La poésie française sur la haine.

1 - La haine en poèmes :

La poésie française De l'un des plus grands poètes de tous les temps, Victor Hugo, à la poétesse belge d'expression française, Françoise Leroy, ce recueil contient 9 poésies sur le thème de la haine. Dans son Journal intime en date du 6 février 1872, le poète et philosophe suisse, Henri-Frédéric Amiel, a écrit : La foi qui ne respecte, ni ne comprend, ni ne tolère des convictions différentes aux siennes, cette foi est une stupidité et une haine, elle est la mère de tous les fanatismes. Et sur le même thème, découvrez nos citations sur l'amour et la haine.
Autres recueils : La femme » L'homme » La vie » L'amitié » L'amour » Le sourire » L'espérance »

2 - Les poèmes, quatrains et sonnets sur la haine :

Poème : Tout, la haine et le deuil !

Recueil : Toute la Lyre (1888)
Jeunes gens, prenez garde aux choses que vous dites.
Tout peut sortir d'un mot qu'en passant vous perdîtes.
Tout, la haine et le deuil ! — Et ne m'objectez pas
Que vos amis sont sûrs et que vous parlez bas... —
Ecoutez bien ceci :

Tête-à-tête, en pantoufle,
Portes closes, chez vous, sans un témoin qui souffle,
Vous dites à l'oreille au plus mystérieux
De vos amis de coeur, ou, si vous l'aimez mieux,
Vous murmurez tout seul, croyant presque vous taire,
Dans le fond d'une cave à trente pieds sous terre,
Un mot désagréable à quelque individu ;
Ce mot que vous croyez que l'on n'a pas entendu,
Que vous disiez si bas dans un lieu sourd et sombre,
Court à peine lâché, part, bondit, sort de l'ombre !
Tenez, il est dehors ! Il connaît son chemin.
Il marche, il a deux pieds, un bâton à la main,
De bons souliers ferrés, un passeport en règle ;
— Au besoin, il prendrait des ailes, comme l'aigle ! —
Il vous échappe, il fuit, rien ne l'arrêtera.
Il suit le quai, franchit la place, et caetera,
Passe l'eau sans bateau dans la saison des crues,
Et va, tout à travers un dédale de rues,
Droit chez l'individu dont vous avez parlé.
Il sait le numéro, l'étage ; il a la clé,
Il monte l'escalier, ouvre la porte, passe,
Entre, arrive, et, railleur, regardant l'homme en face,
Dit : — Me voilà ! je sors de la bouche d'un tel. —

Et c'est fait. Vous avez un ennemi mortel.

Victor Hugo (1802-1885)

Poème : Chanson.

Recueil : Les poésies et chansons (1603)
Souhaitant que le Ciel punisse
De quelque rigoureux supplice
Ce coeur contre amour endurci,
Il faut dire que je l'aime,
Quoique mon amour soit extrême ;
C'est haïr que d'aimer ainsi.

Mais ne haïssant l'inhumaine,
Que pour ce qu'ingrate à ma peine,
Elle n'en a point de souci ;
Ma haine est si pleine de flamme,
Qu'amour la causant dans mon âme,
C'est aimer que de haïr ainsi.

Ou si cette haine amoureuse,
Veut que, plus et moins vigoureuse,
Elle m'aime et haïsse aussi ;
Dieux ! faites par votre clémence,
Que pour peine et pour récompense
Elle m'aime et haïsse ainsi.

Qu'amour soit clément ou sévère,
À tort je crains, à tort j'espère,
Et sa rigueur et sa merci ;
Ne méritant de ma cruelle
Amour, ni haine mutuelle,
D'aimer et de haïr ainsi.

Jean Bertaut (1552-1611)

Poème : Le contemplateur.

Recueil : Jour à jour, les poésies intimes (1880)
Pour le contemplateur, qui plonge
Dans le gouffre de l'éternel,
Tout est vain. — Lui-même est un songe ;
Rien n'est réel.

Le paraître et le disparaitre,
Ces ombres qu'il a cru saisir,
Ne sont plus. — Ce qui nous fait être
C'est le Désir.

Amour, haine, allégresse, envie,
Ont perdu pour lui leur valeur ;
Il dort. — Ce qui prouve la vie,
C'est la Douleur.

Tout ce qui commence ou s'achève
Meurt pour qui mourut au vouloir.
— Ce qui seul fait sortir du rêve,
C'est le Devoir.

Henri-Frédéric Amiel (1821-1881)

Poème : Ô Justice !

Recueil : Jour à jour, les poésies intimes (1880)
Ô Justice, déesse auguste,
Toi que blasphème notre erreur,
Qu'il est malaisé d'être juste
Quand des guerres sévit l'horreur !

De te renier tous font gloire,
Et, sur tes autels renversés,
Hurlent un hymne à la victoire,
Seul dieu des peuples insensés.

Chacun, plongeant dans la géhenne
Le frère qu'il nomme ennemi,
Fait épouser au ciel sa haine,
Haine que l'enfer a vomi.

Bien plus, ô misère suprême,
Effet d'un mal contagieux,
Enragé, le spectateur même
Délire et mord à qui mieux mieux.

Ah ! du moins, puisqu'il nous faut vivre
Captifs en la maison des fous,
Restons sobres dans un monde ivre,
Restons humains parmi les loups.

