Les pensées ont un sexe, a-t-on dit. Sont du genre féminin celles qui expriment des sensations et des sentiments ; du genre masculin celles qui ont trait à la volonté et à l'action.
La sensation use la sensation ; le sentiment s'use de lui-même ; il n'y a que les idées qui sont immuables et ne périssent point.
L'angoisse est moins supportable que la douleur ; l'angoisse aiguise les sensations, la douleur les émousse.
La passion amoureuse, c'est un embrasement, un feu qui ravage et brûle tout : le passé, les souvenirs, les valeurs. Il rabote le présent, le réduit à la seule expérience qui vaille la peine d'être vécue : la présence de l'autre. A la seule réalité qui en attise les sensations : son absence cruelle. C'est un torrent tumultueux qui ne connaît aucun obstacle, seulement la pente glissante qui le conduit à dévaler vers son propre épuisement.
L'amour, c'est un ensemble de sensations qui se rassemblent d'un seul coup en toi. Des sensations que tu peux avoir vécues dans d'autres situations, mais dans le désordre, et qui, soudain, se cristallisent, deviennent si denses qu'elles prennent toute la place en toi. Au début c'est plutôt diffus, puis ça s'impose, comme si, d'un seul coup, tu retrouvais quelque chose d'oublié ou de perdu que tu avais toujours connu et qui est là, présent, soudain accessible, familier. Oui, comme si on le savait toujours.
Un homme qui a tout perdu, qui est à bout de voie, peut encore se procurer à très bon compte, et même gratis, des sensations exquises qui valent la peine de vivre.
L'homme de sentiment transforme ses sensations en sentiments ; c'est-à-dire qu'il les fait arriver jusqu'à son cœur qui reflète confusément les couleurs des choses, s'imprègne de leurs parfums, réfléchit leurs formes, s'éclaire avec elles.
Nos sensations se convertissent quelquefois en idées, et nos idées influent sur nos sentiments.
On ne paye jamais trop cher une sensation !
Chaque fois que l'on fait sensation, on se fait un ennemi. Pour être populaire, soyez médiocre.
Toutes les sensations qui n'émanent pas de l'âme sont le reflet des objets extérieurs que l'homme subit et ne choisit pas toujours. Le jugement est la faculté de saisir les rapports existants entre les idées, les choses, les formes, les sons et les couleurs ; et le goût est un tact particulier qui nous les fait envisager au point de vue le plus harmonieux, soit dans leurs détails, soit dans leur ensemble.
Il y a une égale et continue sensation de bonheur que doit donner un heureux mariage, quand, sûrs l'un de l'autre et se connaissant bien, un homme et une femme ont trouvé le secret de varier l'infini et de mettre l'enchantement dans le fond même de la vie. C'est le beau secret des véritables épouses.
Toute pensée dérive d'une sensation contrariée.
La plus petite des sensations n'est jamais trop chère.
Le sentiment du sentiment est déjà sensation - sensation de la sensation - et ainsi de suite.
La plupart des hommes prennent en amour leurs sensations pour des sentiments ; en religion, leurs sentiments pour des idées ; en politique, leurs idées pour des faits.
Les imbéciles croient toujours éprouver des sensations exceptionnelles refusées aux autres hommes.
Le bonheur est une idée abstraite composée de quelques sensations de plaisir.
L'amour le plus chaste est celui qui de degré en degré s'élève le moins vite du sentiment à la sensation, celui pour qui la possession n'est point un but, mais une conséquence inévitable. Si l'amour n'était qu'un appétit des sens, il mourrait une fois satisfait, et ne s'élèverait pas jusqu'à l'idéal de la perfection.
L'expression des sensations est dans les grimaces, celle des sentiments est dans les regards.
Entre la connaissance et la sensation, le rapport, c'est le sentiment.
Les sensations tiennent plus de place dans notre existence que les pensées.
Les sensations sont pour le plaisir, le sentiment est pour le bonheur.
Quinze ans, c'est l'âge heureux des sensations vives et des plaisirs sans arrière-pensées.
Le plaisir est une sensation agréable produite par la possession ou la vue d'un objet désiré ; c'est l'état de l'âme sous le charme d'une idée riante ; ou bien encore c'est l'épanouissement du corps et de l'âme unis dans une même satisfaction.
Abstenons-nous de curiosités qui ne peuvent nous donner qu'une sensation passagère.
Qui n'a pas éprouvé de sensations au contact d'une main ? La main, c'est l'indice du tempérament.
Rien n'est plus proche du merveilleux que la sensation d'aimer.
Les sensations aident le sentiment.
Les idées perdront toujours leur procès contre les sensations.
Il n'est rien de si doux que la conviction de partager une sensation avec la personne que l'on aime.
Il n'est aucune sorte de sensation qui soit plus vive que celle de la douleur.
Il n'y a de vrai que les sensations physiques.
L'homme ne pouvant être pris de deux sensations vives à la fois, une grande douleur s'évanouit à l'arrivée d'une plus grande. Ainsi la perte d'une personne aimée est une diversion à la perte d'une fortune ; la pensée de l'une est, non pas une consolation, mais une distraction de l'autre.
L'ignorance fait tout le plaisir et toute la fraîcheur des premières sensations.
Toutes nos idées sont d'abord des sensations, et ensuite des souvenirs.
L'imagination est une sensation qui s'apaise et s'évanouit.
La réalité de la vie, ce n'est pas la sensation, c'est l'activité.