Qui était Adolphe Thiers ?

Une imagination vive, un cœur sensible, promettent une vie bien orageuse à ceux qui en sont doués.
Quand des idées qui ont préoccupé les esprits touchent à leur fin, elles restent dans quelques têtes, et s'y changent en manie et en imbécillité.
L'homme peu cultivé et d'une classe inférieure est toujours sensible aux démonstrations amicales de l'homme, que son costume, son langage, ses manières, placent au-dessus de lui.
Les hommes peu cultivés sont peu généreux, et chez eux la grandeur n'est pas pardonnée, aussitôt qu'elle est tombée.
L'homme le plus implacable est celui qui jadis avait eu peur.
Les hommes les plus éclairés ne sont pas toujours les plus résolus.
Nul n'est plus dangereux, plus cruel que l'homme sans lumières et sans éducation, revêtu d'une autorité récente.
Les hommes ne peuvent pas vivre longtemps ensemble sans éprouver bientôt du penchant ou de la répugnance les uns pour les autres, et sans se grouper conformément à leurs inclinations.
La haine pèse ; il est si doux d'en décharger le poids !
Un gouvernement doit nécessairement réussir. L'obliger à convenir qu'il n'a pas réussi, c'est l'obliger au plus funeste de tous les aveux.
Être plus faible que les factions est un tort immense de la part d'un gouvernement, et justifie sa chute.
Le premier soin d'un gouvernement est de faire le contraire de celui qui l'a précédé, ne serait-ce que pour obéir aux passions qui l'ont fait triompher.
Le principe du gouvernement démocratique, c'est la vertu, et son moyen pendant qu'il s'établit, c'est la terreur.
En ne voulant jamais exposer sa gloire, on la perd quelque fois.
La fidélité et l'indépendance sont deux qualités qui semblent contradictoires, mais qu'on trouve souvent réunies chez les hommes de mer.
L'empressement des femmes est toujours le symptôme le plus sûr de l'engouement public. Ce sont elles qui, par leurs soins actifs, leurs discours, leurs sollicitudes, se chargent d'y ajouter le ridicule.
On n'a rien fait tant qu'il nous reste à faire.
Le sort de la faiblesse est d'être partout dépendante.
Il ne faut pas faire porter au faible désarmé les erreurs du fort.
Il est d'usage de devenir exigeant et susceptible quand on se croit nécessaire.
Dès qu'on s'explique, dès qu'on se justifie, on est dominé par ceux auxquels on s'adresse.
Il ne faut exiger des hommes et des esprits que ce qu'ils peuvent à chaque époque.
Tout gouvernement doit avoir son excès, et ne périt que lorsqu'il a atteint cet excès. Lorsque le signal est donné... chacun agit sans remords, sans répugnance ; on s'habitue à cela, comme le juge à envoyer les coupables au supplice, le médecin à voir des êtres souffrants sous son instrument, le général à ordonner le sacrifice de vingt mille soldats.
Tels sont les êtres vils qui s'acharnent sur les hommes de bien dès que le pouvoir leur en a donné le signal ! Aussitôt que les chefs ont jeté la première pierre, tout ce qui vit dans la fange se soulève, et accable la victime.
On ne va jamais qu'à la suite des étrangers qu'on appelle à son secours.
Tel est le sort des États : s'ils sont forts, ils font eux-mêmes leurs révolutions, mais ils en subissent tous les désastres et se noient dans leur propre sang; s'ils sont faibles, ils voient leurs voisins venir les révolutionner à main armée, et subissent tous les inconvénients de la présence des armées étrangères. Ils ne s'égorgent pas, mais ils payent les soldats qui viennent faire la police chez eux.
Il faut un grand esprit pour calculer ce qu'on doit aux circonstances, sans blesser les principes.
Il faut à l'esprit humain malade le lit plein de songes de la superstition : et à voir les fêtes, les processions qu'on institue, les autels et les saints sépulcres qui s'élèvent, il me semble qu'on ne fait que changer le lit du malade, seulement on lui retire l'oreiller de l'espérance d'une autre vie.
L'esprit de l'homme n'est pas fait de telle sorte qu'il cherche ainsi à tout simplifier par la franchise. Le parti vainqueur veut convaincre, et il ment ; un reste d'espoir engage l'esprit vaincu à se défendre, et il ment ; et on voit dans les discordes civiles, ces honteux procès, où le plus fort écoute pour ne pas croire, où le plus faible parle pour ne pas persuader, et demande la vie sans l'obtenir. C'est après l'arrêt prononcé, c'est après que tout espoir est perdu, que la dignité humaine se retrouve, et c'est à la vue du fer qu'on la voit reparaître toute entière.
L'esprit humain passe incessamment d'un objet à l'autre.
On ne refait pas l'enthousiasme.
On veut toujours le contraire de ce que veut un ennemi. Chaque parti veut que l'on comprenne et satisfasse ses passions, et ne veut ni comprendre ni admettre celles du parti contraire.
