S'il est beau aux petits de se souvenir de ce qu'ils doivent aux grands, il est encore plus beau à ceux-ci d'oublier quelquefois ce que les petits leurs doivent. Nous devons, il est vrai, honorer les grands, parce qu'ils sont grands et que nous sommes petits, comme il y en a d'autres plus petits qui nous honorent. Et d'ailleurs, le bon ordre a toujours imposé la subordination ; la subordination suppose de la supériorité, et la supériorité demande du respect et de la considération. Mais cette distinction et cette préférence, nécessaires dans la société, ce respect extérieur qu'on accorde aux places ou à la naissance, ne doivent pas augmenter la vanité, comme ils n'augmentent pas la mérite. Devenu plus grand, celui qui pense bien ne s'en croit ni plus grand, ni meilleur qu'il n'était. Les respects et les hommages des autres hommes ne s'enorgueillissent point, parce qu'il sait que c'est à la place qu'ils s'adressent, bien plus qu'à la personne.