Une séduction, par la naïveté et la candeur, est la plus puissante des séductions.
La bienfaisance est expliquée par le mot même. Vouloir et faire constamment du bien ; employer à cela sa fortune, son crédit et ses soins ; y trouver du plaisir, et n'avoir pas besoin d'autre récompense, c'est être bienfaisant. En ceci l'homme bienfaisant ressemble à l'homme généreux. Mais en quoi ils diffèrent, c'est que le premier ne sert les hommes qu'avec les faveurs qu'il a reçues de la fortune, et que le second les sert de toutes les facultés de son âme. Son génie, son courage, ses espérances, ses plaisirs, sa vie même ; il donne tout, et ne regrette rien.
Les femmes ne sont si malheureuses, au déclin de leurs charmes, qu'en oubliant que la dignité d'une mère est destinée à remplacer la beauté d'une épouse.
L'amitié est une heureuse rencontre, et non un bonheur commun dans nos mœurs, elle demande trop de qualités, et trop d'accord dans les qualités.
La probité soupçonne le mensonge partout où elle ne trouve pas sa propre franchise.
Les mœurs simples donnent un jugement sain plutôt qu'un esprit crédule.
Les amours, dans des rangs différents, déplacent les cœurs sans rapprocher les conditions.
Autant la pitié est douce quand elle vient à nous, autant elle est amère, même dans ses secours, quand il faut l'implorer.
On doit tendre avec efforts à l'infaillibilité, sans y prétendre.
Les savants imaginaires qui prétendent tout savoir, et qui ne savent jamais rien, se plaisent à parler hardiment des choses les plus difficiles, et en vérité ne connaissent pas les plus faciles.
L'amour-propre, toujours insatiable, aime briller quelquefois par le mensonge.
La loi, qui doit tirer ses principes généraux de la nature des choses, peut aussi se relâcher de sa sévérité pour un plus grand bien ; elle doit quelquefois oublier les maximes de la stricte justice pour suivre les impulsions de la bonté.
Il y a des fautes qui n'excluent pas les meilleurs sentiments, et qui ne s'allient pas avec les mauvaises actions. Les personnes à qui il échappe beaucoup de fautes, ne sont ni les plus estimables ni les moins aimables.
L'expérience ne nous éclaire souvent que pour nous donner des regrets, c'est un trésor que nous amassons, sans en jouir.
Une des punitions de la flatterie envers les grands est d'en faire une servitude.
L'innocence est souvent seule contre les puissants, mais Dieu est avec elle ; et tôt ou tard, il amène son jour. Telle est la profonde persuasion d'une femme calomniée et opprimée.
Je désire pour ami le fils qui n'a jamais résisté aux larmes de sa mère.
Les bons cœurs sont en général bien-pensants et bien-disants de tout le monde ; on les dupe longtemps et souvent ; et à cet égard ils ne se corrigent jamais bien. Un de leur défauts est d'être trop faciles à apaiser comme à irriter ; ils ont plutôt des emportements que de la sévérité contre les malhonnêtes gens.
Les bons cœurs s'ils voient quelqu'un souffrir, ils se mettent à sa place, et ils volent à son secours, comme s'il s'agissait d'eux-mêmes. S'ils ont de quoi donner, ils en éprouvent le besoin, et ils s'y livrent. Si on les a outragés, on les ramène aisément ; et il semble qu'ils se soulagent, en pardonnant ; s'ils ont eux-mêmes offensé quelqu'un, cette pensée les trouble, les importune ; et il n'y a ni dépit, ni mauvaise honte qui tiennent ; il faut qu'ils avouent leur faute et qu'ils la réparent.
Les vertus nées de la religion se cachent dans la religion même.
L'indécision et l'inaction sont les parents de l'échec.
L'éloquence n'est jamais plus imposante que lorsqu'elle mêle les belles émotions de l'âme aux grandes pensées de l'ordre public.
L'égoïsme voit quelque avantage dans la probité, et il en a ; mais il en a tout juste ce qu'il faut pour ne pas être réputé en manquer.