Le peuple dans un moment d'enivrement peut devenir impitoyable pour des victimes qu'il égorge lui-même ; mais voir expirer chaque jour cinquante à soixante malheureux, contre lesquels il n'est pas entraîné par la fureur, est un spectacle qui finit bientôt par l'émouvoir.
Telle est la triste condition de celui qui est engagé dans le mal qu'il ne peut plus s'y arrêter. Dès qu'il commence à concevoir un doute sur la nature de ses actions, dès qu'il peut entrevoir qu'il s'égare, au lieu de rétrograder, il se précipite en avant, comme pour s'étourdir, comme pour écarter les lueurs qui l'assiègent. Pour s'arrêter, il faudrait qu'il se calmât, qu'il s'examinât, et qu'il portât sur lui-même un jugement effrayant, dont aucun homme n'a le courage.
Un malheur attaché à l'espèce humaine est de n'avoir d'énergie que quelques jours seulement.
L'expérience a prouvé que la guerre interdisant les spéculations commerciales, et ne permettant plus que les spéculations sur les fonds publics, facilite les emprunts, loin de les rendre plus difficiles.
En état convulsif, toutes les émotions se succèdent dans le cœur de l'homme.
Le dernier effort que doit faire une autorité pour devenir absolue est toujours le plus difficile : il lui faut toute sa force pour vaincre la dernière résistance ; mais cette résistance vaincue, tout cède, tout se prosterne, elle n'a plus qu'à régner sans obstacle.
Ce n'est jamais sans de grandes douleurs qu'on opère rapidement, et qu'on sauve un état menacé.
Si dans la discussion, la diversité des avis est utile, elle est déplorable dans l'exécution.
On se dissimule toujours l'inconvénient de ce qu'on préfère.
Il y a des dispositions, où tout devient cause, et les événements les plus involontaires ont des résultats qui font supposer la complicité où il n'en existe point.
C'est la dignité qui impose aux hommes, tandis que le génie ne fait que les saisir.
Un dévot sans passions, sans les vices auxquels elles exposent, mais aussi sans le courage, la grandeur et la sensibilité qui les accompagnent ordinairement, un dévot ne vivant que de son orgueil et de sa croyance, se cachant au jour du danger, revenant se faire adorer après la victoire remportée par d'autres, est un des êtres les plus odieux qui aient dominé les hommes, et on dirait les plus vils, s'il n'avait eu une conviction forte et une intégrité reconnue.
La vie n'est rien pour l'homme qui estime ses devoirs au-dessus de tout ; mais après le bonheur de les avoir remplis, le seul bien auquel il soit encore sensible, est celui de penser, qu'il l'a fait avec fidélité ; et cela même est une obligation pour l'homme public.
Il n'y a pas de gouvernement au monde qui eût réussi à empêcher les désertions en temps de paix.
C'est en voulant se mettre en défense contre un parti, qu'on l'irrite davantage, et qu'on précipite la catastrophe.
Le propre des hommes est d'avoir peur des dangers, quand ils sont passés, et de prendre des précautions contre ce qui ne peut plus être.
Aujourd'hui, une génération superficielle et ingrate critique les opérations (du gouvernement révolutionnaire), trouve les unes violentes, les autres contraires aux bons principes d'économie, et joint le tort de l'ingratitude à l'ignorance du temps et de la situation. Qu'on revienne aux faits, et qu'enfin on soit juste pour des hommes auxquels il en a coûté tant d'efforts et de périls pour nous sauver.
On ne sait jamais prévoir les sacrifices nécessaires, et en diminuer l'étendue en les faisant d'avance. Cette prévoyance et ce courage ont toujours manqué aux nations dans les crises financières.
Plus un homme a de courage et de patriotisme, plus les ennemis de la chose publique s'attachent à sa perte.
Ce courage passif qui résiste, n'est pas cet autre courage actif, entreprenant, qui prévient les dangers, au lieu de les attendre avec résignation.
Les partis ne craignent pas les contradictions quand leur intérêt est compromis.
La contagion des idées et des mots est chez les Français d'une rapidité extraordinaire. Chez un peuple prompt et communicatif, l'idée qui occupe quelques esprits est bientôt l'idée qui les occupe tous : le mot qui est dans quelques bouches est bientôt dans toutes.
Les hommes qui se présentent pour opérer des changements dans une constitution sont toujours les plus prononcés de leur parti.
C'est la confiance qui hâte les travaux du commerce, qui fait arriver les denrées, et qui rend leur distribution égale et facile.
Les concessions, même les plus inévitables, sont toujours contestées.
Il n'y a ni force ni consistance sans un certain degré de concentration et d'unité.
Les communications des puissances portent comme toutes les relations entre les hommes, le caractère du temps, de la situation des individus qui gouvernent. Un gouvernement fort et victorieux parle autrement qu'un gouvernement faible et vaincu ; et il convient à une république appuyée sur la justice et la victoire, de rendre son langage prompt, net et public.
Une commission militaire à laquelle un gouvernement envoie des accusés importants ne sait jamais les lui rendre absous.