Titre : Les saisons de la vie.
Recueil : Les poèmes et sonnets mystiques (1886)
Ma jeunesse ne fut qu'un ténébreux avril,
Obscurci d'un nuage et traversé de larmes,
Au matin nébuleux, au soir chargé d'alarmes,
Et dont les brèves fleurs tombent sous un grésil.
L'été brûlant m'offrit un incessant péril,
Son âpre ardeur était sans ivresse et sans charmes ;
Ses orages cruels me trouvèrent sans armes,
Et blessèrent à mort ce cœur trop peu viril.
Avec son tiède éclat, sa fine couleur sobre,
Ma plus belle saison serait ce doux octobre,
Mais l'approche du froid hiver me fait souffrir ;
Ma frêle âme frissonne à ses brises amères,
Et, toujours obsédé par de tristes chimères,
Faible cœur, je n'aurai su vivre ni mourir.
Jacques Villebrune