Regagnez par des égards sages et adroits ceux que nos succès fatiguent.
La mauvaise foi ne peut s'accommoder de la saine logique.
La véritable générosité est la plus belle des qualités dont l'âme humaine puisse être ornée.
La générosité ne vit que de faits sublimes ; la bienfaisance est de tous les instants.
Les distances, en amour comme en amitié, rapprochent les belles âmes.
Nul n'a le droit de tourmenter un cœur quand il n'a le pouvoir de le changer.
Malheur aux enfants qui ne savent pas honorer, dans les auteurs de leurs jours, une tendresse qui se blesse elle-même par ses refus !
Veille chaque jour sur les vieux ans de ta mère qui passait des nuits à côté de ton berceau.
Il n'y a pas un bon fils au monde qui n'a jamais résisté aux larmes de sa mère.
Lorsqu'une préférence involontaire entraîne une mère vers un de ses enfants, elle a la plus puissante des raisons d'être encore meilleure envers ses autres enfants.
Le plus beau triomphe d'une mère est de réunir par leurs vertus des enfants divisés par leurs passions, et de se soumettre leurs cœurs par le charme de sa tendresse.
On se rend ses malheurs bien amers en les aggravant par ses fautes.
Les fruits de la violence sont le poison de l'hymen.
Les âmes généreuses bénissent leurs infortunes lorsqu'elles ont été l'occasion d'un soulagement pour d'autres misères.
La justice se perfectionne dans la bonté comme la générosité dans la sagesse.
Nul homme ne peut se placer assez bas pour avoir droit à l'impunité de ses méfaits.
Il y a des procès, qui ne sont pas menés comme des affaires, mais comme des complots.
Il y a des personnes qui haïssent, non pour le mal qu'elles ont reçu, mais par celui qu'elles ont fait, et dont la haine se nourrit du mal qu'elles veulent faire encore.
La pauvreté pèse souvent, avec ombrage les égards qu'elle obtient.
La richesse ne sait pas ménager les humiliations à la pauvreté.
Pour être trop bon pour vous, je ne veux plus être injuste envers moi-même.
Biaiser est le mauvais jeu des petits esprits et des petites âmes.
Excéder ses droits, c'est manquer à ses devoirs.
La générosité de certains consiste à donner avec l'arrière-pensée de recevoir au double.
Il est des gens contre qui c'est une duperie de se défendre, et un bon jeu d'attaquer.
Il est des hommes faibles et petits en tout, même dans la méchanceté.
La nécessité seule peut plier les caractères et briser les passions.
L'homme répugne à la règle, il ne s'y attache que par un besoin bien senti.
La justice est la mère de la paix publique et de l'ordre privé.
La calomnie blesse un noble caractère jusque dans sa modestie, dont elle le force de sortir.
L'honnête homme ne sait pas abandonner son honneur à la calomnie.
Qui met de l'artifice dans ses discours éveille la défiance.
Les pauvres d'esprit sont plus faciles à supporter que les prétentieux d'esprit.
L'humeur, en exagérant tout, ne juge rien, ne corrige rien.
L'homme est né pour la crainte et l'espérance, il a besoin de croire et d'aimer.
La facilité est une manière de penser, d'écrire, de parler, qui satisfait l'attention sans beaucoup l'exercer.
Il y a des gens qui se piquent de la haine des sots pour avoir un titre parmi les gens d'esprit.
Les gens à préjugés ne le contestent jamais plus que lorsqu'il est prouvé.
Il y a des gens si avides de domination qu'ils s'emparent de la moindre concession comme d'une victoire.
On plaît par la politesse des paroles et la grâce des manières, mais on ne frappe et on n'émeut que par les saillies de l'âme et l'originalité de l'imagination.
Il y a des écrivains qui sont les plus sévères censeurs des défauts qu'on leur reproche à eux-mêmes.
Si quelque chose a le droit de soumettre la puissance, c'est la voix du génie.
