Quelle époque ai-je choisi pour faire un traité sur le bonheur des individus et des nations ! Est-ce au milieu d'une crise dévorante qui atteint toutes les destinées, lorsque la foudre se précipite dans le fond des vallées, comme sur les lieux élevés ? Est-ce dans un temps où il suffit de vivre pour être entraîné par le mouvement universel, où jusqu'au sein même de la tombe le repos peut être troublé, les morts jugés de nouveau ? Oui, c'est dans ce siècle, c'est lorsque l'espoir ou le besoin du bonheur a soulevé la race humaine ; c'est dans ce siècle qu'on est conduit à réfléchir profondément sur la nature du bonheur individuel, sur sa route, sur ses bornes, sur les écueils qui séparent d'un tel but.
Une vie complète son être en l'unissant à l'être aimé qui lui est cher.
On ne trouve de bon dans la vie que ce qui la fait oublier.
L'amour pleure souvent ses propres sacrifices.
La bonté existe en nous comme le principe de la vie, sans être l'effet de notre propre volonté ; elle semble un don du ciel comme toutes les facultés, elle agit sans se connaître, et ce n'est que par la comparaison qu'elle apprend sa propre valeur.
L'homme bon est de tous les temps et de toutes les nations ; il n'est pas même dépendant du degré de civilisation du pays qui l'a vu naître : c'est la nature morale dans sa pureté, dans son essence ; c'est comme la beauté dans la jeunesse où tout est bien sans effort.
La bienfaisance remplit le cœur, comme l'étude occupe l'esprit.
La raison combat, avec désavantage contre les affections passionnées.
Le plus difficile à supporter pour un joueur, ce n'est pas d'avoir perdu, mais de cesser de jouer.
La vanité est l'ennemie de l'ambition ; elle aime à renverser ce qu'elle ne peut obtenir.
La grâce, ce charme suprême de la beauté, ne se développe que dans le repos du naturel.
On tire très souvent vanité des qualités qu'on n'a pas.
Quand le succès vous élève plus haut, le revers vous fait tomber plus bas.
L'amour est de toutes les passions la plus fatale au bonheur de l'homme.
L'amour, qui n'est qu'un épisode dans la vie des hommes, est l'histoire entière de la vie des femmes.
Le mal que l'envieux sait causer ne lui compose pas même un bonheur.
Il faut aimer l'argent pour aimer le jeu.
Craindre à l'avance le péril qui menace, c'est de la souffrance dans le calme.
La bonté recueille toutes les véritables jouissances du sentiment, mais elle diffère de lui par cet éminent caractère où se retrouve toujours le secret du bonheur ou du malheur de l'homme : elle ne veut, elle n'attend rien des autres, et place sa félicité tout entière dans ce qu'elle éprouve. Elle ne se livre pas à un seul mouvement personnel, pas même au besoin d'inspirer un sentiment réciproque, et ne jouit que de ce qu'elle donne.
La triste connaissance du cœur humain fait, dans le monde, de l'exercice de la bonté un plaisir plus vif ; on se sent plus nécessaire, en se voyant si peu de rivaux, et cette pensée anime à l'accomplissement d'une vertu à laquelle le malheur et le crime offrent tant de maux à réparer.
La bonté ne demande pas un retour à ce qu'elle donne.
La philosophie exige de la force dans le caractère, l'étude de la suite dans l'esprit.
Il n'y a point de souvenirs profonds, si l'on ne croit pas aux droits du passé sur l'avenir.