On ne converse pas avec un sot, c'est pure perte de temps,
Il peut se trouver un homme qui mérite que vous lui adressiez la parole, et qui sera perdu si vous ne lui parlez pas. Il existe des gens qui ne méritent pas même que vous leur parliez si vous conversez avec eux, vos paroles seront perdues. L'homme prudent se garde bien de perdre un homme, et il sait ne pas perdre ses discours.
Chaque homme devient, jusqu'à un certain degré, ce que sont ceux avec qui il converse ; il acquiert leurs airs, leurs manières et même leur façon de penser. S'il les observe avec attention, il les égalera bientôt, et même, à la longue, il contractera l'habitude de leurs manières, sans s'efforcer de les imiter.
Converser d'égal à égal avec des intelligences inégales, c'est la confusion de Babel. La première chose à faire, c'est de se créer un langage commun, c'est-à-dire pour l'intelligence plus libre de redescendre dans l'échelle de la culture, au degré de l'interlocuteur, dans son atmosphère psychologique et dans sa moindre liberté. Le supérieur est incompréhensible pour l'inférieur, mais non pas l'inverse.
Méditer, c'est converser avec soi-même, conversation libre, variée, attachante, maîtresse de l'esprit par le charme de l'imprévu et la souplesse des déductions ; pleine de pensées graves et solides, semée d'épisodes capricieusement frivoles. Et la logique ne fronce pas le sourcil pour vous rappeler à l'ordre !
Mes facultés languissent, je n'ai pas les relations dont j'aurais besoin, et ne converse avec personne autour de moi sur des sujets vraiment intéressants. Je perds mes plus belles années, où l'entrain de la vie, le déploiement de la volonté dans une œuvre forte et utile devraient me soutenir et m'animer. Que la douleur soit bonne au moins à quelque chose !
Le trop de prudence est un piège ; à converser le cœur s'allège !
Le soliloque intérieur est toute la ressource du condamné à mort dont l'exécution se retarde. Il se rassemble dans son for intérieur. Il ne rayonne plus, il psychologise. Il n'agit plus, il contemple. Il écrit encore à ceux qui s'attendent à lui ; mais il renonce au public et se replie sur lui-même. Comme le lièvre, il revient mourir à son gîte, et ce gîte c'est sa conscience, sa pensée. C'est aussi son journal intime. Tant qu'il peut tenir la plume et qu'il a un moment de solitude, il se recueille devant cet écho de lui-même, et converse avec son Dieu.
Quel ennui de ne trouver nulle part d'écho suffisant, ni pour converser, ni même pour jouer ! Cela me ramène à ce qu'il y a d'aride, d'isolé, d'égoïste, et de froid dans la vie qui m'est faite ! Je ne suis pas en contact avec la vraie existence morale, l'énergie, l'amour, la piété. Je vis dans une lumière crépusculaire et, comme les ombres d'Homère, sans attache vive, sans palpitation du cœur, demi-mort, demi-transparent, ennuyé, latent.
On ne converse pas avec un sot, c'est pure perte de temps !
Lorsque deux hommes se séparent après avoir conversé pendant trois ou quatre heures, on peut être assuré que chacun des deux ignore profondément ce que pense l'autre.
Une douzaine d'honnêtes gens qui se font écouter produit plus de bien que cent volumes ! Peu de gens lisent, mais tout le monde converse, et le vrai fait impression.
Le pays a été saisi depuis un certain nombre d'années d'une fièvre de bavardage inouïe dans les fastes de la sottise humaine. Tout le monde veut parler, on a recours pour cela à des subterfuges incroyables. Tout le monde converse en même temps, et personne ne se comprend.
Il y a beaucoup de charme à écrire sans arrière-pensée de publier, c'est une agréable manière de converser avec soi-même.
L'homme oublie qu'il est un mort qui converse avec des morts.
Lire de bons livres, c'est converser avec la raison.
C'est quasi le même de converser avec ceux des autres siècles que de voyager.
Tout le monde sait que, lorsque le diable dialogue et converse avec d'autres démons, il parle un jargon moitié italien, moitié espagnol. Il dit aussi çà et là quelques mots latins.
Entre deux amants on converse sans se dire un mot ; l'esprit suit la même marche, passe par les même phases et les mêmes pensées : si, au bout d'une heure, tous deux ouvraient leurs bouches et parlaient en même temps, il est à parier qu'ils diraient le même mot.
Le moyen le plus sûr et presque le seul d'acquérir une connaissance parfaite des finesses de notre langue, et surtout de ces exceptions qui paraissent si contraires aux règles, c'est de converser souvent avec un homme instruit. Vous apprendrez plus dans quelques entretiens avec lui, que dans une lecture qui laisse presque toujours des doutes.
Je n'aime pas à converser avec un incompétent de choses sérieuses. Pourquoi ? J'ai cru d'abord que c'était jalousie secrète, répugnance à me laisser exploiter. Mais non ; c'est plutôt le sentiment de profanation qu'il m'inspire toujours ; il entre en curieux goguenard dans le sanctuaire des pensées qui vous tiennent à cœur.
La conversation est un échange, un troc spirituel opéré par la parole ; elle suppose au moins deux personnalités, et l'on ne converse avec soi-même qu'en se dédoublant ; deux personnalités égales, on ne converse pas avec un domestique, ou bien on le sort par là-même de son rang inférieur.
Quand on ne converse plus guère qu'avec soi-même, la prolixité du monologue est imminente ; le journal intime devient un peu comme ces vieilles dames qui, vivant seules, finissent par causer à leurs meubles et à leurs chats, pour maintenir leur aptitude à la parole. Il y a certaines semaines où je donne dans ce piège d'oisif solitaire et de vieillard rabâcheur. Il me semble qu'aujourd'hui, ma plume a terriblement marmotté entre ses dents de choses inutiles et connues. Le soliloque a tourné en cercle comme l'écureuil prisonnier. J'ai très peu lu et travaillé. Ce parfilage psychologique est un très maigre remplacement de l'étude proprement dite ; et les convives qui sonnent à la file m'annoncent que le gala-souper nous attend, c'est-à-dire que la journée de travail est finie. De profundis ! Il faudra réparer demain ce temps précieux, ce temps perdu.
Les hommes dont le jugement est sain, et la volonté droite et ferme, ont conversé longtemps avec la solitude, elle leur a livré ses secrets et révélé le sens de bien des énigmes ; car c'est une science universelle que la solitude, et celui qui y a été initié de bonne heure connaît beaucoup de choses et a vécu beaucoup.
Qui n'a pas conversé avec la souffrance de son corps ignore ce qu'est un dialogue.
En conversant avec les hommes, cherchez bien plutôt à vous instruire qu'à instruire les autres.
Conversez avec les gens de bien, et vous deviendrez meilleur de jour en jour.
Savoir bien les choses est plus utile pour écrire ; savoir bien des choses est plus utile pour converser.
La solitude n'est pas l'absence de compagnie, mais le moment où notre âme est libre de converser avec nous et de nous aider à décider de nos vies.
Tel pense converser, qui babille et radote, et tenant seul le dé, se conduit en despote.
Il faut toujours avoir dans sa tête un coin ouvert et libre pour y donner une place aux opinions de nos amis et les y loger en passant. Il faut avoir enfin un cœur et un esprit hospitaliers. Il devient réellement insupportable de converser avec des hommes qui n'ont dans le cerveau que des cases où tout est pris.