Il y a des vices et des vertus de circonstance.
La populace incorrigible montre en tous lieux le même esprit de démence.
Aux yeux des grands empires les hommes ne sont pas des hommes, ce sont des instruments.
Ceux qui cherchent le bonheur dans le faste ressemblent aux gens qui préfèrent l'éclat des bougies à la lumière du soleil.
Rien de plus impérieux que la faiblesse qui se sent étayée de la force : voyez les femmes.
L'usage nous condamne à bien des folies ; la plus grande est de s'en faire les esclaves.
Il n'est rien qu'on n'obtienne des Français par l'appât du danger, il semble leur donner de l'esprit ; c'est leur héritage gaulois. La vaillance, l'amour de la gloire, sont chez les Français un instinct, une espèce de sixième sens. Combien de fois dans la chaleur des batailles, je me suis arrêté à contempler mes jeunes conscrits se jetant dans la mêlée pour la première fois ; l'honneur et le courage leur sortaient par tous les pores !
Le véritable honneur consiste à bien faire ce que l'on doit.
On ne juge pas les gens sur leurs paroles, mais sur les faits.
La faculté de penser paraît être l'attribut de l'âme ; plus la raison acquiert de perfection, plus l'âme est parfaite, et plus l'homme est moralement responsable de ses actions.
La liberté politique, bien analysée, est une fable convenue, imaginée par les hommes qui gouvernent pour endormir les gouvernés.
Les peines de l'autre monde n'ont été imaginées que comme supplément aux attraits insuffisants qu'on nous y présente. Dieu ne saurait avoir voulu un tel contrepoids à sa bonté infinie.
Il y a une sorte de grandeur à proclamer hautement la scélératesse.
De la suffisance au ridicule il n'y a qu'un pas.
Avec les budgets bien employés on créerait le monde.
La modération imprime un caractère auguste aux gouvernements comme aux nations. Elle est toujours la compagne de la force et de la durée des institutions sociales.
On peut demander de l'amour à une femme ; mais lui demander de l'amitié, c'est dire au sable du désert de rester fixe.
La maladie incurable des Français est de pousser les sentiments jusqu'à l'extrême ; ils sont beaucoup moins inconstants dans leurs goûts, qu'on n'affecte de le dire.
Il n'y a ni bonheur ni malheur dans le monde ; la seule différence, c'est que la vie d'un homme heureux est un tableau à fond d'argent avec quelques étoiles noires, et la vie d'un homme malheureux est un fond noir avec quelques étoiles d'argent.
Les plus grands événements ne tiennent jamais qu'à un cheveu. L'homme habile profite de tout, ne néglige rien de ce qui peut lui donner quelques chances de plus. L'homme moins habile, quelquefois en en méprisant une seule, fait tout manquer.
Ce n'est qu'avec la sagesse et une modération de pensées que l'on peut assurer, d'une manière stable, le bonheur de la patrie.
Qu'est-ce que la guerre ? Un métier de barbares où tout l'art consiste à être le plus fort sur un point donné.
Il n'y a que ceux qui veulent tromper le peuple et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir le retenir dans l'ignorance ; car plus ils seront éclairés, plus il y aura de gens convaincus de la nécessité des lois, du besoin de les défendre, et plus la société sera assise, heureuse, prospère.
Quand les sentiments d'un peuple sont contre le gouvernement, il est à remarquer que toutes les sociétés particulières tendent à lui nuire.
On ne doit pas se contenter de reprocher ses torts à son subalterne ; il faut l'en punir. Si vous n'agissez point ainsi, qu'arrive-t-il ? C'est que vous ne faites que l'irriter sans donner un exemple de justice. Voilà ce que c'est que de ne faire les choses qu'à demi ; l'on y perd toujours. Il ne faut pas voir, ou si l'on a voulu voir, il faut savoir prononcer.
La révolution française, en dépit de toutes ses horreurs, n'en a pas moins été la vraie cause de la régénération de nos mœurs, comme le plus sale fumier provoque la plus noble végétation.
