Titre : Le réveil de l'enfant chéri.
Recueil : Les brises du soir, poésies (1870)
Un splendide rayon d'aurore
S'est élancé du haut des cieux !
Soudain le vallon, sombre encore,
D'or et de pourpre se colore
Et se réveille radieux.
L'oiseau quittant son nid de mousse,
Par un mélodieux soupir,
Prélude à sa chanson si douce
Qu'emporte l'aile du zéphyr !
C'est le signal ! la chambre close
Timidement s'entrouvre au jour,
Et près de l'enfant qui repose,
La mère, oubliant toute chose,
S'élance, frémissant d'amour !
Le rideau blanc, gardien fidèle
Du sommeil de l'ange béni,
Sans bruit s'écarte, comme une aile
Qui se replie au bord du nid !
Tableau charmant ! Un enfant rose,
Sur la blanche couche de lin,
Beau comme un frais bouton de rose,
Depuis le soir, calme, repose,
Quelque ange lui donnant la main !
Un instant, la mère ravie
Contemple, l'œil brûlant d'amour,
Le trésor chéri de sa vie,
Le rayon de son plus beau jour !
Puis, de tendresse impatiente,
Comme un lys sur une humble fleur,
La mère se penche souriante,
Et pose sa lèvre tremblante
Sur le front du mignon dormeur !
À ces caresses recueillies
L'enfant a frémi de bonheur,
Et sur ses lèvres endormies
Éclot un sourire enchanteur ! ...
Puis, comme une gaze légère,
Qu'agite l'aile du zéphyr,
S'ouvre sa timide paupière,
Et dans l'œil ardent de la mère
Plongent deux beaux yeux de saphir !
Ses deux petites mains si frêles,
Mais délicates à ravir,
Implorent les mains maternelles,
Tendre appui pour se soutenir !
Et de sa bouche parfumée,
Dans un charmant balbutiement,
Monte cette parole aimée,
Plus douce à la mère charmée
Que tout chant ici-bas : « Maman !!! »
Ô délices d'amour ! ô ravissante ivresse !
La mère n'y tient plus ! elle saisit l'enfant,
Le couvre de baisers, lui sourit, le caresse !
Puis tombant à genoux, sublime de tendresse,
Dit : Couvrez-le, Seigneur ! de votre œil tout-puissant !
Louis Oppepin