La poésie française sur le sourire.
L'affinement de la souffrance : Sourire.
Quand l'homme naît, il pleure, et pourtant le sourire sur sa lèvre éclora, car le monde est si beau. (Henri-Frédéric Amiel)
2 - Les poèmes et sonnets sur le sourire :
Poème : Un sourire ne coûte rien.
Recueil : Le Livre d'amour (1920)
Un sourire ne coûte rien et produit beaucoup,
Il enrichit celui qui le reçoit sans appauvrir celui qui le donne,
Il ne dure qu'un instant, mais son souvenir est parfois éternel,
Personne n'est assez riche pour s'en passer,
Personne n'est assez pauvre pour ne pas le mériter,
Il crée le bonheur au foyer, soutient les affaires,
Il est le signe sensible de l'amitié,
Un sourire donne du repos à l'être fatigué,
Donne du courage au plus découragé
Il ne peut ni s'acheter, ni se prêter, ni se voler,
Car c'est une chose qui n'a de valeur qu'à partir du moment où il se donne.
Et si toutefois, vous rencontrez quelqu'un qui ne sait plus sourire,
Soyez généreux donnez-lui le vôtre,
Car nul n'a autant besoin d'un sourire
Que celui qui ne peut en donner aux autres.
Raoul Follereau (1903-1977)
Poème : Je dédie à tes pleurs, à ton sourire.
Recueil : Les heures claires (1896)
Je dédie à tes pleurs, à ton sourire,
Mes plus douces pensées,
Celles que je te dis, celles aussi
Qui demeurent imprécisées
Et trop profondes pour les dire.
Je dédie à tes pleurs, à ton sourire,
À toute ton âme, mon âme,
Avec ses pleurs et ses sourires
Et son baiser.
Vois-tu, l'aube blanchit le sol, couleur de lie ;
Des liens d'ombre semblent glisser
Et s'en aller, avec mélancolie ;
L'eau des étangs s'éclaire et tamise son bruit,
L'herbe rayonne et les corolles se déplient,
Et les bois d'or s'affranchissent de toute nuit.
Oh ! dis, pouvoir, un jour,
Entrer ainsi dans la pleine lumière ;
Oh ! dis, pouvoir, un jour,
Avec des cris vainqueurs et de hautes prières,
Sans plus aucun voile sur nous,
Sans plus aucun remords en nous,
Oh ! dis, pouvoir un jour
Entrer à deux dans le lucide amour !
Émile Verhaeren (1855-1916)
Poème : Votre sourire.
Recueil : Les échos du rivage (1857)
Votre sourire est charmant de gaieté ;
Lorsqu'en mon âme où bout parfois l'orage
Il resplendit comme un soleil d'été,
Il y dissipe et chasse tout nuage,
Et je m'apaise à sa sérénité.
Ce doux rayon dans mon cœur reflété,
Oh ! si j'étais poète, à chaque page
Comme en beaux vers ma muse l'eut chanté !
Votre sourire
Vous n'avez pas besoin en vérité,
D'avoir le sceptre et l'empire en partage ;
Vous n'en sauriez pas en réalité
Être plus reine et régner d'avantage,
Car il vaut bien certes une royauté,
Votre sourire.
Albert Dabadie (1832-1866)
Poème : Le sourire.
Recueil : Poésies (1827)
Rends-le-moi, rends-le-moi, ce gracieux sourire
Que j'ai cru sur ta lèvre entrevoir en passant !
Qu'il soit né d'un caprice, ou que l'amour l'inspire,
N'importe ! — rends-le-moi, ce gracieux sourire,
Je veux me croire aimé, ne fût-ce qu'un instant.
Je sais que ton regard ne brille que pour plaire ;
Que sa flamme est pareille à la froide lumière
Qu'en nos climats glacés nous verse le soleil ;
Que c'est au prix des pleurs que tu vends ton sourire,
Et que tu fais payer une heure de délire
Par des jours d'amertume, et des nuits sans sommeil.
