On ne hait les hommes et la vie que faute de voir assez loin. Étendez un peu plus votre regard, et vous serez bientôt convaincu que tous ces maux, dont vous vous plaignez, sont de purs néants.
La voix de l'homme ne se ranime pas comme celle de l'écho : l'écho peut dormir dix siècles au fond d'un désert, et répondre ensuite au voyageur qui l'interroge ; la tombe ne répond jamais.
La médiocrité est assez souvent secondée par des circonstances qui donnent à ses desseins un air de profondeur. Ces hommes impuissants, qui, pour la foule, paraissent diriger la fortune, sont tout simplement conduits par elle : comme ils lui donnent la main, on croit qu'ils la mènent.
Aussitôt qu'une pensée vraie est entrée dans notre esprit elle jette une lumière qui nous fait voir une foule d'autres objets que nous n'apercevions pas auparavant.
Quoi de plus doux que l'admiration ? C'est de l'amour dans le ciel, de la tendresse élevée jusqu'au culte.
La vieillesse est, comme la maternité, une espèce de sacerdoce.
La beauté des sentiments fait la beauté du style : quand l'âme est élevée, les paroles tombent d'en haut, et l'expression noble suit la noble pensée.
Il n'est rien qui ne chagrine tant les sots que l'indifférence du mépris.
La solitude est mauvaise à celui qui n'y vit pas avec Dieu ; elle redouble les puissances de l'âme en même temps qu'elle lui ôte tout objet pour s'exercer.
Les tombeaux, parmi les hommes, sont les feuillets de leur histoire ; la nature, au contraire, n'imprime que sur la vie ; il ne lui faut ni granit, ni marbre, pour éterniser ce qu'elle écrit.
La nature publie sans cesse les louanges du Créateur, et il n'y a rien de plus religieux que les cantiques que chantent, avec les vents, les chênes et les roseaux du désert.
Il faut toujours proportionner le moyen à la chose, et ne pas prendre un levier pour soulever une paille.
Toute alliance est impossible entre le mal et le bien : on ne se réunit pas à l'abîme, on s'y engloutit.
L'innocence est une sainte ignorance.
L'incrédulité est la principale cause de la décadence du goût et du génie.
Alors même que l'homme est heureux, il y a dans ses plaisirs un certain fonds d'amertume, un je ne sais quoi qu'on pourrait appeler la tristesse du bonheur.
Dans un siècle de lumière on ne saurait croire jusqu'à quel point les bonnes mœurs sont dépendantes du bon goût, et le bon goût des bonnes mœurs.
En retraçant la félicité des hommes à peine a-t-on le temps de sourire que les yeux sont déjà pleins de larmes.
Dieu, patient et vengeur, suspend quelquefois son bras, mais ne détourne jamais les yeux.
Le chant nous vient des anges, et la source des concerts est dans le ciel.
Il est parmi nous des cœurs nobles et des âmes capables d'atteindre à ce qu'il y a de plus grand. Songeons, quand nous voyons un misérable, non à ses haillons, non à son air humilié et timide, mais aux sacrifices qu'il fait, aux vertus quotidiennes qu'il est obligé de reprendre chaque matin, avec ses pauvres vêtements, pour affronter les tempêtes de la journée ! Alors, loin de le regarder comme un être vil, vous lui porterez respect.
Dieu a fait l'homme comme un épi de blé : sa tige est fragile, se tourmente au moindre souffle, mais son grain est excellent.
Dieu se sert souvent de l'adversité comme d'un marchepied pour nous élever.
Ne jugez pas les hommes sur ce qu'ils ont dit, mais d'après ce qu'ils ont fait.
La hâblerie est notre défaut : interrogez un Français et fiez-vous à ses récits, il aura toujours tout fait.
Tout pouvoir renversé, non par le hasard, mais par le temps, par un changement graduellement opéré dans les convictions ou dans les idées, ne se rétablit plus ; en vain vous essaieriez de le relever sous un autre nom, de le rajeunir sous une forme nouvelle : il ne peut rajuster ses membres disloqués dans la poussière où il git.
Votre ami vient de partir ; vous vous croyez fort contre l'absence : allez visiter la demeure de votre ami, elle vous apprendra ce que vous avez perdu et ce qui vous manque.
Un avenir sera, un avenir puissant, libre dans toute la plénitude de l'égalité évangélique ; mais il est loin encore, loin au-delà de tout horizon visible. On n'y parviendra que par cette espérance infatigable, incorruptible au malheur, dont les ailes croissent et grandissent à mesure que tout semble la tromper.
Redemande au repentir la robe de l'innocence : c'est lui qui l'a trouvée, et qui la rend à ceux qui l'ont perdue.
Tant que le cœur conserve des désirs, l'esprit garde des illusions.
Quelquefois on oublie un moment ses douleurs, puis on les reprend comme un fardeau qu'on aurait déposé un instant pour se délasser.
Les grandes afflictions semblent raccourcir les heures comme les grandes joies : tout ce qui préoccupe fortement l'âme empêche de compter les instants.
La postérité se souvient des hommes qui ont changé les empires, très peu de ceux qui les ont rétablis, à moins que ce rétablissement n'ait été durable. On admire ce qui crée, on estime à peine ce qui conserve : une grande gloire couvre de ténèbres tout ce qui la suit.
Celui qui aime est toujours dans la joie : il court, il vole, il est libre, et rien ne le retient ; il donne tout pour tous et possède tout en tous, parce qu'il se repose dans ce bien unique et souverain qui est au-dessus de tout et d'où découlent et procèdent tous les biens.
Les grands hommes ne doivent être vus qu'en grand.
On n'a rien à craindre du temps lorsqu'on est rajeuni par la gloire.
La vie n'est pas toute en plaine, on monte quelquefois, on descend souvent.
Les vertus ne sont des vertus qu'autant qu'elles refluent vers leur source, c'est-à-dire vers Dieu.
Les devoirs ne sont jamais si énergiques que quand il en coûte à les remplir.
Sans religion on peut avoir de l'esprit, mais il est difficile d'avoir du génie.
On est bien près de tout croire quand on ne croit à rien.
On se réconcilie avec un ennemi qui nous est inférieur pour les qualités du cœur ou de l'esprit ; on ne pardonne jamais à celui qui nous surpasse par l'âme et le génie.
Il n'y a qu'une minute de la vie à la mort.
Il suffit qu'une mère voit sourire son enfant pour être convaincue de la réalité d'une félicité suprême.
En général on parvient aux affaires par ce que l'on a de médiocre et l'on y reste par ce que l'on a de supérieur.
Le temps et le monde que j'ai traversés n'ont été pour moi qu'une double solitude et je me suis conservé tel que le ciel m'avait formé.
Les larmes sont mères des vertus, et le malheur est un marchepied pour s'élever vers le ciel.
L'orgueil est le péché de Satan, c'est le premier péché du monde. L'orgueil est si bien le principe du mal, qu'il se trouve mêlé aux diverses infirmités de l'âme ; il brille dans le souris de l'envie, il éclate dans les débauches de la volupté, il compte l'or de l'avarice, il étincelle dans les yeux de la colère, et suit les grâces de la mollesse.
La mort est variée à l'infini, mais toujours bouffonne à l'instar de la vie, qui n'est qu'une sérieuse pantalonade.
La religion, dans tous les siècles et dans tous les pays, a été la source de l'éloquence.