Il est des écrits si vénérables, par leurs motifs et leur objet, qu'on y aime des négligences de style, elles sont là comme des signes d'abandon et de candeur.
Ceux qui ne sont touchés que de la gloire du bien dire ne savent pas qu'on n'a de l'éloquence que par la passion du bien faire.
L'invective appartient à l'oppression, comme la plainte à la douleur.
Une indignation contrainte est la plus énergique des impressions que le cœur puisse recevoir et conserver.
C'est déjà outrager les talents que de ne pas les sentir.
Décourageons toujours la médiocrité par l'indifférence, son lot légitime, mais toujours des hommages pour tout ce qui a l'empreinte du talent, et pardonnons-lui d'avoir été surpassé ou de pouvoir l'être par le génie.
Dans tous les genres de louange, rien ne reste que la vérité, rien n'honore que la justice.
Si les ouvrages étendus exigent plus de puissance et de diversité dans le talent, les petits, ne pouvant se passer de tout leur mérite, demandent plus de perfection et de goût. Ils doivent se sentir de la bonne veine, comme certains évènements de notre vie s'imputent à notre bonne fortune.
Dans le polémique, deux grands défauts, celui de raisonner faux, et celui d'avoir trop raison.
Pour être poète ou orateur, une raison saine, un esprit juste et heureux, une sensibilité vraie ne suffisent pas encore : il faut de l'enthousiasme et de l'imagination ; un coloris riche ; une harmonie haute et variée ; une marche forte et simple ; et par tout cela, et par-dessus tout cela, un caractère à soi, une originalité.
Le propre du grand talent est de tirer ses principales beautés des difficultés qu'il avait à vaincre.
Écrivez d'après les émotions habituelles de votre esprit, et votre style participera de cette verve, de cette effusion de soi-même, qui marquent l'écrivain original.
Il faut dans la vie avoir du caractère. Si on en éprouve les inconvénients, on en recueille aussi les avantages. Tout ce qui est sincère, plaît dans un sens, même en choquant dans un autre. Tout ce qui est de nature a de la puissance ; tout ce qui donne une physionomie, attire et retient l'attention.
La critique ne doit s'appliquer qu'où elle peut verser le baume d'une juste louange dans la plaie d'une utile blessure.
La perfection, dans l'art d'écrire, est d'allier les caractères de son talent avec les couleurs de son sujet.
On entend et on doit entendre par égoïsme un continuel sacrifice des autres à soi ; mais ce sacrifice des autres à soi est le propre de toutes les passions, de tous les vices. Les passions, en nous faisant placer tout notre bonheur dans la possession de leur objet, nous font tout sacrifier pour l'obtenir. Les vices, qui sont des inclinations basses et déréglées de notre âme, nous font aussi tout immoler à nos goûts et à nos habitudes. Il semble donc que l'égoïsme fait le fonds de toutes les passions, de tous les vices, de toutes nos mauvaises actions et de tous les mouvements coupables de notre cœur.
L'éloquence est née au sein de la liberté du besoin de la gloire.
On n'est pas à couvert de la calomnie, même par l'inviolabilité du malheur.
Le sentiment de l'honneur est le besoin de l'estime des hommes avec qui l'on vit. L'institution de l'honneur est née de l'insuffisance des lois, pour remplir le but de la société.
La véritable générosité c'est ce besoin d'estime et d'amour, et cette passion des beaux faits, qui font que nous mettons notre bonheur à nous sacrifier souvent pour les autres ; et à donner toujours, à nos bienfaits et à nos services, un caractère particulier de grandeur ou de délicatesse.
Il y a des sentiments cachés dans le fond du cœur d'une femme, qui attendent une seule personne, pour recevoir, une fois, un épanchement.
L'amour veut qu'on s'engage si bien à lui, qu'il n'y ait plus une résolution contraire de possible.
Combien nous devons veiller sur les vieux ans de celle qui passait des nuits à côté de notre berceau !
J'honore la jeune personne pour qui la pensée des larmes de sa mère est une garde sur son cœur.