'avais mises un jour entre leurs pages.
Bien penser, c'est d'abord bien écrire, et l'acquisition préalable de cet outil, qu'est le style, est le seul moyen de pouvoir défricher ensuite les étendues de notre cerveau.
Je suis, tu es, il est, nous sommes tous des vaniteux, et sans vanité, la vie fade.
Il y a des sots si divertissants que leur compagnie m'enchante. Mais quand la sottise est drôle, pourquoi ne pas la considérer comme une façon tout involontaire d'avoir de l'esprit ?
Le bégueulisme des gens, même cultivés, est increvable.
L'amour-propre ne choisit pas entre l'orgueil et la vanité, il s'habille à sa taille.
D'un certain âge, qui vient vite, la vieillesse c'est l'âge qu'on n'a pas encore.
L'ami, le seul, est celui avec qui l'on pourrait vivre comme avec une femme.
Il y a les femmes avec qui on fait l'amour, et celles avec qui l'on en parle.
Il est un certain état que j'éprouve trop souvent, où absolument incapable de penser, dégoûté de tout, impatienté de tout, voulant agir sans le pouvoir, la tête lourde, l'esprit nul, je suis modifié de la manière la plus désagréable.
Je vous aime : que vous me plaisez ! vous m'avez déplu.
L'absence est un arsenic : un peu fortifie l'amour, beaucoup le tue.
Les chagrins d'amour sécrètent un poison qui le tue.
On ne possède vraiment que par l'esprit, même une femme.
L'intrigant partout voit l'intrigue : il la porte dans son œil.
L'air de franchise est impénétrable, on ne sait jamais ce qu'il cache.
L'hypocrite est peut-être le premier à se prendre pour ce qu'il voudrait qu'on le prît.
L'âge, qui raréfie, aiguise.
Il faut beaucoup d'amour pour aller jusqu'au bout d'un peu.
S'étendre est plus facile que s'entendre, et s'étreindre que s'atteindre.
Plus de gens meurent ou tuent par amour-propre que par amour.
Je t'aime avec délire, je t'aime avec le cœur dont on aime à quinze ans.
La simplicité a toujours été l'attribut de la vérité.
Que le bonheur qu'on prend ne soit pas du malheur qu'on donne.
Je t'aime, tu t'aimes, on sème.
Le bonheur est du sable entre les doigts du vent.
La volupté, au même titre que l'ascétisme, est un devoir du corps envers l'esprit.
De toutes les philosophies, la seule véritablement profonde, qui mérite le nom de sagesse, enseigne à l'homme de vivre au présent.
Le drame d'aimer une femme beaucoup plus jeune que soi, et d'en être aimé, tient à la différence, non des âges, qui rend cet amour merveilleux, mais des vitesses auxquelles le temps l'emporte et vous emporte.
Jeune, on pense à la mort sans l'attendre ; vieux, on l'attend sans y penser.
La vie est une lutte, plus ou moins déguisée, où le plus habile est celui qui sait lutter.
Emotionner coïncide avec notre impuissance à nous laisser émouvoir.
Je préfère passer à côté de mon temps que de moi.
L'illusion du vers, bon ou mauvais, est telle, qu'à travers un sonnet la vie est toujours belle.
Religion : Le dernier refuge de l'amour de soi.
Si les anges étaient sexués, je me croirais l'un, tant me plaît faire l'amour sur de célestes musiques.
Quand on est vieux, il faut en faire plus que lorsqu'on était jeune.
Le regard froid me fait horreur : j'aime ce qui brûle.
Qui j'aime ne m'ennuie jamais, ni je ne m'ennuie avec elle.
Un vice unique, père de mes vertus : l'égoïsme.
Les plus grands égoïstes suscitent les plus grands dévouements.
Un pessimisme n'est jamais déçu.
Ne pas vouloir tout aimer et savoir aimer vraiment ce qu'on aime : Cela, qui paraît facile, ne s'obtient de soi que par force.
Ceux qui ne pleurent jamais sont pleins de larmes.
Aimer son prochain comme soi-même est le commandement unique de l'amour.
Les mots sont dociles à qui les aime.
Un moine est l'étalon de la chasteté.
Toutes nos erreurs viennent de nos souvenirs.
Les gens de mon âge me paraissent plus âgés que moi.
L'amour est pour le cœur comme les parfums, les fards et les parures pour le corps.
Espérer c'est jouir.
La famille est un archipel.
La poésie vaut infiniment mieux que la réalité.
Feindre de croire un mensonge est un mensonge exquis.
L'amour qui ne rend pas meilleur est maudit.
L'oubli vaut mieux que le souvenir.
Reluire, en argot, c'est jouir
L'amour et la guerre s'apprennent mieux sur le terrain que dans les livres.
Je t'aime avec passion, je t'aime avec délire.
On pardonne la médiocrité aux livres utiles. Inutiles, ils nous doivent d'être admirables.
Qui me conteste m'atteste.
— Ah ! je t'aime ! — Moi aussi, je m'aime.
La femme laide s'ingénie à se le faire pardonner après l'extinction des lampes.
Supériorité, pour une femme, que de savoir rougir sans avoir honte et, pour un homme, honte sans rougir.
Une femme vous stimule doublement : on désire réussir pour elle, il faut y parvenir contre elle.
J'aime les prêtres, avec les médecins, ce sont les hommes qui en savent le plus sur l'homme.
La chair et l'esprit ne sont conciliables que par le cœur.
Toutes les sottises sur l'homme viennent d'esprits qui n'ont pas su regarder un homme, oubliant que l'unité est la cellule vivante du nombre.
L'individu s'excuse sur la société, la société sur l'homme, l'homme sur sa nature, la nature sur Dieu qui, selon Stendhal, a l'excuse de n'être pas.
La femme n'a d'extase vraie que dans l'amour
L'amour est le piment de l'amour, et rien mieux que le cœur ne corse la volupté.
Les livres présument que la pensée siège dans le cerveau, la vie prouve que l'homme pense avec ses autres viscères.
Les faits imaginaires eux-mêmes sont des faits, peut-être les plus efficaces.
Le bonheur des autres fait toujours pitié quand on est heureux soi-même.
L'évidence est une illusion irréfutable.
Rien n'exprime plus fortement une pensée qu'on n'attendait pas que les mots les plus attendus.
Le but importe moins que la marche, et la marche que la démarche.
L'homme le plus ferme par nature est poltron, quand ses idées sont flottantes.
Il est facile de deviner chez les hommes leur pensée sous-entendue, ils sont si bêtes.
Il y a des chagrins qui aident à dépouiller une certaine partie de soi qu'ils ont tuée.
Le mensonge est l'oxygène de la respiration sociale.
Le bonheur divise, seul le malheur fait la communion des hommes.
La vie n'est pas mauvaise, elle est pire.
Chacun doit se persuader qu'on écrit à ses risques et périls, non à ceux de son correspondant.
La joie la plus élevée de la critique est celle de faire partager son admiration.
C'est en creusant son particulier qu'on rencontre l'universel.
En vieillissant, on comprend de moins en moins la vie et les hommes : cela s'appelle avoir de l'expérience.
La vieillesse est une tombe où pourrissent l'un sur l'autre nos cadavres d'enfant, d'adolescent et d'homme.
