C'est une vérité certaine qu'on n'est jamais plus tranquille ni moins trompé qu'en vivant avec des gens d'un bon esprit. Il en coûte beaucoup plus de peine pour être admis et pour se conserver dans une mauvaise compagnie que dans une bonne. Comme la mauvaise a plus de vanité que d'esprit et de raison, il faut bien des soins pour lui plaire, et ce n'est pas une petite affaire que d'entretenir un sot en bonne humeur avec lui-même et avec les autres,a écrit Alexander Pope. (Extrait : Les maximes et réflexions morales, publiées en 1739.) Autre citation d'Alexander Pope :
De toutes les causes qui conspirent à aveugler le jugement faillible de l'homme, et à égarer sa raison, aucune n'exerce sur les faibles cerveaux plus d'empire que l'orgueil, cet éternel vice des sots. Plus la nature nous a refusé de mérite, plus elle nous donne de grands renforts d'orgueil secourable. Car il en est de l'âme comme du corps : on voit gonflés de vent les espaces où manquent le sang et les esprits : l'orgueil, à défaut de talent, se porte à notre défense, et remplit tout le vide immense laissé par le jugement. Si la saine raison dissipe une fois ce nuage, la vérité éclate à nos yeux avec d'irrésistibles clartés. Ne vous fiez pas à vous seul, mais pour connaître vos défauts, servez-vous de tous vos amis — et de tous vos ennemis.(Extrait : Essai sur la critique, publié en 1711.)
Les hommes sont rarement capables de suivre la droite raison pour elle-même ; il faut que la politique et l'intérêt les y portent sans qu'ils y pensent, et presque en dépit qu'ils en aient.
La modestie est la plus belle parure du corps et de l'esprit.
Il y a des folies sérieuses et concertées avec un certain air de sagesse qui sont mille fois plus impertinentes que ce qu'on nomme véritables folies.
Tout est incertain dans la vie ; il n'y a de certain que la mort.
Une femme galante traite les hommes comme un habile joueur d'échecs en use avec ses pions. Elle ne s'attache pas assez à un seul, pour n'avoir pas l'œil sur un autre qui pourrait lui procurer de plus grands avantages.
Le doute est le fils de la sagesse.
Ceux qui sont continuellement occupés à observer les actions des autres ressemblent à ceux qui sont toujours hors de leur maison, et qui vont dans celles d'autrui où ils arrangent tout, tandis que la leur tombe en ruine.
Un petit présent gagne un ami ; un grand bienfait souvent nous le fait perdre.
Comme la pierre, que la boule rencontre dans son chemin, procure quelquefois au joueur le gain de la partie, de même ce qui paraît être un obstacle à nos desseins en avance quelquefois le succès.
La vaine gloire pour un bienfait que nous avons rendu est injurieuse à notre ami.
Les gens qui méritent le moins qu'on leur rende service sont ceux qui en demandent le plus.
II est offensant pour un homme d'esprit de parler avec des sots.
Le demi savoir est à fuir.
Un général prudent ne doit pas toujours placer son armée sur des lignes égales.
Un homme qui se mêle toujours des affaires des autres ressemble à celui qui observe trop curieusement le travail des abeilles : il en est souvent piqué pour sa curiosité.
Qui nous a fait une offense ne saurait jamais devenir notre ami.
Les défauts naturels ne deviennent jamais honteux que lorsqu'avec trop d'art on s'efforce de les cacher ou de les faire passer pour des perfections. Nous avons pitié d'un boiteux parce qu'il ne dépend pas de lui de marcher droit ; mais nous nous en moquons quand, forcé de boiter tout bas, il se pique de savoir danser.
L'amour est le désir le plus pressant du cœur humain.
Qui fait violence par nécessité a lui-même éprouvé auparavant la violence de la nécessité.
Le plaisir dont on est sûr de se repentir ne peut jamais être parfait.
La voix du peuple est à notre réputation ce que le vent est à la flamme.