L'on ne peut connaître véritablement les âmes et les sentiments qu'après de grandes épreuves.
Une grande réputation, c'est un grand bruit ; plus on en fait, plus il s'entend au loin. Les lois, les institutions, les monuments, les nations, tout cela tombe ; mais le bruit reste et retentit dans d'autres générations.
Lorsque la mort frappe au loin une personne qui nous est chère, un pressentiment annonce presque toujours l'événement, et celui ou celle que la mort frappe nous apparaît au moment de sa mort.
L'immortalité, c'est le souvenir laissé dans la mémoire des hommes. Cette idée porte aux grandes choses : mieux vaudrait ne pas avoir vécu que ne pas laisser de traces de son existence.
La plupart des sentiments sont des traditions ; nous les éprouvons, parce qu'ils nous ont précédés : aussi, la raison humaine, son développement, celui de nos facultés, voilà toute la clé sociale, tout le secret du législateur.
Appelez un grand homme comme vous voudrez, donnez-lui les noms les plus injurieux, diffamez-le, maltraitez-le, et qu'il soit écrasé par vous sous le poids de la calomnie : vous ne l'empêcherez jamais d'être lui.
Le travail est l'arme défensive de l'homme contre la faux du temps.
Il n'y a pas d'âme plus ferme et plus courageuse que celle d'une femme qui se respecte.
La société ne peut exister sans l'inégalité des fortunes, et l'inégalité des fortunes ne peut exister sans la religion.
Le corps est une horloge à régler sans l'ouvrir.
Il est plus facile d'ériger une république sans anarchie qu’une monarchie sans despotisme.
Il existe comme une espèce de réseau étendu sur les lieux bas, qui enveloppe la petite multitude.
Un homme n'est rien s'il n'est précédé d'une réputation militaire.
On obtient tout des hommes en faisant appel à leur honneur.
Le despotisme républicain est le plus fécond en actes de tyrannie parce que tout le monde s'en mêle.
Le secret du législateur doit être de tirer parti même des travers de ceux qu'il prétend régir.
Le pouvoir absolu n'a pas besoin de mentir, il se tait ; le gouvernement responsable, obligé de parler, déguise et ment effrontément. Tout devient facile à l'influence du pouvoir, quand il veut diriger dans le juste, l'honnête et le beau.
Trop de prévention obstrue les yeux.
En plongeant au fond des voluptés, on en rapporte plus de gravier que de perles.
On ne fait rien d'un philosophe.
Une tête sans mémoire est une place sans garnison.
Il faut être plus grands, malgré nous.
Le courage est comme l'amour, il veut de l'espérance pour nourriture.
On ne fait bien que ce qu'on fait soi-même.
Il n'y a dans la force ni erreur, ni illusion : c'est le vrai mis à nu.
L'apanage des bons sera d'être toujours malfamé chez le méchant.
Le monde est une grande comédie où l'on trouve dix Tartuffes pour un Molière.
Un rien bien souvent a décidé des plus grands évènements.
Plus on est élevé, plus on doit craindre de chuter.
Du sublime au ridicule, il n'y a qu'un pas.
Il y a des gens qui ne sont vertueux que parce que les occasions du vice leur manquent.
Il est toujours vil et déshonorant de calomnier celui qui est malheureux.
Les âmes fortes repoussent la volupté, comme les nautoniers évitent les écueils.
L'avenir est dans le sein de Dieu.
L'estime de ses contemporains est un bien plus réel que l'admiration de la postérité.
Ce que l'on appelle loi naturelle, n'est que celle de l'intérêt et de la raison.
Rien de plus impérieux que la faiblesse qui se sent appuyée de la force.
Qui n'a pas le courage de supporter l'adversité n'est pas un homme.
Un livre curieux serait celui dans lequel on ne trouverait pas de mensonge.
L'opinion fait les braves, la nature fait les intrépides.
On peut s'arrêter quand on monte ; jamais quand on descend.
Tout devient facile quand on suit l'opinion.
La prudence est plus dangereuse que l'audace.
C'est un mauvais moment pour faire la paix que celui d'une défaite.