Il n'est rien de plus court, rien de plus fragile, que le bonheur ! Souvent hélas ! au moment où nous en jouissons avec plus de sécurité, un coup imprévu et rapide vient frapper, jusque dans nos bras, la malheureuse victime du sort, tous les plaisirs de la vie, nous paraissent alors anéantis pour jamais, tout autour de nous devient lugubre et désert, tout inspire l'effroi. On étend ses bras en vain pour embrasser celle qui n'est plus, on l'appelle en vain ; on croit entendre ses pas, ces pas si connus. Tout nous paraît mort, et nous sommes morts pour tout ; la solitude nous environne de toute part ; partout nous nous croyons seuls avec notre cœur sanglant ; nous nous persuadons, dans notre abattement, qu'il n'est plus rien qui nous aime, et que nous n'aimons plus rien, et une vie sans amour est, pour le cœur qui a véritablement aimé, la mort la plus terrible ! Aussi l'infortuné qu'a éprouvé ce malheur veut vivre et mourir solitaire. Dans ces moments cruels, dans ce passage rapide du bonheur suprême au comble de l'infortune, il ne voit personne qui lui tende une main compatissante, une âme qui partage ses souffrances, qui s'en forme une idée ; car, c'est une perte qu'on ne connaît qu'après l'avoir sentie. Mais alors on cherche, on désire la solitude ; il n'est point de chagrin, point de tristesse qu'elle n'adoucisse, hélas !