Presque toutes les femmes sont des dragons de vertu lorsqu'on leur fait une déclaration d'amour, elles ont naturellement la science infuse de ce manège. C'est toujours par refuser qu'elles commencent, mais elles se rendent après, en s'appuyant sur ce grand principe : que les femmes diminuent beaucoup de leur prix auprès des hommes, quand elles ont la maladresse de ne pas retarder leur défaite par une résistance et des grimaces qui donnent ou qui augmentent la bonne opinion qu'elles désireraient qu'on eût de leur sagesse.(Extrait des pensées, maximes et anecdotes publiées en 1810.)
La vérité est comme les métaux, que l'art ne crée point, mais qu'il purifie.
Il y a trois sortes d'ignorance : ne rien savoir, savoir ce qu'on sait, et savoir autre chose que ce qu'on doit savoir.
L'avarice et l'ambition diffèrent en ce que l'une est agitée par l'espérance, et l'autre par la crainte.
Au lieu d'être artificieux pour plaire, il suffira d'être bon ; au lieu d'être faux pour flatter les faiblesses des autres, il suffira d'être indulgent.
Faire confiance à un homme qui vous a déjà trahi, c'est se tirer soi-même une balle dans la tête.
La dissimulation n'est jamais plus utile qu'à celui qui n'en est pas soupçonné.
Pour un homme vain et présomptueux, tout est faveur.
La probité est la vertu des pauvres ; la vertu doit être la probité des riches.
L'avarice est la plus vile, mais non pas la plus malheureuse des passions.
L'amour de la réputation est quelquefois plus puissant que celui de la vie.
L'esprit et la méchanceté se confondent souvent.
On n'oblige jamais la nature à des avances qu'elle n'en fasse payer les intérêts très cher.
Le langage du cœur est universel ; il ne faut que de la sensibilité pour l'entendre et le parler.
Les sots ne vivent que des fautes des gens d'esprit.
Le malheur des cœurs qui ont aimé est de ne rien trouver qui remplace l'amour.
Si chacun faisait tout le bien qu'il peut faire, sans s'incommoder, il n'y aurait pas de malheureux.
Si les services imposent des devoirs d'obligation à ceux qui les reçoivent, ils en exigent de la délicatesse de ceux qui les rendent.
Un tic assez ordinaire aux sots est de penser fort avantageusement d'eux-mêmes, et de croire que les autres en parlent mal.
L'homme véritablement louable est sensible à l'estime, et déconcerté par la louange.
Il y a des ridicules qui ne vont pas à toutes sortes de figures.
L'âme seule fait la physionomie ; la nature ne donne que les traits.
Un trop grand désir de paraître aimable vous empêche souvent de l'être.
Personne ne s'engage innocemment dans la voie du crime.
Les consolations nous viennent plutôt des autres que de nos propres réflexions.
Le flambeau de la philosophie blesse les yeux de ceux qu'elle n'éclaire pas.
Les véritables critiques sont presque aussi rares que les bons auteurs.
L'estime qu'on mérite ne va guère sans jaloux.
Que les femmes ne se plaignent pas des hommes ; ils ne sont que ce qu'elles les ont faits.
Le jeune homme qu'on blâme d'être amoureux, c'est lui reprocher d'être malade.
Il n'y a plus que deux caractères dans les gens du monde, la frivolité et l'intrigue.
Il est des visages communs qu'on ne prend pas la peine de distinguer.
Le ridicule fait malheureusement plus d'impression sur les âmes honnêtes et sensibles que sur les vicieux ; parmi eux on en donne, on en reçoit et l'on en rit.
Il arrive parfois qu'on donne sans générosité, et qu'on recoit sans la moindre reconnaissance, parce qu'il est rare que le bienfait tombe sur le besoin, et encore plus rare qu'il le prévienne. On refuse durement le nécessaire, on accorde aisément le superflu ; on offre les services, on refuse les secours.
Les esclaves volontaires font plus de tyrans que les tyrans ne font d'esclaves forcés.
Les hommes ont plus de timidité dans l'esprit que dans le cœur.
On n'est pas toujours obligé d'avoir ses parents pour amis, mais il est décent de vivre avec eux comme s'ils l'étaient, et de cacher aux gens trop curieux les éventuelles discordes au sein de la famille.
Un scélérat n'a point de remords, mais il a de l'orgueil.
Après les bonnes leçons, ce qu'il y a de plus instructif sont les ridicules.
Les gens d'esprit n'en ont jamais moins que lorsqu'ils veulent en avoir.
Les hommes sensés ne plaisent guère qu'à ceux qui le sont ou qui sont près de le devenir.
L'honneur qui se vend, si peu qu'on en donne, est toujours payé plus cher qu'il ne vaut.
En fait de procédés, on est bien près du mépris quand on a droit à l'indulgence.
Les femmes n'ont point de plus grands ennemis que les femmes.
Les crimes d'opinion, tout absurdes qu'ils peuvent être, l'emportent sur ceux qui blessent la morale et outragent la nature.
Rien ne flatte plus un homme faible que les éloges qu'on lui fait sur sa fermeté.
La plupart des femmes qui font le sujet du triomphe des hommes ont le cœur froid, les sens tranquilles et la tête déréglée. Ce n'est pas la raison qui détermine leur choix ; ce n'est pas l'amour, ce n'est pas même le plaisir, c'est la folie qui leur échauffe l'imagination pour un homme qui devient successivement l'objet, le complice, et la victime d'un caprice. Un amant leur plait sans autre raison que de s'être présenté le premier, et il est bientôt quitté pour un second, qui n'a d'autre mérite que d'être venu le dernier.
Le caractère est aux âmes ce que la physionomie et la variété dans les mêmes traits sont aux visages.
La modestie est le seul éclat qu'il soit permis d'ajouter à la gloire.
Les préjugés doivent être discutés, et traités avec circonspection.
La nécessité ne fait guère que des fautes quelquefois pardonnables : la cupidité réduite en système fait les crimes.
Le pédantisme contribue beaucoup à faire naître la fatuité.
L'amour des lettres rend assez insensible à la cupidité et à l'ambition, console de beaucoup de privations, et souvent empêche de les connaître ou de les sentir.
Il y a une grande différence entre la connaissance de l'homme et la connaissance des hommes. Pour connaître l'homme, il suffît de s'étudier soi-même, mais pour connaître les hommes, il faut les pratiquer.
La curiosité est le fruit des premières connaissances.
Il faut un peu connaître le vice pour en redouter les pièges.
L'auteur d'un bienfait est celui qui en recueille le fruit le plus doux.
L'innocence est souvent plus hardie que le vice n'est entreprenant.
Que les femmes ne se plaignent point des hommes, ils ne sont que ce qu'elles les ont faits.
On peut compter sur la constance des femmes, quand on n'en exige pas l'apparence de la fidélité.
La nécessité ne fait guère que des fautes quelquefois pardonnables.
L'opinion nous détermine presque aussi souvent que l'amour.
Les femmes n'ont pas de plus grands ennemis que les femmes.
La postéromanie est le tic commun des Grands, ils aiment leur postérité, et ne se soucient point de leurs enfants.
La passion est mieux guidée par la lumière du sentiment que par des idées suivies.
Le goût est le sentiment du beau.
Le respect n'est autre chose que l'aveu de la supériorité de quelqu'un.
La politesse est l'expression ou l'imitation des vertus sociales : l'expression, si elle est vraie ; l'imitation, si elle est fausse.