La poésie française sur l'espoir et l'espérance.
L'espérance est un aiguillon, la foi un soutien.
Mais ni l'espérance ni la foi ne contiennent une garantie de succès, parce que le succès ne dépend qu'en très petite partie de notre désir. (Henri-Frédéric Amiel)
2 - Les poèmes et sonnets sur l'espérance :
Poème : Espoir timide.
Recueil : L'exilée (1878)
Chère âme, si l'on voit que vous plaignez tout bas
Le chagrin du poète exilé qui vous aime,
On raillera ma peine, et l'on vous dira même
Que l'amour fait souffrir, mais que l'on n'en meurt pas.
Ainsi qu'un mutilé qui survit aux combats,
L'amant désespéré qui s'en va, morne et blême,
Loin des hommes qu'il fuit et de Dieu qu'il blasphème,
N'aimerait-il pas mieux le calme du trépas ?
Chère enfant, qu'avant tout vos volontés soient faites !
Mais, comme on trouve un nid rempli d'oeufs de fauvettes,
Vous avez ramassé mon coeur sur le chemin.
Si de l'anéantir vous aviez le caprice,
Vous n'auriez qu'à fermer brusquement votre main,
— Mais vous ne voudrez pas, j'en suis sûr, qu'il périsse !
François Coppée (1842-1908)
Poème : Quelque si doux espoir où ma raison s'appuie.
Recueil : Œuvres poétiques (1626)
Quelque si doux espoir où ma raison s'appuie,
Un mal si découvert ne se saurait cacher ;
J'emporte malheureux, quelque part où je fuie,
Un trait qu'aucun secours ne me peut arracher.
Je viens dans un désert mes larmes épancher,
Où la terre languit, où le Soleil s'ennuie,
Et d'un torrent de pleurs qu'on ne peut étancher
Couvre l'air de vapeurs et la terre de pluie.
Parmi ces tristes lieux traînant mes longs regrets,
Je me promène seul dans l'horreur des forêts,
Où le funeste orfraie et le hibou se perchent.
Là le seul réconfort qui peut m'entretenir,
C'est de ne craindre point que les vivants me cherchent
Où le flambeau du jour n'osa jamais venir.
Théophile de Viau (1590-1626)
Poème : L'espoir.
Recueil : Romances (1830)
Je voudrais aimer autrement,
Hélas ! Je voudrais être heureuse !
Pour moi l'amour est un tourment,
La tendresse m'est douloureuse.
Ah ! Que je voudrais être heureuse !
Que je voudrais être autrement !
Vous dites que je changerai :
Comme vous je le crois possible,
Mon coeur ne sera plus sensible ;
Je l'espère, car je mourrai.
Oui ! Si la mort peut l'impossible,
Vous dites vrai, je changerai !
Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859)
Poème : Le dernier espoir.
Recueil : Le livre posthume (1911)
Il est un arbre au cimetière
Poussant en pleine liberté,
Non planté par un deuil dicté, -
Qui flotte au long d'une humble pierre.
Sur cet arbre, été comme hiver,
Un oiseau vient qui chante clair
Sa chanson tristement fidèle.
Cet arbre et cet oiseau c'est nous :
Toi le souvenir, moi l'absence
Que le temps - qui passe - recense...
Ah, vivre encore à tes genoux !
Ah, vivre encore ! Mais quoi, ma belle,
Le néant est mon froid vainqueur...
Du moins, dis, je vis dans ton cœur ?
Paul Verlaine (1844-1896)
Poème : L'espoir trompé.
Recueil : Élégies (1813)
Après un an de mortelles douleurs,
Quand de mes feux j'allais guérir peut-être,
Dans la retraite où je cachais mes pleurs
Soudain j'ai vu l'infidèle apparaître.
Son air ému, son discours enchanteur,
Et son regard, qui, dangereux flatteur,
Quand il le veut dit si bien je t'adore,
D'un doux espoir ont fait battre mon cœur ;
J'osai penser qu'il m'aimerait encore :
Je recueillis ce regard, ce discours,
Cet air ému, cette douce promesse
D'être pour moi comme dans mes beaux jours ;
Mais rien, hélas ! n'était de la tendresse.
