Exister au centre de l'amour est une aventure à laquelle peu de personnes sont aptes. C’est un climat fort éprouvant ; la plupart de ceux qui s'y hasardent risquent de mourir de fièvre ou d'inanition. Peu de constitutions y résistent. Quant à moi, ses luttes, ses peines et ses mystères me sont plus qu'une terre natale. Là seulement, je me retrouve dans mon élément ! Sans faux semblant, ma vie est bien la mienne, et par conséquent mon œuvre.
La grande aventure humaine est de gagner quotidiennement son pain.
Jean Dutourd - Henri ou l'Éducation nationale (1983)
L'homme prudent s'entoure du maximum de garanties ; il met de son côté toutes les chances favorables ; et puis il s'aventure. Toute vie est une aventure ; et les pires dupes sont ceux qui se risquent sans s'en rendre compte.
L'inquiétude inguérissable de l'esprit humain, voilà l'âme de l'histoire et du progrès. C'est par elle que, semblables aux bêtes nobles qui vivent dans la liberté des bois, les nations s'en vont cherchant de çà, de là, ce qui leur convient, s'égarant, prenant le change, mais se ravisant, cherchant toujours et poursuivant jusqu'au bout leur immortelle aventure.
L'aventure déblaye en plein réel des oasis de ferveur et d'intensité ; elle redonne vie à l'instant picaresque, exalte le délicieux décousu de l'existence.
Certaines consciences sont bonnes personnes, d'un caractère facile ; elles ne courent pas après les aventures, mais quand les aventures viennent les chercher, elles se laissent faire sans qu'il soit besoin de leur mettre le pistolet sur la gorge.
Si je pouvais te faire vivre ce que j'ai vécu ! tu cesserais bien vite de demander à la vie des aventures et des émotions qu'elle ne donne jamais qu'en échange de douleurs et de regrets sans nom.
Quand l'homme, réconcilié avec le devenir, reçoit la succession des jours comme un cadeau gratuit qui lui est fait, dit merci à la lumière nouvelle du nouveau matin et au nouveau printemps, accepte la nouvelle saison de l'année comme un don auquel il n'avait pas droit, lorsque sa gratitude pour cette grâce imprévue lui rend perceptible le joyeux avènement de quelque chose d'autre, alors l'homme converti au caractère insolite de l'instant s'émerveille de trouver l'aventure dans la vie la plus quotidienne ; il la trouve en ouvrant ses persiennes le matin, et il rend grâces à Dieu d'avoir permis qu'il vive jusqu'à cette nouvelle aurore.
Il y avait une fois un pauvre fonctionnaire qui se rendait toujours à son bureau en suivant le même itinéraire. Un beau jour, en suivant cet itinéraire de la vie sérieuse, il rencontre un sourire de femme ; il fait un crochet, ne change pas à la station de métro où il aurait dû changer, ne tourne pas au coin de la rue où il est habitué à tourner. Son aventure ressemble à celle des atomes d'Épicure qui tombaient parallèlement dans le vide. Si ces atomes avaient continué à tomber d'une chute sempiternelle les uns à côté des autres, il ne serait jamais rien arrivé. Pour que quelque chose advienne en général, il a donc fallu qu'un atome fasse un caprice, veuille vivre sa vie et s'écarte des autres. Il a fallu une rencontre.
L'aventure est une petite vie à l'intérieur de la grande ; encastrée dans la grande vie ennuyeuse, terne et morne, qui est notre quotidienneté, l'aventure ressemble alors à une oasis de romanesque où les hommes, recherchant la haute température de la passion, se sentent pour la première fois exister : quittant leur vie de fantômes pour la délicieuse illégalité, ils connaîtront enfin la condensation passionnée d'un vrai devenir.
L'aventure amoureuse ressemble à l'œuvre d'art. Mais en un autre sens, l'amour pousse des racines profondes au centre de l'existence et l'intéresse tout entière d'une manière tellement essentielle que la vie peut en être de fond en comble transformée.
Don Juan, cet aventureux qui est presque un aventurier, fait le tour des féminités successives ; sa vie aventurière est un périple de beauté en beauté, chaque merveille refoulant dans le passé la merveille précédente. Le pluriel polygamique des bonnes fortunes empêche l'enracinement tragique de l'amour au centre de l'existence, contrarie la totalisation destinale de la passionnette, entretient en somme le caractère frivole de chaque aventure.
L'homme qui n'a eu dans sa vie qu'une seule aventure est celui dont la maîtresse est devenue la femme ; l'île joyeuse s'est rattachée à un continent des plus sérieux.
L'aventure d'amour est un jeu sérieux. Nous savons bien comment une intrigue commence, mais nous ne savons pas trop comment elle continue, et encore moins comment elle finira... Dieu seul sait jusqu'où peut aller une aventure qui commence en madrigal !
L'aventureux qui a quitté volontairement sa famille et ses occupations se trouve pris, sur les pentes de l'Everest, dans une tourmente de neige. À partir de ce moment il regrette sans doute d'être parti, mais il est trop tard pour regretter et revenir sur ses pas : à partir de ce moment, il se bat pour son tout-ou-rien, il se bat pour sa peau. Ce qui est en jeu désormais c'est sa destinée et son existence même ; c'est, comme on dit, une question de vie ou de mort.
Quel bonheur que le monde soit si grand ! on y peut chercher des aventures. Je veux, quand je serai grand, conquérir ces montagnes qui sont tout au bout de la terre. C'est là que se lève la lune ; je la saisirai au passage et je te la donnerai. – Oui, tu me la donneras, et je la mettrai dans mes cheveux.