Mais j'ai besoin d'aimer, de croire à l'espérance ;
J'ai besoin que sa fleur sur ma triste existence
Jette un léger parfum qui réveille mon cœur ;
Détrompé mille fois, ce cœur veut l'être encore :
Je te crains, mais te suis ; te maudis, mais t'adore,
Et j'ai soif d'être ému, même au prix du malheur.
Rends-moi donc, rends-le-moi, ce gracieux sourire,
Que j'ai cru sur ta lèvre entrevoir en passant ;
Qu'il soit né d'un caprice, ou que l'amour l'inspire,
N'importe ! — rends-le-moi, ce gracieux sourire ;
Que je me croie aimé, ne fût-ce qu'un instant !
Xavier Labenski, dit Jean Polonius (1800–1855)
Poème : Si chagriner ce qui nous aime.
Recueil : Jour à jour, les poésies intimes (1880)
Si chagriner ce qui nous aime
Est un péché, cause un remords,
Et si notre tristesse même
Peut affliger, que faire alors ?
Faut-il voiler sous un sourire
Le deuil qui nous étreint le cœur ?
Par bonté, faut-il nous prescrire
Dans la défaite un air vainqueur ?
Faut-il, plus tendre ou plus austère,
Se faire ou de cire ou d'airain ?
Faut-il parler, faut- il se taire ?
Montrer ou cacher son chagrin ?
Pour épargner ce qui nous aime,
Il est bon d'être généreux :
Il n'est pourtant qu'un stratagème
Tout à fait sûr, c'est d'être heureux.
Henri-Frédéric Amiel (1821-1881)
Poème : Les sourires.
Recueil : Les joies et douleurs (1871)
Un sourire n'est rien, et pourtant, dans la vie,
Lorsque languit et meurt un cœur désespéré,
Comme pour les lilas, c'est la goutte de pluie
Qui fait épanouir leur feuillage altéré.
Quand on croit tout perdu, c'est lui qui nous convie
À ce banquet divin dont on sort enivré,
Ou, parmi les parfums des roses, l'homme oublie
L'ora, au loin grondant sous un ciel azuré.
Si la femme savait ce que peut un sourire,
Qu'il porte dans ses plis l'ivresse ou le martyre,
S'il vient nous caresser ou s'il n'est pas pour nous,
Sourirait-elle plus ? Qui sait ? Bien moins ; peut-être ?
Le sourire est la fleur qu'on met à sa fenêtre,
Et qui, pour un heureux, rend vingt passants jaloux.
Alfred de Baillet
Poème : Que de choses dans un sourire !
Recueil : Les poésies et sonnets intimes (1869)
Que de choses l'on voit briller dans un sourire ;
Sous le feu rayonnant d'un amoureux regard
L'on se prend à rêver aux moments de délire
De ces fiévreuses nuits dont on veut une part.
L'âme a su deviner tant de belles ivresses,
Au travers du rayon doucement enivrant,
Que l'être tout entier, ému par des promesses,
Déborde, aime et frémit d’un plaisir dévorant.
Mais en ce jour pourquoi sourire, ô ma mutine ?
Laisser voir aux regards vos contours séduisants,
Trésors abandonnés à l'ardeur qui butine,
Tels que, parmi les fleurs, pillent les vers luisants ?
Alfred Levic
Poème : Un sourire si doux.
Recueil : Les brises d'été, poésies (1870)
Oh ! le sourire aimé de celle qu'on adore
Rayonne à nos regards, comme un beau ciel d'été ;
Du jour le plus serein c'est la riante aurore ;
De l'étoile du soir la suave clarté !
C'est la rose qui s'ouvre aux baisers du zéphyr,
Embaumant le bosquet qui lui donna le jour ;
La vague harmonieuse où le soleil se mire ;
La fraicheur du matin dans un brûlant séjour !
C'est le discret aveu de la vierge naïve
Dont la sainte pudeur scelle la lèvre encor ;
D'un amour partagé la promesse craintive
Que l'amant dans son cœur grave comme un trésor !
Ce sourire si doux, c'est l'ineffable ivresse
Qui nous fait oublier tout, jusqu'à la douleur !
C'est du ciel entr'ouvert la plage enchanteresse !
C'est l'amour escorté de rêves de bonheur !
Louis Oppepin
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