Je ne devais qu'au désir d'un moment
De son retour l'ivresse mensongère ;
Mon court bonheur ne fut qu'une chimère ;
Je le pairai d'un éternel tourment.
Adélaïde-Gillette Dufrénoy (1765-1825)
Poème : Quand je pense à ma vie.
Recueil : Les amours d'Hippolyte (1573)
Quand quelquefois je pense à ma première vie
Du temps que je vivais seul roi de mon désir,
Et que mon âme libre errait à son plaisir,
Franche d'espoir, de crainte, et d'amoureuse envie :
Je verse de mes yeux une angoisseuse pluie,
Et sens qu'un fier regret mon esprit vient saisir,
Maudissant le destin qui m'a fait vous choisir,
Pour rendre à tant d'ennuis ma pauvre âme asservie.
Si je lis, si j'écris, si je parle, ou me tais,
Votre oeil me fait la guerre, et ne sens point de paix,
Combattu sans cesser de sa rigueur extrême ;
Bref, je vous aime tant que je ne m'aime pas,
De moi-même adversaire, ou si je m'aime, hélas !
Je m'aime seulement parce que je vous aime.
Philippe Desportes (1546-1606)
Poème : Le zénith de la vie.
Recueil : La part du rêve (1863)
Providence, merci ! merci, ma destinée !
L'astre de mon printemps se lève radieux ;
Triomphante, et de fleurs la poupe couronnée,
Vogue, ô nef de mes jours , sur les flots glorieux !
Car tout sourit : le ciel à la mer fortunée,
Mes yeux au ciel d'azur et la vie à mes yeux ;
En moi chante une lyre, et mon âme étonnée
Rêve génie, amour, et sent venir les dieux.
Ainsi disais-je hier, et déjà dans ma voile
Le vent baisse et faiblit, et déjà mon étoile
Semble pâlir au ciel comme en mon cœur l'amour.
Entre un soleil et l'autre, oh ! quelle différence !
Est-ce là ta promesse, espérance, espérance ?
Solstice de nos ans, ne dures-tu qu'un jour ?
Henri-Frédéric Amiel (1821-1881)
Poème : L'espérance.
Recueil : Les brises d'été, poésies (1870)
L'espérance est la fleur dont le bois se parfume,
Le flot qui pousse au port le navire égaré,
L'étoile qui sourit dans un ciel azuré,
Le chant du frêle oiseau dans son doux nid de plume,
C'est le timide aveu de la chaste beauté,
L'obole dans la main du pauvre qui soupire,
Le rythme harmonieux du poète en délire
Rêvant le sceptre d'or de l'immortalité !
C'est la palme promise à la valeur des braves ;
Du proscrit regretté c'est le prochain retour ;
Après la sombre nuit l'aurore d'un beau jour ;
La douce liberté pour les peuples esclaves !
C'est la fraiche oasis dans le désert en feu,
Le berceau bien-aimé que protège une mère,
La voûte éblouissante où monte la prière ;
C'est la foi, c'est l'amour : l'espérance, c'est Dieu !
Louis Oppepin
Poème : La douce espérance.
Recueil : Les poèmes sur divers sujets (1823)
Toi qui parais toujours sous les traits qu'on désire,
Devant qui semblent fuir la crainte et la douleur,
Douce Espérance ! viens ; viens, et que ton sourire
Éclaircisse la nuit qui règne dans mon cœur ;
Parle à ce cœur, dis-lui (ta voix a tant de charmes !)
Qu'il peut germer encor pour lui quelque plaisir,
Que, pour tromper la peine, ou du moins l'adoucir,
L'esprit a sa magie, et l'amitié a ses larmes ;
Mais ne ramène point ces fantômes brillants
Qui devant moi semaient, aux jours de mon printemps,
Des fleurs qu'à leur éclat je croyais immortelles :
Mon esprit, abattu sous le poids de ses maux,
N'oserait contempler des images si belles ;
Ce n'est point le bonheur qu'il veut, c'est le repos.
Helen Maria Williams (1759-1827)
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