Toute la sagesse de notre vie consiste à bien penser et à acquérir des connaissances.
Le bon conseil est la pilule de l'esprit.
On donne souvent le nom d'injustice à la force employée pour l'exécution d'une loi légitime.
L'homme n'aime point à obéir quelque juste que soit la violence.
La probité n'est pas toujours à l'épreuve de la tentation.
Les fous se précipitent où les anges craignent de poser les pieds.
Ceux qui méritent le plus d'être loués supportent le mieux d'être critiqués.
Une grande réputation est semblable à une grande dépense ; il est difficile de les soutenir l'une et l'autre.
Une plaisanterie usée est semblable à un habit qu'un autre a déjà porté.
La véritable éloquence est comme le soleil qui répand un jour fidèle.
L'expression est l'habillement de la pensée, qui n'est décent qu'autant qu'il est bien assorti.
La vengeance ne procède jamais que de la faiblesse d'une âme qui n'a pas la force de supporter une injure.
Les femmes sont presque toujours les dupes de l'encens que les hommes leur prodiguent.
L'âme inquiète et bornée à elle-même, se promène dans les idées d'une vie à venir.
Si un fat paraît avoir de l'esprit, ce n'est jamais qu'à ceux qui n'en ont point.
L'esprit sans jugement est un vaisseau sans lest qui est sans cesse en danger.
Un homme qui flotte dans les principes s'expose également à l'attaque des deux partis auxquels il balance de s'attacher. Il ressemble à la chauve-souris qui tenant de deux natures réunies est mordue par les rats, et becquetée par les oiseaux.
La meilleure recette pour vivre longtemps est de ne point accorder une confiance aveugle aux prétendus médecins du corps et de l'âme. Ceux-là, en voulant régler nos constitutions par de trop fréquents remèdes, altèrent notre tempérament ; et les autres, par trop de raisonnements et de subtilités sur la loi, la dérangent si fort qu'il ne nous en reste presque aucune.
Tous les sots ont la démangeaison de railler, et ils voudraient bien être du coté des rieurs.
Un vrai génie est rare parmi les poètes, un goût sûr ne l'est pas moins parmi les critiques.
Pour justifier nos actions, nous alléguons moins les règles du vrai que l'usage du temps et la coutume établie. C'est ainsi que les vieillards, qui ont survécu à leur bon sens, n'appuient leurs décisions que sur l'autorité de leurs années.
Il en est de nos jugements comme nos montres ; nul ne s'accorde, chacun en croit la sienne.
La société fait naître l'amitié ; l'amitié produit la familiarité.
L'affectation de la sincérité est une fraude plus criminelle que la tromperie ouverte.
La pauvreté n'a rien de plus dur en soi que de rendre l'homme ridicule.
Le mérite n'a de véritable approbateur que le succès.
Être trop mécontent de soi-même, c'est une faiblesse ; en être trop satisfait, c'est une témérité.
La religion sans mœurs fait un hypocrite ; les mœurs sans religion font le philosophe.
L'hypocrite est plus coupable devant Dieu que l'athée.
Les occasions ne manquent point aux hommes, mais les hommes manquent les occasions.
Les associés deviennent souvent plus ennemis qu'amis.
Se venger est plus la perte de l'honneur que la réparation puisqu'il n'y a rien dans la nature et dans la religion de si honorable et de si grand que de savoir pardonner.
Il en est des petites âmes comme des petites bouteilles qui ont le goulot étroit ; moins elles renferment de liqueur, plus elles font de bruit en la répandant.
Les liaisons des hommes ne durent pas plus que les occasions qui les ont rendu nécessaires.
Le menteur connu pour menteur n'en impose plus qu'à lui seul.
Le charme frappe la vue, le mérite conquiert l'âme.
Constant en la seule inconstance.
L'erreur est humaine, le pardon divin.
Chaque sexe éprouve les mêmes désirs, se recherche et s'unir.