Les 78 pensées et citations de Pigault-Lebrun :
On n'est pas héros avec un cœur bas et rampant.
Vous êtes loin d'être parfait ; supportez donc les imperfections des autres, ou renoncez à leur indulgence. Fussiez-vous sans défauts, vous n'auriez pas le droit d'insulter à ceux qui en ont : ce serait simplement une raison de les plaindre davantage.
La gaieté ne sympathisera jamais avec la mélancolie, ni la vivacité avec la lenteur.
On se pardonne tout, on ne passe rien aux autres.
Les gens vicieux nomment lâcheté le pardon des injures.
Les gens vicieux dans le monde fourmillent.
Les regrets, quelque violents qu'ils soient, vont toujours en faiblissant.
Savoir souffrir est un pas de plus vers la vertu ; se résigner en est un vers la raison.
De tous les maux naturels, il n'en est que deux qui exigent quelque fermeté d'âme, la mort des personnes qui nous sont chères, et la nôtre. Il ne faut, pour combattre les autres, qu'une vertu commune, peut-être n'en faut-il pas du tout.
Quand faut-il se résoudre à souffrir ? C'est lorsque le mal est inévitable, ou qu'il peut en résulter un bien réel. Supporter un mal qu'on ne saurait empêcher, c'est patience ; s'exposer volontairement à souffrir dans l'espoir d'un bien, c'est courage.
L'amour-propre blessé est un ver qui ne périt qu'avec le cœur qu'il ronge.
L'apparence de la vertu est partout ; la chose est rare.
Respectez, recherchez la pudeur dans le sexe, et le sexe s'écartera rarement d'une vertu qui répand sur la volupté même le charme le plus attrayant.
L'exemple est un tableau vivant ; il peint la vertu en action, il communique l'impression qui l'anime, à tous les cœurs qui en sont les témoins, et chacun peut donner des exemples de vertus, s'il veut sincèrement être vertueux.
Il ne suffit pas que la vertu soit dans le cœur, il faut la rendre visible, il faut qu'elle répande sur toutes nos actions un coloris si lumineux, qu'elles ne soient point équivoques, car les hommes ne voient que notre extérieur, et c'est par nos actions qu'ils jugent de nos sentiments, c'est sur le rapport de leurs sens qu'ils nous pèsent et nous apprécient.
Le langage piquant ou dangereux selon le moment, ce langage circonspect, qui n'admet ni une expression sale, ni même indécente, a des bornes que lui ont fixées la bonne compagnie. Ce n'est qu'elle qui sait le parler ; ce n'est que d'elle qu'on peut l'apprendre. Essayons de donner une idée de cette bonne compagnie si utile à connaître. Écartons d'abord les gens grossiers, sans politesse, sans mœurs, sans délicatesse et sans goût ; écartons encore les dévotes et les précieuses, les pédants et les fats, ce qui restera pourra former une société estimable : ce sera une réunion de gens de bien, d'une humeur facile et liante, où la vertu, l'ordre et les bienséances seront toujours respectées. On y fera un fonds commun d'esprit, de gaieté, d'enjouement ; la liberté y sera admise, la licence en sera exclue. On y trouvera quelquefois le plaisir, auquel commandera la sagesse.
L'homme licencieux, mon cher, et qui a l'habitude de la licence, contracte celle de s'exprimer comme il pense, et ce défaut capital n'est devenu que trop commun. Ne croyez pas que je prétende exclure la galanterie de la conversation. Elle a ses expressions mystérieuses, qui embellissent jusqu'à l'idée du plaisir ; elles le couvrent d'une gaze légère qui n'en dérobe pas les charmes, et qui en rend l'aspect supportable : cette langue est celle des hommes élevés ; elle est la seule dont on puisse se servir devant les femmes, et elle serait déplacée ou inutile devant des vierges : il n'est pas dans les convenances de leur parler de ce qu'elles doivent ignorer.
Recommander la discrétion à son confident est inutile s'il est prudent et circonspect ; la recommander à un sot est aussi inutile. Quel fardeau qu'un secret pour un homme sans jugement ! Croyez-moi, mon cher, gardez le vôtre vous-même ; mais s'il vous pèse, si vous le confiez à quelqu'un, ne soyez pas blessé que cet autre ne soit pas plus discret que vous.
Révéler le secret de quelqu'un, c'est disposer d'un bien dont on n'était pas le maître, c'est spolier un dépôt ; et ce crime doit être irrémissible, parce qu'il est irrémédiable.
La raillerie n'est pas toujours un outrage, si l'esprit et la prudence étaient toujours d'accord, la raillerie deviendrait aimable, car jamais un railleur n'est un sot.
La raillerie blesse moins l'équité naturelle et le droit des gens que la médisance, et la raison en est simple ; celui qu'elle attaque est présent, et à portée de se défendre ; mais si elle est moins criminelle que la médisance, elle est peut-être plus offensante : elle attaque l'amour-propre, elle flétrit, elle déconcerte. Elle ajoute au chagrin qu'on éprouve d'être accusé d'un défaut, d'un travers ou d'une faiblesse, le dépit humiliant de n'avoir pas repoussé le trait piquant par un trait plus vif encore.
La médisance décèle la rivalité d'homme à homme, la jalousie de femme à femme, l'orgueil insupportable de prétendre humilier des gens ou médiocres ou faibles à la répartie.
Il est telles pensées, tels désirs, tels sentiments qui sont innocents tant qu'on les renferme en soi, et qui sont indécents et blâmables si on les publie. Vous pouvez, sans que votre conscience en souffre, apprendre les dérèglements d'une femme dont on croit la conduite pure ; vous êtes coupable si vous les divulguez.
La langue n'est que l'interprète de nos pensées, de nos désirs et de nos sentiments.
Savoir maîtriser sa langue est une chose rare, mais nécessaire et bonne.
Les armes les plus puissantes de l'amour sont la modestie, la douceur et l'esprit.
Le temps n'a pas d'ailes pour les cœurs affligés.
La circonspection dans les paroles est fille de la prudence.
Le vulgaire a un regard méprisant, un abord glacé, un ton tranchant, un sourire dédaigneux.
La beauté passe vite ; les passions s'éteignent lentement.