En cette existence qu'oppresse
Le malheur de l'humanité,
Il n'est de bon que la sagesse
Et de sage que la bonté.

Henri-Frédéric Amiel (1821-1881)

Poème : La défensive.

Recueil : Il penseroso (1858)
Devant tes ennemis que ton âme sereine
En soi ne laisse entrer ni colère ni deuil ;
L'indomptable douceur décourage la haine ;
L'impassible fierté déconcerte l'orgueil.

Henri-Frédéric Amiel (1821-1881)

Poème : À une jeune fille.

Recueil : Les poésies et sonnets d'un voyageur (1844)
Mon regard fut aussi riant
Que le tien, chaste jeune fille,
Et mon coeur aussi confiant.
Aujourd'hui plus rien n'y scintille.

Mes doux pensers sont tour à tour
Tombés sous une froide chaîne.
Le ciel m'avait appris l'amour,
Les hommes m'ont appris la haine.

Xavier Marmier (1808-1892)

Poème : Persévérance.

Recueil : Sentiment et devoir (1880)
Vous qu'arrête en chemin ou la Haine ou l'Envie,
Penseurs graves et doux, artistes généreux,
Femmes qu'un saint amour au dévouement convie,
Vous tous que Dieu fit bons, pour faire des heureux...

Pourquoi laisser aller à la tristesse, au doute,
Vos coeurs qu'a déchirés un Zoïle, un méchant ?
La pierre que reçoit le sage dans sa route,
Vers celui qui la jette a retourné souvent.

Poursuivez votre but ; armez-vous de courage ;
Sachant beaucoup aimer, sachez beaucoup souffrir ;
Et sans rendre jamais outrage pour outrage,
Restez fermes et forts ! montrez-nous l'avenir !

Il est grand, il est beau de soutenir la lutte
Lorsque le bien de tous est notre seul orgueil ;
La crainte, c'est la perte : un flot léger culbute
L'esquif du nautonier que fait trembler l'écueil.

Pour écarter l'obstacle, il faut une âme forte ;
Pour vaincre les méchants, il faut être meilleur ;
Pour triompher des sots, envieuse cohorte,
A l'art, à la science, il faut joindre l'honneur.

Qu'importe que l'on soit méconnu du vulgaire ?
Tel qui se montre grand, offusque les petits ;
L'aveugle-né sait-il le prix de la lumière ?
Faut-il les instincts purs aux grossiers appétits ?

Marchez ! accomplissez vos destins ! Dieu désigne
Atout homme sa route et veut qu'en ce sillon,
Malgré l'hostile ivraie et la haine maligne,
Il féconde sa gerbe ou plante son jalon.

Marchez ! soyez unis ! Sans la persévérance
Et l'union sublime il n'est point de succès ;
Marchez ! mais que toujours les arts et la science
Répandent sous leurs pas les bienfaits du progrès !

Françoise Leroy (1826-1898)

Poème : La crainte et la haine.

Recueil : Les poésies et sonnets d'un voyageur (1844)
Lorsque l'un contre l'autre, entraînés tour à tour,
Les hommes courent à la guerre,
Eux qui sont nés avec un coeur que pour l'amour
Dieu lui-même avait voulu faire.

Je crois pourtant que rien ne m'ôtera la paix
Que je respire à longue haleine,
Ni la croyance en Dieu qui repousse à jamais
Loin de moi la crainte et la haine ;

Ni l'ombre du platane aux rameaux longs et verts
Qui sur les champs de blé s'incline,
Ni les tendres pensers et les pieux concerts
Qui s'élèvent dans ma poitrine.

Xavier Marmier (1808-1892)

Poème : Le monde.

Recueil : Sentiment et devoir (1880)
Tu me demandes pourquoi je n'aime pas le monde ?
Pourquoi tous ses plaisirs me semblent sans attraits ?
Pourquoi je n'y vois rien qui me charme ou réponde
Aux besoins de mon coeur, plus calmes, plus discrets ?

C'est que le monde est faux, méchant, rempli d'envie,
D'égoïsme et d'orgueil ! — C'est que froid et railleur,
Il tue en nous l'amour, la foi, la poésie,
Tout ce qui rend heureux, tout ce qui rend meilleur.

Non, le luxe, le bruit par lesquels il captive
L'être frivole et vain qu'il peut seul attirer,
Ne valent pas un chant, une note plaintive
Que le vent, que l'oiseau, que l'onde fait vibrer.

Et si, fuyant toujours les rumeurs de la foule,
J'aime la paix des champs, le calme des forêts,
C'est que plus douce ainsi l'existence s'écoule,
Sans laisser à nos fronts des ennuis, des regrets.

C'est que j'aime écouter ta voix tendre et sincère
Me parler d'amitié, d'étude, d'avenir,
Et contemplant le ciel, les beautés de la terre,
Élever ma pensée à Dieu pour le bénir !

C'est qu'il est doux d'avoir, alors que tant de haines
De leur amer poison déchirent plus d'un coeur,
Un être qui nous aide à supporter nos peines,
Et dans nos jours heureux nous double le bonheur.

Françoise Leroy (1826-1898)

3 - Autres recueils de poésies :

Les poèmes à thèmes » L'amour » Le mariage » La vie » L'amitié » Le bonheur »
Top